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La dignitas correspondait, en droit romain, au mérite, à un rang ou à une charge honorifique. À notre époque, elle est plus généralement considérée comme un attribut que la personne possède du seul fait de son appartenance à l’humanité. Faisant désormais partie de l’arsenal langagier de plusieurs institutions internationales, de constituants, de législateurs, de juges et d’auteurs de doctrine, elle est employée dans nombre de juridictions et dans les contextes les plus divers. La dignité est à ce point utilisée par le discours du droit que, selon certains, elle est sur le point « de devenir la notion la plus agaçante de la littérature judiciaire ». Puissant outil de justification, il est encore de bon ton de s’y référer lorsque des questions morales se posent ou que des choix éthiques sont en cause. La dignité est qualifiée de principe fondateur des droits de la personne et sert à interpréter ces derniers. Quels usages les tribunaux font-ils de cet axiome lorsqu’ils s’intéressent au pauvre ou à l’exclu ? Dans le discours des acteurs sociaux et, maintenant, celui du droit, la dignité est liée à une vision holistique de la personne exigeant que cette dernière bénéficie d’une certaine qualité de vie. Pourtant, au Québec, les conditions de vie précaires ne sont pas considérées comme représentant en elles-mêmes la violation d’un droit, et ce, tant en vertu de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale que des Chartes québécoise et canadienne.

Au Québec, bon nombre de violations du droit au logement (rénovictions, hausses de loyer abusives) ne font pas l’objet de réclamations, car les victimes de ces injustices ignorent à la fois leurs propres droits en matière de logement et la manière de les faire respecter. Cette ignorance ne provient pas nécessairement d’un manque d’information. Les informations quant aux droits au logement peuvent être difficiles d’accès pour certaines personnes, notamment les personnes marginalisées ou les personnes moins scolarisées (Médina, 2013). Dans cette communication se situant à la croisée de l’épistémologie sociale et de la philosophie politique, nous proposons d’analyser les occurrences d’ignorances étant produites et maintenues par l’État dans l’accès au droit au logement (Gaudreau, 2020; Hayward, 2017). Nous défendons la thèse selon laquelle l’État a une responsabilité politique et sociale de rendre accessible et de fournir les ressources épistémiques nécessaires à la défense du droit au logement de manière équitable puisque ce dernier s’impose comme médiateur entre locataire et propriétaire (Voldman, 2016). Une distribution inéquitable des outils épistémiques contribue à placer certains groupes en position de vulnérabilité et chaque groupe social doit avoir accès aux connaissances de manière légitime et doit aussi pouvoir s’en servir sans barrière épistémique ou sociale si l’État prend au sérieux le droit au logement (McKeown, 2021).

Le Projet de loi no. 52 introduit en droit québécois deux activités (le suicide assisté et l’euthanasie), actuellement prohibées par le Code criminel. Indépendamment des questions strictement juridiques entourant le partage constitutionnel des compétences que ce projet de loi soulève, il y a les questions plus fondamentales de l’effet qu’auront ces nouvelles activités sur le droit actuel d’un patient ou de son représentant de maintenir ou de faire cesser des soins le maintenant en vie, ainsi que la difficulté pour le personnel soignant d’appliquer ces nouvelles règles de droit. Le système actuel de consentement substitué aux soins priorise la prise de décisions médicales par une personne physique, apte à recevoir une communication de faits complexes, et d’appréhender une situation qui, particulièrement dans le cadre de la fin de vie d’un patient, pourrait changer rapidement. Le Projet de loi no. 52 instaure une nouvelle hiérarchie en matière de consentement substitué aux soins qui déplacera l’idée d’une personne physique au second rang en faveur d’un document, soit des directives médicales anticipées.  À lui seul, ce changement dans le droit civil québécois pourrait être la source de conflits entre le personnel soignant, obligé de suivre les directives médicales avancées d’un patient inconscient, et la famille du patient lorsqu’elle est en désaccord avec les volontés du patient.

Si le rapport entre immigration issue du Sud global et nationalisme en Occident fait l’objet d’une abondante littérature, encore relativement peu d’études comparent des nationalismes sous-étatiques à cet égard. Or, l’immigration est devenue un enjeu de luttes de pouvoirs avec l’État central et il importe de saisir comment l’immigration et la présence de minorités racialisées sont discursivement intégrées dans ces nationalismes. Nous proposons donc d’établir les bases de comparaison entre les situations québécoise, basque, catalan, écossais et flamand. Refusant le biais de l’opposition entre nationalismes central/civique et sous-étatique/ethnique, un éclairage analytique serait fait sur les discours inclusifs comme les articulations spécifiques entre nationalisme et racisme. Présentant des résultats préliminaires issues d’une analyse de contenu mobilisant une approche comparative et critique des discours nationalistes, nous montrerons comment les questions relatives à l’altérité immigrante racialisée complexifient le marquage des frontières nationales au sein des États multinationaux. Un ensemble de facteurs explicatifs seront dégagés et nous mettrons l’accent de façon originale sur la compétition avec les discours nationalistes centraux, sur la dissonance entre discours officiels et sociaux, de même que sur la complexité et l’historicité des rapports de pouvoirs et des mémoires nationalistes structurant les représentations de l’altérité immigrante/racialisée.

Cette communication présente les résultats préliminaires d’une recherche portant sur le cadrage des politiques linguistiques par les institutions d’enseignement supérieur au Québec. De nombreux observateurs s’interrogent actuellement sur la tendance à l’anglicisation des institutions postsecondaires francophones, tant en enseignement, qu’en recherche. Plusieurs collèges et universités offrent des cours, voire des programmes complets en anglais, un choix qui rompt avec le régime linguistique « territorial » traditionnellement privilégié par l’État québécois. La recherche vise donc à comprendre quels sont les « points tournants » et les continuités dans la manière dont les institutions d’enseignement supérieur au Québec cadrent l’enjeu de la langue d’enseignement depuis 1977. L’analyse combine l’approche théorique du cadrage (Entman, 2009) à l’approche néo-institutionnelle d’analyse des politiques linguistiques (Cardinal et Sonntag, 2015). La démarche méthodologique qualitative se déroule en 3 phases: une enquête historique, une analyse qualitative du contenu des politiques linguistiques et documents promotionnels et une vingtaine d’entretiens avec des gestionnaires des institutions d’enseignement supérieur. En étudiant le terrain peu exploré du discours linguistique des acteurs institutionnels québécois, la recherche comblera une lacune importante. Elle enrichira également les connaissances internationales sur le phénomène d’anglicisation de l’enseignement supérieur.

En l’absence d’une relation électorale directe, quel mécanisme garantit que les représentants politiques parlent effectivement pour les citoyens qu’ils prétendent représenter? Cette question est d’importance pour la représentation politique des idées et des intérêts des groupes sociaux qui sont minoritaires à l’intérieur des circonscriptions électorales (Przeworski et al 1999; Mansbridge, 2009). Mon étude se concentre sur le cas des citoyens LGBTQ+ au Canada. J’effectue une analyse critique du contenu de 431 articles de la presse canadienne publiés entre 2008 et 2022 portant sur les mobilisations politiques LGBTQ+. En adoptant l’approche délibérative de l’imputabilité proposée par Gutmann et Thompson (1996), mon analyse explore l’évaluation de la performance des élus à travers les discours des activistes LGBTQ+. Les résultats pointent vers trois moments clés illustrant l’imputabilité délibérative : la réponse des activistes LGBTQ+ aux politiques publiques les concernant; les débats entourant l’admission ou l’exclusion des élus au sein des espaces LGBTQ+, précisément les défilés de la Fierté; le soutien exprimé ou les appels à l’exclusion de certains candidats durant les campagnes électorales. Cette étude se veut une contribution à l’avancement des connaissances sur la représentation des minorités sociales et sur la responsabilité politique des élus. 

De façon continue depuis 30 ans, le système québécois du logement social est touché par les transformations des systèmes de prise en charge des personnes vulnérables. Les origines de ces changements correspondent à la volonté de trouver des alternatives aux institutions du réseau de la santé, jugées lourdes et coûteuses. Ainsi, les interfaces entre le secteur de la santé et celui du logement social s’en trouvent accrues, et entraînent des enjeux de délimitation des cibles et des missions. On assiste donc à un déplacement des frontières qui séparaient jadis ces deux univers. Ni logement, ni hébergement, ce sont, en quelques sortes, des hybrides.

Notre communication vise à faire état des premiers résultats d’une recherche en cours visant à documenter et à analyser les processus d’hybridation entre l’univers du logement social et celui de l’hébergement dans le cadre de sept projets habitation avec services destinés aux personnes vivant avec une déficience intellectuelle. Après avoir présenté la méthodologie et notre utilisation de la notion d’hybridation, nous présenterons les principaux indices d’hybridation décelés, ainsi que les processus et les logiques d’action à l’œuvre.

Depuis plusieurs décennies, l’industrie minière est confrontée à de nombreuses controverses tant empiriques que théoriques quant à sa capacité à conjuguer développement minier et développement durable. Le Québec et l’Afrique de l’Ouest renferment des ressources minières considérables dont l’exploitation peut favoriser un développement socio-économique positif. Pour en bénéficier, les acteurs que sont l’État, l’entreprise minière et les communautés doivent s’entendre afin de collaborer en harmonie.

La relation entre ces parties prenantes interdépendantes est pourtant souvent qualifiée de tendue voire conflictuelle au vu des enjeux, intérêts et positions divergents.

Comment la relation partenariale se co-construit-elle autour du partage local des bénéfices miniers? Comment fonctionnent les dispositifs et instruments de co-construction de cette relation partenariale? Comment ces outils de gouvernance partenariale impactent-ils la responsabilité sociale des entreprises et le développement durable?

C’est à cette dynamique de gouvernance partenariale que l’auteure s’intéresse à travers une problématique d’actualité vue selon l’école de pensée de la sociologie de l’action et le paradigme socio-centré de la théorie en management des parties prenantes prônée par Pasquero.

Sous une approche Nord-Sud, l’étude de cas analyse deux réalités partenariales contrastées autour de la filière bauxite-alumine de Boké en Guinée au Saguenay reliées par une même compagnie minière, Riotinto Alcan.

 

Cette communication a pour objectif d’exposer les premiers résultats de notre recherche de 2ème cycle universitaire, laquelle porte sur la représentation des acteurs de changement politique dans les programmes et les manuels scolaires de l’enseignement de l’histoire nationale au secondaire de 1967 à aujourd’hui.

Ce premier volet de ma recherche interroge la légitimité morale dans la réécriture de l’histoire à des fins idéologiques. Pour ce faire, j’emploierai un modèle analytique du binôme bien/mal en politique, soit un développer par le politologue Jean-Herman Guay. Par ce processus, je démontrerai quels sont les points de désaccords qui ont provoqué la polémique de 2006 portant sur le cours d’Histoire et d’éducation à la citoyenneté. Ainsi, je tâcherai d’identifier les partisans et les opposants du nouveau programme, puis je démontrerai en quoi ce problème fut provoqué par une mésentente sur le projet (les objectifs visés), le sujet (le véhicule de changement emprunté) et le trajet (les moyens instrumentalisés pour mener à terme leur projet) de chacun des groupes. En dernière partie, je présenterai les positions intermédiaires et les solutions qui s’offrent à la société québécoise pour sortir de ce cul-de-sac éthico-politique. Enfin, je vous présenterai mon corpus qui est composé de  revues académiques québécoises.

L’inclusion scolaire des enfants porteurs de handicaps modifie les pratiques des travailleurs sociaux accompagnant les enfants à l’école et celles des enseignants accueillant ces élèves à besoins éducatifs particuliers. Nous avons analysé les transformations induites par la présence à l’école des enfants avec des troubles du comportement et de la conduite (TCC) et des éducateurs spécialisés venus les y accompagner sur les rôles sociaux et l’identité de l’ensemble des parties prenantes : enfants, enseignants et éducateurs spécialisés.

Dans le cadre de notre doctorat en sociologie, nous avons réalisé des entretiens semi-directifs et envoyé un questionnaire auprès des différents acteurs professionnels de l’inclusion scolaire : éducateurs spécialisés de dispositifs intégrés thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques et enseignants.

Les résultats finaux de notre travail mettent en évidence que la présence des jeunes en situation de handicap au sein de l’école ne signifie rien de leur réelle inclusion, c’est-à-dire de l’école à devenir un espace capacitant pour les jeunes avec des TCC. L’identité d’élève leur est attribuée à la condition de ne plus afficher les « stigmates » (Goffman) des troubles du comportement et de la conduite et ainsi devenir « scolairement correct » (Zaffran). La dynamique inclusive invite les éducateurs spécialisés à devenir des intervenants (entre le milieu spécialisé et le milieu ordinaire) et les enseignants à endosser le côté éducatif de leur mission.

De récents procès fortement médiatisés au Québec – les affaires Proulx, Hotte, Turcotte, – font apparaître les limites de l’institution du jury. Le droit criminel moderne conserve un curieux fonctionnement : il exige de profanes de se prononcer sur la valeur probante d’expertises psychiatriques. En clair, le sort d’un accusé est remis entre les mains de personnes qui entendent pour la première fois des distinctions au sein d’un diagnostic psychiatrique et se voient obligées de les appliquer à la définition stricte de l’article 16 du C. cr. Or, l’art. 16 C. cr. sur la non-responsabilité criminelle implique une variété de nuances à caractère philosophique sur l’état d’esprit requis pour pouvoir s’appliquer. Le procès criminel constitue l’exemple le plus frappant où un contexte surdétermine les contenus théoriques (défenses et doctrine) et qu’est surestimée la capacité des profanes à se livrer à des opérations de l’esprit complexes. De fait, on attend des jurés qu’ils fassent preuve de capacités intellectuelles invraisemblables. À Montréal où les divers niveaux d’analphabétisation sont importants et qu’aucun examen de compréhension de texte ne fait partie des options disponibles pour la sélection des jurés, comment même prétendre à l’apparence justice? Cette communication interroge la rencontre « confondante » de l’expertise psychiatrique avec le théâtre du procès. S’agit-il d’un retour à l’ordalie ou de l’illusion idéologique qu’entretient un appareil d’État?

Du 15 octobre 2009 au 25 février 2010 la France a organisé un débat public national sur les nanotechnologies. L’instance du Débat public en France a été instaurée afin d’assurer un dialogue social sur des enjeux spécifiques soulevés par le développement des nanotechnologies.  Que nous apprend cette expérience unique sur le dialogue social sur les enjeux économiques, environnementaux, éthiques, légaux et sociaux liés au développement des nanotechnologies? Une analyse documentaire des textes déposés pour cadrer le débat par les acteurs sociaux impliqués, à partir de la grille d’analyse d’impacts et d’acceptabilité développée par le groupe de recherche interne3ls de l’Université de Sherbrooke, permettra de comprendre trois enjeux fondamentaux du dialogue social en matière de développement technologique. 1. Comment les acteurs posent-ils les problèmes rattachés au développement technologique dans notre société. 2. Quelles évaluations font-ils des nanotechnologies et de leur impact et en quoi ces évaluations fondent-elles leur jugement d’acceptabilité ou de non-acceptabilité. 3. Les réponses apportées par les acteurs proposent-elles des solutions innovantes dans la régulation légale des nanotechnologies?

Le sujet de la recherche doctorale porte sur les nouvelles organisations et sur les logiques d’actions entre les universités, les entreprises et l’État dans le secteur des sciences de la vie dans la zone métropolitaine du Grand Montréal. La question principale de l’étude s’articule donc autour du modèle d’application de la « triple hélice » (Leydesdorff, L.et Etzkowitz, H., 2009). Elle fait l’analyse les actions concertées (ou non) entre les acteurs dans ce secteur sur le territoire donné. Elle souhaite comprendre leur vécu pratique au sein des relations. Une attention est accordée à l’essor des réseaux internationaux comme facteur d’influence sur le développement de l’innovation (Leydesdorff, L. et Sun, Y., 2009, Carlsson, B., 2006). Des enquêtes qualitatives ont été conduites pour atteindre les objectifs. À partir du cas vécu de 4 universités montréalaises, des entretiens semi-dirigés ont été effectués auprès d'acteurs universitaires, industriels et gouvernementaux. Les déterminants de Bartholonew (1997) ont structuré les entretiens faisant ressortir des indicateurs utiles à l'analyse des modèles relationnels. La préanalyse des données montre que les efforts de concertation sont présents, qu’il existe des organisations hybrides encourageant l’émergence de nouveaux modes de production, mais que des contraintes nuancent le jeu des relations. L'interdisciplinarité de cette recherche crée des liens novateurs entre l'étude d'un territoire et de la gestion de l'éducation.

L'unicité du droit environnemental québécois a fait un bond en avant en 2017.  En effet, par l'intermédiaire d'un amendement à la Loi sur la qualité de l'environnement (LQE),  l'Assemblée nationale donne un coup d'envoi à l'effectivité des principes de développement durable dont plusieurs se retrouvent a l'article 6 de la Loi sur le développement durable (LDD).  L'actualisation de ces principes permet de mettre à jour les processus décisionnels et les instruments juridiques utilisés par l'État québécois pour rendre ses décisions notamment celles reliées au régime d'autorisation environnementale.  L'initiative législative prise par le Québec se répercute également sur le partage des champs de compétence prévus dans la Loi constitutionnelle de 1867 et sur l'articulation des formes de gouvernance qui en découlent.  Nous verrons d'abord le contenu de cet amendement afin de bien de le situer dans l'ordonnancement juridique québécois.  Ensuite, nous verrons les principales caractéristiques des lois en cause afin de saisir la portée du lien qui les unit.  Enfin, nous examinerons l'application du lien LDD-LQE dans trois situations particularisées : le lac Saint-Jean, les oléoducs et la Banque de l'infrastructure du Canada.  Ces trois "terrains d'application" nous feront prendre conscience à la fois de l'importance de l'avancée législative réalisée, mais aussi de la complexité reliée à l'effectivité du droit en cause.

L’évaluation de la crédibilité est « une question omniprésente dans la plupart des procès » (R. c. Handy, 2002). Toutefois, lorsque les témoignages sont contradictoires, cette évaluation repose notamment sur des interprétations, nuances et impressions résultant de l’observation du « comportement du témoin et [de] sa façon de répondre aux questions » (R. c. D.A.I., 2012). Cette présentation orale est le résultat d’une analyse qualitative (méthodologie de la théorisation enracinée) des jugements de tribunaux administratifs québécois (Commission des lésions professionnelles, Tribunal administratif du Québec, etc.), de 2002 à 2015, où les décideurs ont décrit leur appréciation du comportement non-verbal de témoins afin d’évaluer leur crédibilité. L’objectif étant de comprendre le poids accordé à la forme (plutôt qu’au fond) des témoignages, l’analyse de ces jugements permet de conclure que l’appréciation du comportement non-verbal de témoins peut affecter l’issue d’un procès, même si cette interprétation n’a peu ou pas de lien apparent avec les connaissances validées et reconnues scientifiquement. Dans un premier temps, les conséquences potentiellement désastreuses de cette appréciation seront discutées, dont celles sur les individus qui se représentent seuls devant les tribunaux. Dans un deuxième temps, vu la popularité de certaines fausses croyances sur le non-verbal, des pistes de solution conformes à la littérature scientifique seront proposées (Vrij, 2008).

Pour les peuples autochtones, les relations au territoire sont au fondement de leur cosmologie, de leur ontologie et de leur identité. Face aux enjeux contemporains de la territorialité (reconnaissance des droits fonciers, autonomie économique et politique et transmission intergénérationnelle des savoirs), il apparaît essentiel d’explorer comment les liens au territoire sont transmis et accueillis par les jeunes autochtones dans le contexte néocolonial et néolibéral actuel. Cette communication porte sur la présentation d'un projet doctoral dont le but est de comprendre les différentes stratégies et pratiques mises en place par les familles innus pour maintenir leurs liens au Nitassinan et leurs pratiques de chasse et ce, en dépit des contraintes grandissantes imposées par l’État et les industries extractives. Une étude ethnographique sera réalisée dans la communauté innue de Matimekush-Lac John. La collecte des données comprends de l’observation participante, des entrevues individuelles semi-dirigées avec une vingtaine d’adultes âgés de 18 à 35 ans et de la vidéo participative avec un groupe de cinq à dix jeunes de 12 à 17 ans. Ce projet contribuera à la littérature sur la territorialité chez les jeunes innus, peu d’auteurs ayant traité de ce sujet auparavant. En considérant l’univers des jeunes Innus et leurs rapports au Nitassinan, nous nous positionnons ainsi à contre-courant du discours dominant identifiant les jeunes autochtones comme des individus « à problèmes ».

 

L'acceptabilité sociale est omniprésente dans nos sociétés contemporaines, telles que le reflètent les controverses publiques entourant certains projets d'exploitation des ressources naturelles ou de construction d'infrastructures. Plusieurs études ont conceptualisé divers cadres, indices, échelles, modèles analytiques et outils de mesure visant à évaluer le niveau d'acceptabilité sociale de divers projets. Bien qu'utiles, notre principal argument est que ces cadres et échelles ne tiennent pas compte des réalités sociales, culturelles, politiques et institutionnelles des contextes spécifiques dans lesquels les questions d'acceptabilité sociale prennent forme. Notre réflexion appelle donc à plus de prudence dans l'utilisation des outils et cadres existants, car ils sont probablement inadéquats dans de nombreux contextes. Dans cette optique, nous analysons spécifiquement les fondements sociohistoriques de l'acceptabilité sociale sur un demi-siècle au Québec, ce qui nous permet de développer un cadre d'analyse contextualisé qui tient compte du contexte québécois. Ce cadre d'analyse vise à aider les décideurs aux niveaux local et régional à appréhender les controverses au sein de leurs communautés dès le début du développement d'un projet. Les citoyens, les médias, les chercheurs et les décideurs à un niveau plus élevé peuvent également faire un usage profitable de ce cadre qui saisit les dynamiques sociales en cours et aide à évaluer les impacts d'un projet.

Avec la complexité croissante des sociétés et les demandes multiples et variées des citoyens, la mise en œuvre des politiques publiques pose de nombreux défis pour l’administration publique qui doit surmonter la tension entre l’efficience du service public et la prise en compte de l’intérêt général (Gow et al., 1987; Van Wart, 2001). Or, la multiplication des acteurs impliqués et impactés dans la mise en œuvre complexifie le comportement de l’administration publique en accroissant la potentialité de l’émergence des interactions contre productives (Lipsky, 1980; Sabatier, 1986). Nous présentons les résultats d’une étude qui met en évidence la dynamique d’acteurs aux intérêts divergents parfois contradictoires dans la mise en œuvre d’une politique publique dans un pays en développement. Cette étude emploie une stratégie de recherche basée sur l’étude de cas et utilise en complémentarité deux théories: l’action stratégique et réseaux d’acteurs. Les données permettent de dresser le portrait d’un ensemble de jeux issus d’un processus d’intégration des comportements stratégiques des acteurs. Ces jeux régulent, maintiennent des réseaux d’acteurs dans une dynamique de captage de ressources, de pouvoir et de dépendance pouvant redéfinir significativement la politique en modifiant ses finalités. La prise en compte des défis et contraintes de cette dynamique est essentielle pour soutenir l’efficacité de la gestion et l’émergence d’une véritable action collective dans la mise en œuvre. 

Entre 2009 et 2014, le Québec a connu un débat éminemment délicat en lien avec les soins de fin de vie. Ce débat, qui a traversé trois différents gouvernements avant l’adoption en juin 2014 de la Loi concernant les soins de fin de vie, s’est fait de manière non partisane avec un souci d’inclusion notable des représentants de la société civile. Notre recherche constitue une étude de cas de huit organisations portant sur leur vision du processus parlementaire choisi et leurs interactions avec les élus. Le but est de déterminer les facteurs les ayant incitées à participer au processus législatif formel, mais également les stratégies qu’elles ont utilisées et leur apport à la réflexion des parlementaires québécois. Ces organisations ont été sélectionnées, sans égard à leur taille, de par leur implication dans le débat et la représentation variée des points de vue véhiculés. Notre étude se fonde sur des entrevues semi-dirigées avec des représentants de ces organismes et des autres acteurs impliqués dans le débat ainsi que sur l’étude des mémoires et échanges survenus en commissions. Les premières indications démontrent que les groupes en faveur du projet de loi ont eu une plus grande influence sur le débat en mettant l’accent sur les soins palliatifs et l’instauration de balises à l’aide médicale à mourir. Ce projet s’inscrit dans la mouvance plus large de la recherche sur la représentativité des intérêts dans le système politique québécois et l’influence des groupes de pression.

Les expériences effectuées montrent que l’adaptation aux changements climatiques (ACC) dépasse les solutions techniques et exigent la participation des acteurs locaux (Chouinard, 2008).

Notre communication s’intéresse à une commune lacustre de 120000 habitants au sud du Bénin où une ACC s’instaure grâce à un multipartenariat basé sur une gouvernance participative. L’eau s’y retrouvant au cœur de la vie de la population. Outre sa consommation, on l’utilise pour les services domestiques. La pêche y produit par an plus de 30000t de poissons, et l’agriculture, plus de 15000t. Tout ce qui l’affecte en qualité ou quantité demeure une menace pour la santé et l’économie locale. C’est le cas des risques dus aux effets des CC : baisse de la productivité, augmentation des maladies d'origine hydrique (de 67 cas de choléra en 2012 à 110 en 2015), baisse pluviométrique (de 1200mm à 983,44mm/an), baisse de 12,9% de la production globale vivrière, pression démographique sur les ressources halieutiques (112-114 pêcheurs/km2 vs. 12-14 requis). Répondant à un appel à projet du gouvernement du Québec, Sô-Ava a mis en place, un partenariat multisectoriel de transfert technologique basé sur une gouvernance participative pour améliorer la résilience des populations. Inédit au bénin, ce projet propose une approche pluri acteurs et vise à apporter une réponse locale à un problème mondiale avec de premiers résultats de notre recherche sur l’approche disponibles en mai et présentés au congrès

La recherche effectuée en Tunisie, un peu plus d’un an après la chute du régime de Zine El-Abidine Ben Ali, avait pour objectif principal de donner parole aux Tunisiens afin qu’ils s’expriment sur leur façon de concevoir les récents évènements survenus dans leur pays ainsi que sur la situation actuelle de celui-ci, telle qu'ils sont amenés à la percevoir, à y réfléchir. L’intérêt anthropologique d’une telle recherche repose sur une considération essentielle au chercheur qui est celle de l'importance de donner une voix à des citoyens du monde qui, vingt-trois ans et plus durant, se sont retrouvés enfouis derrière les discours d'un État personnifié par un homme et son clan. Il s'agit donc de revenir aux fondamentaux de cette insurrection, et ce, en passant par la conscience des « opprimés » et des « humiliés » du parti RCD, désormais déchu : de fait, nous avons ici affaire à « [t]he oppressed and humiliated revolted against the tyrants in order to reintegrate the emancipated self, which is the manifestation of a true anthropological revolution » (Kilani 2011 : 5-6). De plus, cette présente recherche sur la notion de dignité – la karama, en arabe tunisien - au sein de la révolution tunisienne vise à contribuer à l'instauration d'un véritable dialogue entre l'ensemble de la société civile tunisienne et les figures d'autorités (politiques, académiques, etc.) nécessairement amenées à discuter des lendemains du pays. 

La communication interroge le processus de recours à l'expertise scientifique et technique en France et au Québec à propos de la controverse sur le gaz de schiste. En reprenant la question de la limitation de la participation publique au forum scientifique posée par Collins et Evans (2002; 2007), je démontre que la tentative de poser une frontière entre forum scientifique et politique est vaine et génère un risque de décision technocratique favorable aux intérêts des porteurs de projet. Plutôt que de soutenir le danger d'un populisme technologique, je montre que la focale doit être faite sur le processus de cadrage sociopolitique d'une controverse. L'exemple du gaz de schiste est mobilisé afin d'illustrer un cadrage sur la gouvernance au Québec et un recours à une expertise interdisciplinaire favorisé par la participation publique issue du BAPE. A l'inverse, le cas français montre un cadrage sur la technologie de fracturation hydraulique qui conduit à un confinement de l'expertise aux seules géosciences dans les rapports officiels. Les tentatives d'imposition d'experts ex ante valident la tendance des gouvernements à soutenir les porteurs de projets tandis que la détermination d'une expertise pertinente n'apparait qu'ex post. La communication se base sur une série d'entretiens, un corpus de presse écrite et l'analyse de divers rapports officiels.

En mars 2018, la Cour d’appel fédérale rejeta la requête introduite par Edgard Schmidt, avocat au Ministère de la Justice, qui contestait la pratique établie par son propre Ministère pour évaluer la conformité des projets de lois à la Charte canadienne. Il jugeait ce processus insuffisant, inefficace et contraire à la Loi sur le Département de la Justice. La Cour d’appel, comme l’avait fait la Cour fédérale, conclut qu’aucune obligation ne repose sur le gouvernement d’assurer la conformité des lois qu’il rédige aux droits garantis par la Charte, ni d’informer le Parlement de la possibilité qu’elles soient subséquemment invalidées par les tribunaux.

Ce recours souleva d’importantes questions d'ordre politiques et légales, principalement quant aux rôles et aux obligations constitutionnelles des trois branches de l’État découlant de la Charte. La tâche d’évaluer la conformité des lois à la Charte et d’éliminer les violations aux droits revient-elle exclusivement aux tribunaux, ou le gouvernement et le Parlement doivent-ils adopter une attitude proactive à cet égard tout au long du processus d’élaboration des lois? Dans cette communication, il sera suggéré que la réalisation effective des droits garantis par la Charte nécessite un rôle actif et coopératif de la part de toutes les branches de l’État; limiter ce rôle au pouvoir judiciaire soulève en effet de nombreuses préoccupations quant à la marginalisation politique des groupes vulnérables et en matière d’accès à la justice.

En janvier 2021, le Québec a mis en place une mesure exceptionnelle et particulièrement martiale afin de lutter contre la COVID-19 : le couvre-feu. Alors qu’au début de la pandémie le Directeur de la santé publique déclarait que « les couvre-feux — moi, à ma connaissance — [sont plus] utilisés dans des situations de guerre ou de risque d'émeutes ou des choses de cette nature (…) » (16 mars 2020), la mesure fut finalement mise en place le 8 janvier 2021. Comment expliquer la mise en place d’une mesure aussi extrême que le couvre-feu au Québec ? En condition d’incertitude, les décideurs peuvent avoir tendance à émuler des expériences étrangères dont les résultats sont réputés efficaces (Weyland 2006). Ils ‘transfèrent’ alors des politiques publiques afin de remplir les objectifs qu’ils se sont fixés. Ces transferts sont parfois ‘politiques’ car l’incertitude n’est alors pas comblée par l’information scientifique mais par une décision politique forte visant à implanter une mesure étrangère. Au travers du codage des conférences de presse données quotidiennement faisant référence au couvre-feu et de l’analyse des documents connexes, nous proposons de retracer la mise en place de cette mesure unique au Canada. Nos premiers résultats montrent que c'est bien le Premier ministre qui domine dans la justification de cette mesure. Nous proposons de contribuer aux connaissances sur les conditions du transfert de politiques publiques et la prise de décision pendant la pandémie de COVID-19.

Une étude critique et extensive de la littérature disponible amène le conférencier à constater que le modèle américain de recours extensif à la négociation de plaidoyer est véritablement une forme extrême de négociation de plaidoyer. Dans le contexte américain, cette pratique donne lieu à l’exercice d’une pression massive sur l'accusé afin de le contraindre à plaider coupable et qui entraîne ce faisant la condamnation d'un nombre inconnu d'innocents. Le procès par jury est alors moins un droit et plus un risque. La justice devient aléatoire. La vérité est négociée, le choix de voie procédurale devient le principal facteur de détermination de la peine, les accusés placés dans la même situation subissent des traitements massivement différents, des facteurs non pénalement pertinents sont pris en considération dans la détermination de la peine, etc. Le modèle américain serait en outre moins efficace que spéculé, l'étude par le conférencier des alternatives disponibles indiquant que le gain d'efficience attribué à la négociation de plaidoyer et justifiant le recours à cette pratique est nettement surévalué. Ainsi, le conférencier traitera de la négation des principes fondamentaux de justice pénale; l'exercice d'une pression massive sur l'accusé; la contravention aux impératifs de justesse; et le peu significatif gain d'efficience, pour conclure au caractère extrême du modèle américain de négociation de plaidoyer, duquel le modèle canadien est proche…

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