Aller au contenu principal
Il y a présentement des items dans votre panier d'achat.

Les politiques et initiatives pour réduire l'impact environnemental des systèmes agricoles  sont souvent axées sur l’encouragement d’actions individuelles et elles sont peu orientées sur la promotion d’actions collectives. Or, la gestion agro-environnementale d’un territoire implique une coordination d’actions écologiques dans l’objectif d’assurer un approvisionnement de services écosystémiques (SE), ainsi qu'un engagement de la part des producteurs agricoles, des pouvoirs publics et de l’ensemble des acteurs touchés par cet enjeu. Cette recherche s’appuie sur le concept des biens communs et montre comment cette stratégie de gouvernance répond mieux aux défis de gouvernance agro-environnementale, et assure la coproduction des SE par les agro-écosystèmes. Cette communication montre la variété et la complexité des stratégies des communs, et comment elles sont les résultats de processus délibératifs et d’une hybridation entre plusieurs types d’arrangements institutionnels. De plus, afin de saisir la pluralité de ces stratégies et les défis que posent la gouvernance collective en agriculture, ce travail propose un cadre d’analyse composé de quatre facteurs principaux : (1) le potentiel de l’action collective à améliorer l’approvisionnement des SE agricoles; (2) l'influence des coûts de transaction dans la gestion collective; (3) l’influence des arrangements institutionnels sur la participation; et (4) le rôle des relations de pouvoir dans la prise de décisions collectives.

Dans cette communication, je propose de penser la religion en diaspora selon le postulat d’un modèle de champ religieux "transplanté" (Bastenier & Dassetto 1984). Il s’agit, dans cette optique, de mettre à jour la présence de communautés musulmanes en diaspora (Saint-Blancat 2004), et en particulier en Occident (Cesari 2004 ; Haddad & Smith 2015). Sur la base d’une recherche sociologique sur l’islam institutionnel en diaspora, je me penche sur l’étude du cas des fonctionnaires de la Diyanet (Direction des affaires religieuses en Turquie) à Montréal. Il y a certes la question migratoire, mais il faut aussi considérer celle de l’impact de la gouvernance du religieux par l’État dans une dimension transnationale. Dans mon analyse, la réflexion sur le champ religieux en diaspora fait appel aussi bien à la question du monopole de l’État (Bourdieu, Weber) qu’aux activités des ONGs religieuses transnationales en contexte migratoire. Enfin, dans une perspective de sociologie politique, je propose de penser la religion en diaspora dans le cadre d’une réflexion théorique sur le thème, toujours d’actualité, du « Vivre ensemble ».

L’Union des producteurs agricole (UPA) a été un interlocuteur bien présent lors du processus d’élaboration menant à la Politique bioalimentaire 2018 - 2025 du gouvernement du Québec. Plusieurs reproches ont alors visé cette organisation syndicale concernant son présumé pouvoir d’influence trop important auprès des parlementaires. Le statut de syndicat unique de l’UPA, au sens de la loi, ses implications dans la majorité des activités de production ainsi que de mise en marché des produits agroalimentaires québécois et ses mandats variés de lobby auprès des titulaires de charges publiques ont alimentés cette perception. Néanmoins, cette critique énoncée envers l’UPA n’a pas été plus documentée. Notre projet de recherche vise à évaluer la perception qu’ont les parlementaires du pouvoir d’influence de l’UPA sur leur travail, avec l’élaboration de la Politique bioalimentaire 2018 – 2025 comme étude de cas. Par le biais d’entrevues semi-dirigées, nous avons questionné les députés des différents partis politiques de l’Assemblée nationale du Québec impliqués à l’époque. Nous avons cherché à obtenir leurs avis sur l’implication de l’UPA lors des démarches parlementaires, de consultation publique et dans les médias. Quelles influences l’UPA a-t-elle eues finalement sur les parlementaires, selon eux, sur leurs décisions et quels facteurs ont pu moduler ces impacts?

L’interdisciplinarité s’impose pour répondre à la complexité croissante des enjeux économiques, environnementaux et sociaux. Les programmes universitaires d'ingénierie s’adaptent en intégrant graduellement des connaissances issues des sciences sociales. L’importance de l’interdisciplinarité dans la recherche en ingénierie est toutefois peu documentée. Notre étude vise à caractériser l’interdisciplinarité de la recherche en ingénierie en ciblant spécifiquement les sciences sociales.

Pour la caractériser, nous utilisons une approche bibliométrique basée sur les références et les citations des publications disponibles dans une base de données bibliographiques. En complément de cette approche courante, nous utilisons une source moins souvent exploitée: les travaux de recherche (mémoires/thèses) contenus dans une base de données institutionnelles.

Nos résultats préliminaires permettent de caractériser l’interdisciplinarité par le biais des publications et des travaux de recherche des professeurs-chercheurs d’une université canadienne d’ingénierie. Sur une période de 10 ans, on observe une hausse des collaborations interdisciplinaires.

L’étude contribue à l’avancement des connaissances en interrogeant les moyens de caractériser l’interdisciplinarité dans les travaux de recherche, et en l’évaluant empiriquement à partir de deux sources de données. Les résultats apparaissent prometteurs et suggèrent d’étendre la méthodologie à un échantillon plus vaste, et à une variété de disciplines.

Comme se plaît à le rappeler la Cour suprême, la liberté d’expression est particulièrement importante à la société canadienne. Celle-ci constituerait un pilier des démocraties modernes. La protection de la libre expression est d’ailleurs assurée par de nombreux textes juridiques canadiens, au premier chef la Charte canadienne des droits et libertés.Comme l’expression peut être le véhicule de toute idée, aussi néfaste soit-elle, il est inévitable que certains discours puissent s’opposer à des droits bénéficiant aussi d’une protection constitutionnelle. C’est le cas, lorsque l’exercice de la liberté d’expression se fait en conflit avec le droit à l’égalité, notamment dans le cas de propos haineux. Conformément à la protection supra-législative dont ils bénéficient et en raison du principe de non-hiérarchie juridique des droits fondamentaux, le droit à l'égalité et la liberté d'expression doivent être également respectés, protégés et mis en œuvre.

Les conflits découlant de l’exercice de ces droits soulèvent toutefois de nombreuses questions et la jurisprudence illustrent une autre réalité. Ce qui permet de s’interroger sur la réelle mise en œuvre du principe de non-hiérarchie des droits. Il existerait ainsi une hiérarchie matérielle des droits et libertés, laquelle serait favorable au droit à l’égalité. L’analyse de la jurisprudence récente révèle que le droit à l’égalité se voit accordé une protection plus généreuse que la liberté d’expression.

Les instruments d’action publique dits de concertation et de participation du public tel que ceux qui répondent à l’appellation Gestion intégrée des zones côtières (GIZC) sont souvent présentés comme des dispositifs neutres. Pourtant, ces dispositifs informationnels et participatifs ont des effets, ne serait-ce que dans leur prise en charge ou non de la conflictualité qui les entoure. Il est donc intéressant de s’interroger sur la capacité de ces instruments à se laisser pénétrer ou non par des idées conflictuelles et un discours plus polémique, notamment pour promouvoir un bien commun territorialisé.Dans ce travail, la conflictualité est considérée comme unélément essentiel à l’unité de la vie sociale (Simmel, 1908) et participe aux processus de développement local (Torre, 2006). Nous proposons d’exposer une grille d’analyse dynamique nous permettant d’expliquer le comportement et les trajectoires des acteurs d’un instrument à l’autre. Cette grille a été construire de façon inductive en revisitant le modèle théorique « exit-voice-loyalty » deHirschman (1970). Notre cadre théorique basé sur l’instrumentation de l’action publique nous a permis de décoder les effets inattendus de ces instruments. C’est l’étude de cas du territoire insulaire des Iles-de-la-Madeleine, soumis à l’arrivée potentielle de la filière gazière et pétrolière, qui nous a permis de construire de façon inductive une lecture de la conflictualité.



L’accessibilité à la justice est, entre autres, tributaire de la capacité à payer les frais d’avocats (Bernheim, 2016 ; McDowell, & Sheikh, 2009). Cette capacité à payer conditionne largement l’accès à des services d’avocat pour faire valoir ses droits et défendre sa cause. Or, elle est peu explorée empiriquement et les facteurs qui la déterminent le sont encore moins. La présente recherche explore les tenants et les aboutissants de la capacité à payer pour les services d’un avocat.

Inspirée des théories évaluatives sur la révélation des préférences des acteurs, la recherche utilise les données d’un sondage de SOM en 2018, auprès de 1004 individus, dans le cadre de la recherche évaluative encours sur l’aide aux victimes d’actes criminels au Québec. Les données portent à croire qu’en moyenne, les justiciables sont disposés à payer 91 $ pour une heure de service d’avocat.

Des régressions multivariées et des ANOVA ont identifié plusieurs déterminants socio-économiques, démographiques et cognitifs (perceptions individuelles sur l’efficacité du système de justice). Les données indiquent une capacité maximale à payer des hommes supérieure à celle des femmes de plus de 31 $, toutes choses égales par ailleurs. Une mauvaise expérience dans une cour de justice, le manque de confiance au système de justice et une perception exagérant l’importance des lois dans le quotidien des individus apparaissent comme des facteurs susceptibles de réduire leur velléité à payer les services d’un avocat.

Lorsqu’en mars 2020, les décideurs prirent des mesures historiques pour contenir la propagation du virus SARS-CoV-2, la connaissance nécessaire pour informer la décision fut caractérisée par le ‘paradoxe de l’incertitude’ : une forte demande en information, mais une faible quantité d’informations fiables disponibles. Par exemple, il était difficile pour les décideurs en l’absence de tests disponibles au début de l’épidémie de pouvoir juger de son ampleur. Les décideurs ont pourtant dû faire un choix en se basant sur certaines informations, mais lesquelles ? Face à un haut niveau d’incertitude, dans quelle mesure l’information scientifique a-t-elle compté ? Lorsqu’ils font un choix, les décideurs doivent souvent faire face à une trop grande densité d’informations (Baumgartner et Jones 2015). La sélection d’informations est alors réalisée soit de manière consciente (information jugée crédible), soit relativement inconsciente (c’est alors l’attention qui guide le choix). Au travers d’un modèle temporel utilisant la base de données du projet Oxford COVID-19 (OxCGRT), nous proposons d’estimer l’impact de l’utilisation de certaines informations (épidémiologie, science, attention, opinion) sur la décision en fonction de l’interaction avec le niveau d’incertitude. Nous montrons qu'au début de l'épidémie, l'attention compte dans la décision comparativement aux données épidémiologiques. Nous voulons contribuer ainsi aux connaissances sur la prise de décision en contexte d'incertitude. 

Que ce soit en l’intégrant ou en l’extrayant, la discipline juridique a continuellement été traversée par des réflexions portant sur la notion de légitimité. Les courants jus naturalistes ont d’abord tous une chose en commun : ils sont marqués par cette idée que le contenu du droit doit être légitime pour être valide. Tentant ensuite ardemment de créer une science du droit, les théories positivistes ont coupé avec les revers trop politiques et axiologiques de la notion de légitimité. Des critères formels de validité prennent dès lors toute la place et le droit n’a plus besoin d’être légitime pour être jugé valide. Cette époque accorde donc à l’État, ordre réputé légitime et souverain, le rôle exclusif d’énoncer le droit.

Depuis les événements de la 2e Guerre mondiale, cette mise à l’écart du concept de légitimité s’est atténuée et les références aux valeurs refont de plus en plus surface. Que ce soit dans la jurisprudence constitutionnelle, dans les théories générales du droit ou encore dans les nouvelles lois éthiques, un débat entourant la légitimité existe actuellement dans la communauté juridique.

La présente recherche vise à comprendre ce retour de l’intérêt des juristes envers le concept de légitimité et à comprendre le sens qu’il prend en théorie contemporaine du droit. Notre hypothèse est à l’effet qu’une relecture du concept s’avère nécessaire, puisque les fondements théoriques de la légitimité possèderaient aujourd’hui un nouveau visage.

Repenser le renforcement de l’État de droit dans les stratégies européenne et nord-américaine touchant la Caraïbe

La communication entend jeter un regard renouvelé sur les défis entourant la promotion de l'État de droit dans les stratégies européenne et nord-américaine pour la Caraïbe, en redéfinissant les contours conceptuels de cette doctrine et de sa consolidation en pratique. Je pose la question: comment et dans quelles mesures renforcer l’État de droit afin de mieux promouvoir la sécurité dans cette région alors que le Canada, les États-Unis et l'Union européenne ont récemment adopté des stratégies plaçant la sécurité au centre de leurs priorités pour la Caraïbe? Adoptant une approche mixte combinant recherche documentaire et entrevues avec divers acteurs, j'expliquerai en quoi les mesures visant la sécurité dans la Caraïbe illustrent une approche trop institutionnelle et centrée sur l’État. Considérant les caractéristiques économiques et la culture juridique dominante de la région, puis les déterminants de la politique étrangère, je propose une autre approche. Celle-ci invite à repenser l’État de droit par le renforcement des capacités individuelles et de la culture juridique en valorisant l’information et la formation juridiques dans la région et en coopérant avec les institutions proches de la population- institutions nationales des droits de la personne, ombudsman et organisations informelles- y compris dans l'action humanitaire et au développement. 

Depuis les temps immémoriaux, les femmes haïtiennes ont été toujours considérées comme des êtres faibles, des enfants/mineures incapables de décider. C’est ainsi que leur action politique va tourner autour d’un mouvement visant à renverser la tendance, face à un État fondamentalement mâle. 

Par conséquent, les mobilisations pour l’émancipation de la femme ont connu le succès marqué par l’obtention des droits à la pension pour les veuves et au congé de maternité; des droits de voter et de se faire élire aux élections. Aussi, la constitution haïtienne en son article 17-1, exige un quota minimum de 
30 % de femmes à tous les niveaux de la vie nationale. Pourtant, avec une représentation de seulement 28,6 % dans la fonction publique en 2017 et moins encore aujourd’hui, même ce faible quota n’est pas respecté. 

C'est donc dans cette mouvance que cette communication se donne pour objectif de répondre à la question : pourquoi, malgré la reconnaissance constitutionnelle de leurs droits, les femmes haïtiennes n’arrivent pas à en jouir pour avoir une représentation significative dans les domaines de la vie sociale et politique? 

La recherche documentaire et la réalisation d’un groupe de discussion (focus group) de plusieurs catégories de femmes haïtiennes, permettent de déduire qu’elles subissent un tort historique, manifesté sous forme d’atavisme, imprégné d’une sorte d’habitus social qui les empêche de se débarrasser des pratiques anciennes ou de l’éducation androcentrique reçue.

Les systèmes électoraux et leurs propriétés ont été étudiés depuis des siècles, et continuent de susciter de l'intérêt. Même si peu de changements se produisent dans les élections dans la sphère publique, d'autres environnements ont accepté des alternatives. L'objectif de dégager une majorité stricte (50 % + 1 voix) et d'identifier une victoire incontestable est déterminant. 

Les courses à la chefferie sont un exemple particulier de telles élections. On a pu voir à travers le Canada différents processus de scrutin basés sur le scrutin à vote unique transférable émerger ces dernières années. Ainsi, plutôt que d'organiser de multiples tours de scrutin avec une ou des éliminations à chaque tour (et des retraits potentiels de candidats), chaque bulletin de vote pourra, dès le départ, intégrer un choix ordonné des candidats. Les tours de scrutin reflètent alors simplement l'information préétablie dans les bulletins de vote, révélée à chaque élimination : qui a été éliminé, qui est en tête?

Des modèles mathématiques sont utilisés pour étudier les modèles électoraux et le modèle spatial est tout particulièrement prisé des chercheurs par sa facilité de mise en œuvre. Nous étudions ici l'application de ce modèle à de telles élections pour étudier une question bien particulière : combien de candidats différents peuvent être en tête à travers le processus, contribuant ainsi à augmenter le suspense électoral. 

Notre étude établit ces limites et les valide formellement. 

Le Plan Nord aspire au développement économique, environnemental et humain du Nord québécois. Il se targue de comporter des volets consacrés aux impacts sociaux et environnementaux de son déploiement et d’ainsi constituer un projet de développement durable. Or, son caractère égalitaire n’a été abordé que de manière superficielle. Le projet de « tous les Québécois » est-il également celui de toutes les Québécoises ? La communication proposée entend présenter des résultats ayant démontré que le gouvernement du Québec,  à l'occasion du Plan Nord, n’a pas respecté les obligations relatives à l’égalité entre les sexes lui incombant en vertu des outils législatifs par lesquelles elles sont consacrées. Seront d’abord présentés les fondements juridiques du droit à l’égalité. Le cœur de l’exposé se concentrera ensuite sur l’inadéquation entre la stratégie de développement économique du nord de la province, les besoins des femmes et les obligations dévolues à l’état en matière d’égalité entre les sexes. L’égalité, présentée comme un projet de société tributaire des stratégies macro-économiques et des dépenses en services sociaux, permettra d’introduire un double manquement du gouvernement québécois : l’absence d’utilisation de l’analyse différenciée entre les sexes comme procédé susceptible de débusquer les biais sexistes du Plan Nord et la non-réalisation d’un budget genré permettant une réflexion sur la priorisation budgétaire quant aux dépenses des fonds publics.

Malgré l’importance que prennent les approches féministes, queer ou décoloniales dans les sciences sociales, le curriculum sociologique « classique » enseigné dans les universités demeure souvent imperméable à ces nouvelles approches critiques. Pourtant, comme d’importants travaux le démontrent, la sociologie classique s’est constituée sur l’exclusion de certains corps, notamment de femmes, de personnes non binaires et/ou racisées, tant au sein des corpus d’auteur·es que dans les corps enseignants. Plusieurs processus propres au champ scientifique expliquent la difficulté qu’ont ces sujets à être réellement reconnus et légitimement admis au sein de la discipline comme producteur ou productrices de connaissances. En mobilisant des approches féministes, queer et décoloniales, notre enquête mixte a porté sur les rapports entre les processus de constitution de la légitimité scientifique et de la norme somatique au sein des corps professoraux, étudiants et des corpus d’auteur·es à l’étude dans le baccalauréat de sociologie de l’UQAM. Afin de reconstituer les mécanismes de l'(in)validation scientifique qui structurent l’espace académique et les corps qui l’habitent, nous avons effectué une étude quantitative de tous les syllabus des cours dispensés par le programme de baccalauréat de sociologie dans les deux dernières années et mené vingt-trois entretiens auprès d’étudiant·es, d’auxiliaires d'enseignement, de chargé·es de cours et de professeur·es du Département de sociologie de l’UQAM.

Chasse gardée des pays occidentaux pendant longtemps, les recherches cliniques ont récemment pris une ampleur considérable dans les pays asiatiques. Épiphénomène au début des années 2000, la réalisation des essais cliniques constitue aujourd’hui une entreprise majeure au sein des États tels que l’Inde et la Chine. Guidés par des intérêts économiques, ces deux géants démographiques se sont dotés, ces dix dernières années, de structures juridiques importantes afin d’inciter des sociétés pharmaceutiques à effectuer une partie de leurs études multicentriques sur leurs territoires. Les bonnes pratiques cliniques : Directives consolidées de la Conférence internationale d’harmonisation (ICH E6) ainsi que les guides fournis par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) constituent des socles importants sur lesquels se sont appuyés ces pays pour élaborer et le cas échéant, adapter leurs législations en matière de protection des sujets de recherche. Dans le cadre de cette présentation, nous comparerons certaines mesures mises de l’avant pour encadrer la réalisation des essais cliniques. Une telle réflexion s’impose à l’ère de la globalisation où l’échange des données scientifiques se veut des plus prometteurs, notamment en nanomédecine. A cet égard, quel accueil sera réservé par les autorités réglementaires canadiennes aux données issues d’essais cliniques menés en Inde ou en Chine ?

Cette étude est subventionnée par le Réseau Ne3LS.

À l’instar de la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, la Côte d'Ivoire a amorcé sa transition démocratique au début des années 1990. Vingt-six ans plus tard le bilan reste mitigé : le multipartisme a été instauré, mais les libertés fondamentales peinent à être garanties. Sur le plan de la liberté d’expression et d’association, ce pays a enregistré au cours de la décennie passée, quatre grandes manifestations de crise qui se sont soldées chacune par des centaines de morts. Dans ma thèse de doctorat, je tente d’expliquer les processus et logiques de cette violence paroxysmique. En interrogeant les rapports d’enquêtes et les acteurs de ces évènements tragiques, manifestants et policiers, l’étude a permis de comprendre la sémiologie de la violence de rue, le sens que les acteurs en situation accordent au flux des évènements (gestes et paroles adverses) et l’influence de ce cadrage sur la nature et l’intensité des violences. Les données analysées selon les principes de la théorisation ancrée ont permis de mettre au jour une explication originale : la théorie de l’indignité républicaine. Ma présentation vise à présenter cette théorie ainsi que les processus et logiques dont elle rend compte.

Le débat sur le discours haineux a vu apparaître ces dernières années une nouvelle catégorie d’arguments inspirés des neurosciences. Selon la psychologue Lisa Feldman Barrett (2017), prendre au sérieux les connaissances actuelles sur le cerveau implique de remettre en question la distinction traditionnelle entre la propagande haineuse et la violence physique. En créant un environnement hostile pour certains individus, le discours haineux produit des effets physiologiques à l’échelle cérébrale qui peuvent s’avérer physiquement dommageables. Il a été démontré par exemple qu’un environnement stressant pouvait rendre malade (Miller & Chen 2010), altérer certains circuits cérébraux (Teicher & al.) et même détruire des neurones (Thomas & al. 2007), autant de phénomènes qui peuvent affaiblir le système immunitaire et, à long terme, réduire l’espérance de vie. Le but de la présente conférence est d’examiner la validité des arguments qui s'appuient sur de telles données empiriques pour justifier une limitation accrue de la liberté d’expression. En me penchant sur la célèbre loi de Hume (1739, 1759), qui affirme l’impossibilité logique de déduire des prescriptions morales à partir de jugements de nature factuelle, je chercherai à identifier les conditions à partir desquelles les neurosciences peuvent jouer un rôle dans le débat contemporain sur le discours haineux tout en évaluant leur potentielle force persuasive du point de vue des opposants à un plus grand contrôle de ce discours.

La désinstitutionnalisation des personnes aux prises avec des troubles de santé mentale dans les années 1960 au Québec a eu comme conséquence de rendre ces personnes plus susceptibles de se retrouver à la rue, faute de services et leurs contacts avec les autorités policières ont augmenté. Face à la surreprésentation de ces personnes dans le système de justice et la reconnaissance que le système de justice traditionnel n’est pas adapté pour ces accusés, des Programmes d’accompagnement justice et santé mentale (PAJ-SM) commencent alors à émerger. Des questions résident autour de l’efficacité de ces programmes dont l’achèvement aurait pour effet de réduire le risque de récidive des accusés. Le principal objectif de cette étude est de comprendre le lien entre les principes de la justice thérapeutique (JT) et l’achèvement des PAJ-SM. Pour ce faire, des dimensions importantes de la JT souvent exclues d’autres études telles que les équipes multidisciplinaires, le fonctionnement du tribunal et les traitements ou services reçus par l’accusé ont été mesurées avec une régression logistique tout en tenant compte des caractéristiques des participants et des programmes qui peuvent influencer l’achèvement. Les résultats de la régression logistique indiquent que les participants qui utilisent des services médicaux ou psychosociaux, des services de la vie quotidienne et des services spécialisés, lorsque leur participation au PAJ-SM, ont de plus grandes probabilités de terminer le programme.

Une part des écrits sur l’islam évoque une confusion des pouvoirs temporels et spirituels comme obstacle à la modernité politique. Devant ce constat, Arkoun (2007) estime que cette confusion n’est pas d’ordre théologique, mais plutôt le résultat de l’évolution historique. D’autre part, Ramadan estime qu'il est tout à fait possible d'être musulman dans un contexte laïc. En Occident, certaines des demandes de reconnaissances de la part de musulmans sont perçues comme un trop grand empiètement du religieux dans l’espace public.

Dans Une étrange multiplicité (1999), Tully propose un nouvel accord constitutionnel, respectueux  des désirs de liberté critique et du besoin d’appartenance, à partir d’une analogie avec l’œuvre du sculpteur haïda, Bill Reid. Au milieu d’un canot à l’équipage hétéroclite se trouve le médiateur dont une des tâches est de faciliter les négociations sur la reconnaissance.

À partir de principes herméneutiques inspirés de la pensée de Gadamer, je propose la présentation et l’analyse du rôle de critique social du médiateur. Mon hypothèse suppose qu'Arkoun et Ramadan agissent comme des médiateurs et proposent chacun une pensée de la médiation. La pertinence de cette recherche repose notamment sur le fait qu’elle analyse la question de la reconnaissance des musulmans occidentaux à partir de la pensée islamique et situe les penseurs non pas comme des représentants des musulmans occidentaux, mais comme des médiateurs engagés dans le dialogue.



Les crises identitaires africaines trouvent leur source dans la formation des États. Elles sont la conséquence de la non-résolution des problèmes politiques ayant défini leur finalité au moment de leur émergence en tant qu’États indépendants. La mise en place des États africains modernes a favorisé les problèmes identitaires. Cette situation historique précise, spontanément, la finalité du pouvoir politique dans ces États. Pour ceux-ci, il s’agit d’exister comme des entités modernes ayant l’obligation de lutter, d’une part, contre les séquelles identitaires du passé colonial, d’autre part, de combattre les dominations qui tendent de multiples manières à limiter leur nouvelle identité parce qu’ils sont contraints d’assurer les exigences de la politique moderne.

Partant de là, le phénomène politique africain ne doit-il pas être saisi dans ses réalités identitaires à partir d’une théorétique qui permettrait de rendre compte de sa structure conceptuelle ? Autrement dit, comment à partir de l’exigence d’une identité nouvelle qui se conçoit dans la synthèse d’un développement réalisé, doit-on nier les valeurs traditionnelles africaines ? Quel est le sens véritable que prennent les identités dans la dynamique des États africains ?

À partir de la méthode historico-analytique, nous montrerons que les États africains ont besoin de créer une nouvelle identité parce qu’ils sont confrontés à des problèmes identitaires que les réseaux traditionnels d’identités tribales ne peuvent endiguer.

À défaut d’obliger les justiciables à recourir aux modes privés de règlement des différends (médiation, arbitrage, etc.) avant de s’adresser aux tribunaux, le premier article du nouveau Code de procédure civile oblige les parties à préalablement considérer ces procédures extrajudiciaires.

D’ailleurs, peut-on obliger les justiciables à recourir à des modes de règlement des différends qui sont par essence construits autour des principes du volontarisme et de l’auto-détermination, si oui, comment ? Si l’on prend l’exemple de la médiation, comment passer outre le paradoxe apparent de l’obligation légale de recourir à la médiation ou la conception qui perçoit la médiation imposée par un juge comme un oxymoron?

La théorie de l’engagement qui nous provient de la psychologie sociale offre de réconcilier ces principes qui à premières vues sembles irréconciliables : la soumission et la liberté. L’observation par Kurt Lewin du phénomène qu’il appela « effet de gel » a été le premier pas vers l’articulation de cette théorie. Certaines conditions particulières favorisent l’engagement dont le sentiment de liberté perçue qui devient ainsi un facteur de soumission.

Appliquée au premier article du Code de procédure civile via une grille analytique interdisciplinaire, cette théorie nous permet d’approfondir la réflexion juridique classique sur le sujet, nous permettant ainsi de développer des pistes de réflexion et d’action.

De Maître chez nous à Pour Le Québec, de Jean Lesage à Jean Charest, le Parti libéral du Québec (PLQ) a évolué au fil des décennies s’adaptant vis-à-vis ses adversaires pour mieux leur faire face dans l’arène partisane. La clientèle électorale libérale risque d’avoir elle aussi changé au fil du temps. Lemieux, en 1993, analysait le PLQ comme un des deux grands partis du 20e siècle tout en ayant donné naissance aux partis qui lui firent compétition. De quelle façon les appuis électoraux du Parti libéral du Québec ont-ils évolué entre 1960 et 2012 tout en continuant d’occuper une place prépondérante dans le système partisan québécois ? Cette question sera répondue à l’aide d’analyses statistiques de régressions logistiques des données sociodémographiques et de l’appui à la souveraineté du Québec provenant de bases de données académiques (3 sondages réalisés par Maurice Pinard, 8 par l’équipe des Études électorales canadiennes et 3 réalisés par Éric Bélanger et Richard Nadeau). Est-il vrai que plus un citoyen est âgé, plus il est enclin à voter pour le PLQ ? Est-il vrai qu’il n’existe pas de fossé sur le genre au Québec fondé sur le vote ? Cette recherche est tout à la fois innovatrice et pertinente puisque le PLQ est le parti majeur du système partisan et qu’aucune recherche ne s’est attaquée à ses appuis électoraux de manière longitudinale, ce qui nous permettra possiblement d’identifier des effets de génération et des effets de cycle de vie.

Dans une décision très divisée de 5 juges contre 4, la Cour suprême du Canada a conclu en 2021 que l'humoriste Mike Ward n’avait pas porté atteinte aux droits du chanteur Jérémy Gabriel en faisant des blagues répétées au sujet de son handicap. Les raisonnements qui ont eu le plus de poids en faveur de M. Ward se fondent sur la notion de « personne raisonnable » : une telle personne, concluent les juges majoritaires, n'aurait pas considéré que les propos de l'humoriste incitaient à détester l'humanité de M. Gabriel pas plus qu'elle aurait estimé que de tels propos étaient susceptibles de conduire l'auditoire à le discriminer. Dans cette conférence, nous proposons d'analyser ces raisonnements en prenant soin de montrer comment la prise en compte du facteur de l'âge - aussi bien de la cible des propos que du jeune auditoire qui était susceptible de les entendre - affaiblit considérablement l'argumentaire de la Cour suprême. Dans d'autres domaines du droit, la Cour suprême a maintes fois rappelé que l'application purement abstraite de la notion de personne raisonnable (ou ordinaire) pouvait conduire à des injustices. En matière de violence conjugale (R. c. Lavallee 1990) ou de provocation (R. c. Thibert 1996), par exemple, il est nécessaire de prêter à cette personne des caractéristiques propres à lui donner une forme plus incarnée. Nous tenterons donc de comprendre pourquoi la Cour suprême a omis de procéder de la même façon dans un litige impliquant la liberté d'expression. 

Au Québec comme ailleurs dans le monde, les homosexuels sont toujours sous-représentés en politique: la proportion d'élus ouvertement homosexuels demeure très faible. Bien que cette situation puisse être due à plusieurs facteurs, il importe de savoir si les préjugés ont un impact sur les évaluations que les électeurs font des politiciens homosexuels et plus particulièrement des candidats gais.

À l'aide d'une analyse statistique réalisée à la suite d'une étude expérimentale en laboratoire informatique menée auprès de 159 participants, la présente recherche met trois hypothèses à l'épreuve, à savoir que les politiciens gais sont perçus comme possédant des traits de personnalité associés au genre féminin, qu'il en va de même pour leurs compétences politiques et que, dans un monde aussi traditionnellement hétérosexuel et masculin que la politique, ils sont moins susceptibles d'être élus que leurs collègues hétérosexuels sous des conditions identiques.

Les résultats obtenus démontrent que les électeurs ont tendance à percevoir plus de féminité chez les politiciens gais. Cette perception peut toutefois être positive auprès de la frange de l'électorat la plus ouverte à la diversité sexuelle, qui n'est pas forcément attirée par le politicien au profil traditionnel. Les électeurs plus homophobes, par contre, ont largement tendance à mal évaluer la candidature des politiciens gais. L'orientation sexuelle des politiciens a donc des effets variables selon la frange de l'électorat observée.

Le Myanmar traverse un processus de libéralisation politique entamé par le haut. Après des décennies d’autoritarisme, deux élections générales sont tenues en 2010 et en 2015. Aujourd’hui, le gouvernement est formé par le parti de la Ligue Nationale pour la Démocratie, longtemps ostracisé par le régime. Comment expliquer ce virage? Pourquoi l’armée birmane a-t-elle assoupli le régime?

Une réponse à ces questions sera offerte en se basant sur deux littératures, celle sur la culture stratégique et celle sur les transitions politiques. Il sera suggéré que la libéralisation politique du Myanmar s’explique par les luttes d’influences au sein du régime entre deux sous-cultures stratégiques, les hardliners et les softliners. Trois orientations stratégiques majeures sont partagées au sein de l’armée: la non-désintégration de l’union, la stabilité intérieure, et la neutralité internationale. L’application des normes favorisées par les hardliners ayant échoué dans l’atteinte de ces trois orientations, les softliners ont pu imposer leurs propres préférences normatives dans la conduite de l’État.

Les résultats, obtenus après quatre mois d’enquête de terrain au Myanmar, tendent à confirmer cette hypothèse. Les implications de ces conclusions, bien que d’apparences contre-intuitives, sont importantes: l’ouverture politique du pays pourrait être comprise comme une stratégie de l'armée pour garantir le maintien d’un certain contrôle militaire sur la politique birmane.