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À l’instar de la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, la Côte d'Ivoire a amorcé sa transition démocratique au début des années 1990. Vingt-six ans plus tard le bilan reste mitigé : le multipartisme a été instauré, mais les libertés fondamentales peinent à être garanties. Sur le plan de la liberté d’expression et d’association, ce pays a enregistré au cours de la décennie passée, quatre grandes manifestations de crise qui se sont soldées chacune par des centaines de morts. Dans ma thèse de doctorat, je tente d’expliquer les processus et logiques de cette violence paroxysmique. En interrogeant les rapports d’enquêtes et les acteurs de ces évènements tragiques, manifestants et policiers, l’étude a permis de comprendre la sémiologie de la violence de rue, le sens que les acteurs en situation accordent au flux des évènements (gestes et paroles adverses) et l’influence de ce cadrage sur la nature et l’intensité des violences. Les données analysées selon les principes de la théorisation ancrée ont permis de mettre au jour une explication originale : la théorie de l’indignité républicaine. Ma présentation vise à présenter cette théorie ainsi que les processus et logiques dont elle rend compte.

Le débat sur le discours haineux a vu apparaître ces dernières années une nouvelle catégorie d’arguments inspirés des neurosciences. Selon la psychologue Lisa Feldman Barrett (2017), prendre au sérieux les connaissances actuelles sur le cerveau implique de remettre en question la distinction traditionnelle entre la propagande haineuse et la violence physique. En créant un environnement hostile pour certains individus, le discours haineux produit des effets physiologiques à l’échelle cérébrale qui peuvent s’avérer physiquement dommageables. Il a été démontré par exemple qu’un environnement stressant pouvait rendre malade (Miller & Chen 2010), altérer certains circuits cérébraux (Teicher & al.) et même détruire des neurones (Thomas & al. 2007), autant de phénomènes qui peuvent affaiblir le système immunitaire et, à long terme, réduire l’espérance de vie. Le but de la présente conférence est d’examiner la validité des arguments qui s'appuient sur de telles données empiriques pour justifier une limitation accrue de la liberté d’expression. En me penchant sur la célèbre loi de Hume (1739, 1759), qui affirme l’impossibilité logique de déduire des prescriptions morales à partir de jugements de nature factuelle, je chercherai à identifier les conditions à partir desquelles les neurosciences peuvent jouer un rôle dans le débat contemporain sur le discours haineux tout en évaluant leur potentielle force persuasive du point de vue des opposants à un plus grand contrôle de ce discours.

La désinstitutionnalisation des personnes aux prises avec des troubles de santé mentale dans les années 1960 au Québec a eu comme conséquence de rendre ces personnes plus susceptibles de se retrouver à la rue, faute de services et leurs contacts avec les autorités policières ont augmenté. Face à la surreprésentation de ces personnes dans le système de justice et la reconnaissance que le système de justice traditionnel n’est pas adapté pour ces accusés, des Programmes d’accompagnement justice et santé mentale (PAJ-SM) commencent alors à émerger. Des questions résident autour de l’efficacité de ces programmes dont l’achèvement aurait pour effet de réduire le risque de récidive des accusés. Le principal objectif de cette étude est de comprendre le lien entre les principes de la justice thérapeutique (JT) et l’achèvement des PAJ-SM. Pour ce faire, des dimensions importantes de la JT souvent exclues d’autres études telles que les équipes multidisciplinaires, le fonctionnement du tribunal et les traitements ou services reçus par l’accusé ont été mesurées avec une régression logistique tout en tenant compte des caractéristiques des participants et des programmes qui peuvent influencer l’achèvement. Les résultats de la régression logistique indiquent que les participants qui utilisent des services médicaux ou psychosociaux, des services de la vie quotidienne et des services spécialisés, lorsque leur participation au PAJ-SM, ont de plus grandes probabilités de terminer le programme.

Une part des écrits sur l’islam évoque une confusion des pouvoirs temporels et spirituels comme obstacle à la modernité politique. Devant ce constat, Arkoun (2007) estime que cette confusion n’est pas d’ordre théologique, mais plutôt le résultat de l’évolution historique. D’autre part, Ramadan estime qu'il est tout à fait possible d'être musulman dans un contexte laïc. En Occident, certaines des demandes de reconnaissances de la part de musulmans sont perçues comme un trop grand empiètement du religieux dans l’espace public.

Dans Une étrange multiplicité (1999), Tully propose un nouvel accord constitutionnel, respectueux  des désirs de liberté critique et du besoin d’appartenance, à partir d’une analogie avec l’œuvre du sculpteur haïda, Bill Reid. Au milieu d’un canot à l’équipage hétéroclite se trouve le médiateur dont une des tâches est de faciliter les négociations sur la reconnaissance.

À partir de principes herméneutiques inspirés de la pensée de Gadamer, je propose la présentation et l’analyse du rôle de critique social du médiateur. Mon hypothèse suppose qu'Arkoun et Ramadan agissent comme des médiateurs et proposent chacun une pensée de la médiation. La pertinence de cette recherche repose notamment sur le fait qu’elle analyse la question de la reconnaissance des musulmans occidentaux à partir de la pensée islamique et situe les penseurs non pas comme des représentants des musulmans occidentaux, mais comme des médiateurs engagés dans le dialogue.



Les crises identitaires africaines trouvent leur source dans la formation des États. Elles sont la conséquence de la non-résolution des problèmes politiques ayant défini leur finalité au moment de leur émergence en tant qu’États indépendants. La mise en place des États africains modernes a favorisé les problèmes identitaires. Cette situation historique précise, spontanément, la finalité du pouvoir politique dans ces États. Pour ceux-ci, il s’agit d’exister comme des entités modernes ayant l’obligation de lutter, d’une part, contre les séquelles identitaires du passé colonial, d’autre part, de combattre les dominations qui tendent de multiples manières à limiter leur nouvelle identité parce qu’ils sont contraints d’assurer les exigences de la politique moderne.

Partant de là, le phénomène politique africain ne doit-il pas être saisi dans ses réalités identitaires à partir d’une théorétique qui permettrait de rendre compte de sa structure conceptuelle ? Autrement dit, comment à partir de l’exigence d’une identité nouvelle qui se conçoit dans la synthèse d’un développement réalisé, doit-on nier les valeurs traditionnelles africaines ? Quel est le sens véritable que prennent les identités dans la dynamique des États africains ?

À partir de la méthode historico-analytique, nous montrerons que les États africains ont besoin de créer une nouvelle identité parce qu’ils sont confrontés à des problèmes identitaires que les réseaux traditionnels d’identités tribales ne peuvent endiguer.

À défaut d’obliger les justiciables à recourir aux modes privés de règlement des différends (médiation, arbitrage, etc.) avant de s’adresser aux tribunaux, le premier article du nouveau Code de procédure civile oblige les parties à préalablement considérer ces procédures extrajudiciaires.

D’ailleurs, peut-on obliger les justiciables à recourir à des modes de règlement des différends qui sont par essence construits autour des principes du volontarisme et de l’auto-détermination, si oui, comment ? Si l’on prend l’exemple de la médiation, comment passer outre le paradoxe apparent de l’obligation légale de recourir à la médiation ou la conception qui perçoit la médiation imposée par un juge comme un oxymoron?

La théorie de l’engagement qui nous provient de la psychologie sociale offre de réconcilier ces principes qui à premières vues sembles irréconciliables : la soumission et la liberté. L’observation par Kurt Lewin du phénomène qu’il appela « effet de gel » a été le premier pas vers l’articulation de cette théorie. Certaines conditions particulières favorisent l’engagement dont le sentiment de liberté perçue qui devient ainsi un facteur de soumission.

Appliquée au premier article du Code de procédure civile via une grille analytique interdisciplinaire, cette théorie nous permet d’approfondir la réflexion juridique classique sur le sujet, nous permettant ainsi de développer des pistes de réflexion et d’action.

De Maître chez nous à Pour Le Québec, de Jean Lesage à Jean Charest, le Parti libéral du Québec (PLQ) a évolué au fil des décennies s’adaptant vis-à-vis ses adversaires pour mieux leur faire face dans l’arène partisane. La clientèle électorale libérale risque d’avoir elle aussi changé au fil du temps. Lemieux, en 1993, analysait le PLQ comme un des deux grands partis du 20e siècle tout en ayant donné naissance aux partis qui lui firent compétition. De quelle façon les appuis électoraux du Parti libéral du Québec ont-ils évolué entre 1960 et 2012 tout en continuant d’occuper une place prépondérante dans le système partisan québécois ? Cette question sera répondue à l’aide d’analyses statistiques de régressions logistiques des données sociodémographiques et de l’appui à la souveraineté du Québec provenant de bases de données académiques (3 sondages réalisés par Maurice Pinard, 8 par l’équipe des Études électorales canadiennes et 3 réalisés par Éric Bélanger et Richard Nadeau). Est-il vrai que plus un citoyen est âgé, plus il est enclin à voter pour le PLQ ? Est-il vrai qu’il n’existe pas de fossé sur le genre au Québec fondé sur le vote ? Cette recherche est tout à la fois innovatrice et pertinente puisque le PLQ est le parti majeur du système partisan et qu’aucune recherche ne s’est attaquée à ses appuis électoraux de manière longitudinale, ce qui nous permettra possiblement d’identifier des effets de génération et des effets de cycle de vie.

Dans une décision très divisée de 5 juges contre 4, la Cour suprême du Canada a conclu en 2021 que l'humoriste Mike Ward n’avait pas porté atteinte aux droits du chanteur Jérémy Gabriel en faisant des blagues répétées au sujet de son handicap. Les raisonnements qui ont eu le plus de poids en faveur de M. Ward se fondent sur la notion de « personne raisonnable » : une telle personne, concluent les juges majoritaires, n'aurait pas considéré que les propos de l'humoriste incitaient à détester l'humanité de M. Gabriel pas plus qu'elle aurait estimé que de tels propos étaient susceptibles de conduire l'auditoire à le discriminer. Dans cette conférence, nous proposons d'analyser ces raisonnements en prenant soin de montrer comment la prise en compte du facteur de l'âge - aussi bien de la cible des propos que du jeune auditoire qui était susceptible de les entendre - affaiblit considérablement l'argumentaire de la Cour suprême. Dans d'autres domaines du droit, la Cour suprême a maintes fois rappelé que l'application purement abstraite de la notion de personne raisonnable (ou ordinaire) pouvait conduire à des injustices. En matière de violence conjugale (R. c. Lavallee 1990) ou de provocation (R. c. Thibert 1996), par exemple, il est nécessaire de prêter à cette personne des caractéristiques propres à lui donner une forme plus incarnée. Nous tenterons donc de comprendre pourquoi la Cour suprême a omis de procéder de la même façon dans un litige impliquant la liberté d'expression. 

Au Québec comme ailleurs dans le monde, les homosexuels sont toujours sous-représentés en politique: la proportion d'élus ouvertement homosexuels demeure très faible. Bien que cette situation puisse être due à plusieurs facteurs, il importe de savoir si les préjugés ont un impact sur les évaluations que les électeurs font des politiciens homosexuels et plus particulièrement des candidats gais.

À l'aide d'une analyse statistique réalisée à la suite d'une étude expérimentale en laboratoire informatique menée auprès de 159 participants, la présente recherche met trois hypothèses à l'épreuve, à savoir que les politiciens gais sont perçus comme possédant des traits de personnalité associés au genre féminin, qu'il en va de même pour leurs compétences politiques et que, dans un monde aussi traditionnellement hétérosexuel et masculin que la politique, ils sont moins susceptibles d'être élus que leurs collègues hétérosexuels sous des conditions identiques.

Les résultats obtenus démontrent que les électeurs ont tendance à percevoir plus de féminité chez les politiciens gais. Cette perception peut toutefois être positive auprès de la frange de l'électorat la plus ouverte à la diversité sexuelle, qui n'est pas forcément attirée par le politicien au profil traditionnel. Les électeurs plus homophobes, par contre, ont largement tendance à mal évaluer la candidature des politiciens gais. L'orientation sexuelle des politiciens a donc des effets variables selon la frange de l'électorat observée.

Le Myanmar traverse un processus de libéralisation politique entamé par le haut. Après des décennies d’autoritarisme, deux élections générales sont tenues en 2010 et en 2015. Aujourd’hui, le gouvernement est formé par le parti de la Ligue Nationale pour la Démocratie, longtemps ostracisé par le régime. Comment expliquer ce virage? Pourquoi l’armée birmane a-t-elle assoupli le régime?

Une réponse à ces questions sera offerte en se basant sur deux littératures, celle sur la culture stratégique et celle sur les transitions politiques. Il sera suggéré que la libéralisation politique du Myanmar s’explique par les luttes d’influences au sein du régime entre deux sous-cultures stratégiques, les hardliners et les softliners. Trois orientations stratégiques majeures sont partagées au sein de l’armée: la non-désintégration de l’union, la stabilité intérieure, et la neutralité internationale. L’application des normes favorisées par les hardliners ayant échoué dans l’atteinte de ces trois orientations, les softliners ont pu imposer leurs propres préférences normatives dans la conduite de l’État.

Les résultats, obtenus après quatre mois d’enquête de terrain au Myanmar, tendent à confirmer cette hypothèse. Les implications de ces conclusions, bien que d’apparences contre-intuitives, sont importantes: l’ouverture politique du pays pourrait être comprise comme une stratégie de l'armée pour garantir le maintien d’un certain contrôle militaire sur la politique birmane.

Les travaux portant sur la gestion policière préventive des manifestations indiquent qu'un « tournant géographique » est survenu dans les domaines du maintien de l'ordre qui tend à s'adoucir grâce à l’emploi de techniques d'éloignement des protagonistes et des recours à une force simplement dolosive. Dans ce contexte « progressif », la police conserve toutefois la possibilité de traiter différemment les manifestants ne se pliant pas aux « règles du jeu » tacites (Waddington), à suivre une « stratégie du pourtour » (Foucault) qui consiste à utiliser un pouvoir discrétionnaire d'interpellation et à puiser dans le registre des lois les termes capables d'inscrire dans l'ordre de l'illégalité les individus « transgressifs » sans devoir ouvertement révoquer leurs droits constitutionnels. On peut se demander : comment cette « stratégie » s'incarne aujourd'hui eu égard au « tournant » survenu afin de permettre aux forces de l'ordre d'affronter les mobilisations altermondialistes et assembléistes de type Occupy Wall Street? Cette communication relève les caractéristiques de la gestion policière préventive et présente quelques lois dites « anti-manifestations » afin de souligner que le maintien de l'ordre actuel semble tabler sur l'accroissement du pouvoir discrétionnaire policier et le congédiement législatif de la démonstration de l'intention criminelle (mens rea).



Un écart persiste entre la production de connaissances issues des sciences humaines et sociales et leur utilisation (Trocmé et al., 2011). Afin de combler cet écart, les projets de recherche en partenariat sont de plus en plus valorisés (CRSH, 2011). Cependant, on comprend encore mal les déterminants, les processus ainsi que les retombées associés à la mise en place de tels projets. Un échantillon de N = 35 projets de recherche en partenariat a été examiné au sein des 13 domaines du FRQ-SC. Pour chacun des projets retenus, le chercheur responsable et un partenaire associé ont participé à une entrevue individuelle. Les résultats montrent que les projets de recherche en partenariat posent l’exigence d’investissements supplémentaires au niveau: (1) des bailleurs de fonds (financement et valorisation du partenariat); (2) des chercheurs et des partenaires (ressources et habiletés); (3) des relations entre chercheurs et partenaires (continuité et structuration, langage et cadres de référence communs, respect et confiance mutuels); (4) des connaissances produites (délais de production adéquats). En contrepartie, ces projets entraîneraient des bénéfices spécifiques, relatifs à la qualité des connaissances produites et des services rendus à la population, au développement de nouveaux champs d’expertises, à la valorisation des savoirs d’expériences, à l’augmentation de la crédibilité et de l’influence des acteurs, ainsi qu’au développement de la capacité réflexive des acteurs.

La présentation que je propose est une critique de la théorie du multiculturalisme libéral de Will Kymlicka. Il propose de reconnaître un droit d’autodétermination aux minorités territoriales, soit les peuples autochtones et les minorités nationales, en tant que telles. Il justifie la reconnaissance d’un tel droit en argumentant que l’on doit protéger les cultures minoritaires des influences extérieures puisqu’elles apportent à leurs membres un contexte de choix important permettant une prise de décision autonome. Tout d’abord, je présenterai les points essentiels de la théorie de Kymlicka afin de contextualiser mon commentaire. Ma critique de cette théorie se fera en deux temps. Premièrement, Kymlicka n’établit pas une distinction suffisante entre le principe d’autodétermination, le droit à la sécession unilatérale et le droit à l’autonomie interne. Par conséquent, si un droit à l’autodétermination interne est reconnu à un groupe minoritaire, rien n’empêche la minorité en question de revendiquer un droit à un État indépendant dans le futur. Deuxièmement, alors que Kymlicka relève très bien les similarités entre les peuples autochtones et les minorités nationales, il ne fait pas de distinction claire entre ces deux groupes. Alors qu’il soutient que les deux minorités territoriales précédentes devraient jouir d’un droit à l’autodétermination, cela pose un problème en ce qui concerne les nuances devant être apportées aux droits reconnus aux deux types de minorités.

La proposition présente les résultats d’une analyse qualitative des enjeux de la collaboration inter-organisationnelle basée sur une étude empirique (22 entrevues semi-dirigées à travers le prisme des cinq dimensions du modèle conceptuel de Thomson, 2009) des mécanismes de collaboration mis en place par l’Alliance sherbrookoise pour les jeunes en santé. L’Alliance est composée de grandes organisations publiques sherbrookoises, soit le CIUSSS, la Commission scolaire de la région de Sherbrooke, la Ville de Sherbrooke et le Réseau des centres de la petite enfance.

La recherche a comme objectif de comprendre comment les processus collaboratifs au sein de l’Alliance affectent son fonctionnement.  L’étude du fonctionnement de l’Alliance permet de saisir la complexité des enjeux entourant les collaborations inter-organisationnelles, une compréhension essentielle pour éventuellement outiller et accompagner les organisations sujettes à ce type de pratiques collaboratives.

Les résultats générés par cette étude ont permis de dresser un portrait des processus entourant la collaboration inter-organisationnelle à l’Alliance, ce qui mène à une compréhension plus fine de son fonctionnement actuel, de ses forces, de ses limites et, surtout, des leviers de changements efficaces pour l’organisation. Dans un spectre plus large, la recherche contribue à nourrir les discussions entourant le développement de modèles de gouvernance plus ouverts et collaboratifs.

La montée en importance de la notion d’acceptabilité sociale dans le discours public au Québec semble liée à l’émergence d’un rôle reconnu pour la population concernée par des projets de développement. Dans un contexte où la participation citoyenne s’est développé sous diverses formes dans le domaine de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, la population est désormais appelée à livrer le fruit de son expertise citoyenne de façon à contribuer directement à la réalisation des grandes et petites planifications territoriales. Bien que l’utilisation du concept de l’acceptabilité sociale ait connue une importante hausse au cours des dernières années, sa polysémie reste problématique. À l’instar du développement durable et de la résilience, le concept est fourre-tout. Cette recherche vise à mieux comprendre l’adaptation de l’Assemblée nationale, une institution dont la légitimité est basée sur la représentativité, aux transformations de la participation citoyenne dont on reconnaît de plus en plus la légitimité de proximité. Plus particulièrement, cette recherche vise à évaluer si les soulèvements citoyens face aux projets d’exploitation des ressources naturelles favorise l’adoption de politiques favorisant une plus grande acceptabilité sociale de la population.

Depuis nombre d’années, le système de santé fait face à divers enjeux organisationnels qui ont des impacts sur les professionnelles et notamment sur les conditions d’exercice des infirmières. Couplées aux dernières réformes centralisatrices et exacerbées par les impacts de la pandémie de COVID-19, ces conditions sont perçues comme étant de plus en plus délétères. Différents moyens de protestation mis en place par ces professionnelles ont été rapportés dans les médias : refus d’effectuer du temps supplémentaire obligatoire, lanceur d’alerte, sit-in et démissions en bloc. Ces actes de résistance médiatisés ont permis aux infirmières de renouer avec le caractère politique des soins infirmiers. Toutefois, le politique au sens du vivre ensemble, de l’action, est généralement mal compris, et ce, tant par les infirmières elles-mêmes que par le grand public. De façon à démystifier l’action politique dans le domaine de la santé et à favoriser une meilleure acceptation de cette dernière tant d’un point de vue managérial que citoyen, cette présentation a pour but de synthétiser la façon dont les chercheurs de la discipline infirmière ont abordé le concept de résistance à partir d’auteurs-clés et de proposer une classification des actes de résistance recensés. Ce tour d’horizon permettra entre autres de démontrer la pertinence de la résistance au sein de la pratique infirmière, en proposant des pistes de réflexion pour soutenir les infirmières dans une téléologie transformationnelle.

Une certaine tradition idéaliste en philosophie
politique aime à penser que la démocratie a enfin
réussi à établir une correspondance entre l’État et la société, qui se
manifeste dans la poursuite d’un intérêt général. L’État serait, selon cette
perspective, le reflet du meilleur de la société qui s’orienterait en fonction
du bien commun de cette dernière. C’est là une erreur comme nous le défendrons
dans cette conférence. La démocratie ne peut pas être le lien qui établit une
correspondance entre l’État et la société : au contraire. La démocratie,
dans son idéal libéral, est précisément ce qui a coupé le lien contre la
tradition étatiste française voulant que l’État devait s’identifier au peuple
et vice-versa, de telle sorte que la volonté et les intérêts de la nation
coïncident. Une telle pensée rousseauiste fut à tort longtemps identifiée à la
démocratie. La logique étant que si l’État est le reflet la société, il n’y
avait aucun besoin d’établir des freins au sein même de l’État : on ne se
tyrannise pas soi-même. Nous savons bien que ce n’est pas le cas. Nous voulons
pour cette conférence explorer certaines traditions sur l’État comme le principe d’identité de la pensée
totalitaire de Carl Schmitt et le libéralisme politique classique de Friedrich
Hayek pour défendre l’idée que l’État n’est pas le reflet de la société :
heureusement.

Au Japon, l’espace-temps cartésien, qui nous est si familier qu’on oublie qu’il module subtilement mais fortement notre perception du monde, est une importation relativement récente qui n’a pas entièrement réussi à remplacer l’approche que les Japonais ont développée pour appréhender le monde. On y trouve donc encore maintenant une manière quelque peu différente d’y vivre l’espace et le temps, qui ne s’y trouvent d’abord pas aussi imbriqués qu’ils le sont dans les cultures formant le berceau de la tradition cartésienne. De plus, l’espace et le temps y possèdent tous deux une logique plus subjective et surtout moins linéaire, un tissu composé d’éléments de densité variable, et dont la caractéristique la plus intéressante est ce que des auteurs tels Augustin Berque appellent les espaces (ou les temps) intermédiaires. On peut jusqu’à un certain point saisir cette réalité au quotidien, mais on le voit encore plus clairement dans les arts qui touchent à la vue et à l’ouïe. Ainsi, suite à une brève présentation des concepts de base, nous explorerons, à partir d’une variété d’exemples en arts visuels et en cinéma, comment l’espace et le temps se différencient au Japon, et quels impacts cette différenciation a sur la narration et sur la représentation visuelle.

Au Québec, comme dans de nombreux systèmes judiciaires occidentaux, les discours et les mécanismes en faveur d’une plus grande participation des citoyen-nes se multiplient. Il s’agit d’un message politique fort reposant à la fois sur la volonté de mettre les personnes au cœur du système de justice et de les impliquer davantage dans le règlement de leur conflit. Avec le concept de « justice participative », le Québec se positionne d’ailleurs à la pointe de ce mouvement.

Mais n’est-ce pas illusoire de penser que tous les justiciables disposent des mêmes possibilités de participer activement à la résolution de leur conflit, des mêmes chances de maîtriser leur propre accès à la justice ? Comment garantir que cette participation se fasse réellement dans l'intérêt des personnes ?

Répondre à ces questions nécessite de comprendre comment et pourquoi la procédure civile évolue dans le sens d’une plus grande implication des justiciables. Après avoir présenté la place grandissante des mécanismes de participation dans le nouveau Code de procédure civile du Québec, nous reviendrons sur les fondements de cette évolution. Si l’assise semble avant tout économique, visant à accélérer les procédures judiciaires, à réduire les délais de traitement et les coûts, elle est également démocratique favorisant l’empowerment, la coopération, la communication et l’autonomie… L’objectif sera in fine de dégager des pistes de proposition pour une politique d’accès à la justice au service des justiciables.

Ma recherche concerne les deux principaux régimes linguistiques canadiens, plus précisément les organismes chargés de les mettre en application : l'Office québécois de la langue française (OQLF) et le Commissariat canadien aux langues officielles (CLO). L'objectif est d'évaluer la façon dont ils interagissent dans un cadre fédéral tel que celui existant au Canada. Plus précisément, je me demanderai comment on peut expliquer l'antagonisme fréquent qui anime les interactions entre le régime fédéral et le régime québécois.

 

Je présenterai, lors du congrès, les résultats de ma recherche documentaire organisée autour de six moments balises pour chacun des deux organismes, résultats qui seront interprétés à la lumière des théories sur la langue en politique et sur le fédéralisme multinational. Je mettrai ensuite au défi l'hypothèse voulant que les deux régimes seraient plutôt complémentaires, car ils sont actifs dans des sphères d'activités différentes et ne se rencontrent que rarement de façon concrète dans l'espace social, et selon laquelle les confrontations seraient plutôt liées aux impératifs politiques et aux projets nationaux derrière les régimes linguistiques. Je tenterai, en terminant, de mettre de l'avant les questions que mon travail soulèvera sur la culture et la pratique du fédéralisme au Canada.

 

Cette étude de type préférences exprimées a pour objectif de documenter la demande sociale qu’ont les citoyens pour les programmes de paiements pour services écosystémiques (PSE) en milieu agricole au Québec.  Les PSE sont des dispositifs visant à encourager les producteurs agricoles à adopter des pratiques agroenvironnementales par l’entremise d’incitatifs financiers ou non financiers. Cette approche économétrique a permis de mesurer de façon indépendante les préférences du grand public vis-à-vis différents attributs constitutifs des PSE (p. ex. types de services écosystémiques, conditions de paiements, institutions responsables, lieux d’intervention…) visant à réduire la pollution d’origine agricole et accroître la biodiversité dans les paysages agricoles du sud du Québec. Cette étude a permis de faire ressortir les préoccupations environnementales des Québécois vis-à-vis l’agriculture et de quantifier leur volonté à payer pour soutenir financièrement les producteurs agricoles dans leur démarche environnementale. L’analyse des résultats révèle une forte hétérogénéité dans le choix des attributs évalués par les répondants à l’égard des scénarios proposés. Cinq grandes classes (segment d’une population) ont émergé en termes de préférences agroenvironnementales et de modalités de fonctionnement, illustrant ainsi la complexité derrière la prise en compte de la demande sociale lors de l'élaboration d'une politique publique en matière de gouvernance environnementale. 

En 1990, avec l’Énoncé de politique en matière d’immigration et d’intégration, le Québec se dote de sa première véritable politique d’immigration et d’intégration. Une année plus tard, la signature de l’Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubains consacre l’exclusivité des pouvoirs du gouvernement québécois sur la sélection des immigrants indépendants à destination Québec. L’accord confie aussi au gouvernement du Québec l’entière responsabilité des services d’accueil et d’intégration des nouveaux arrivants à destination Québec. Bien qu’il soit précédé par d’autres ententes, l’Accord Canada-Québec marque un tournant majeur dans la façon de concevoir l’immigration au Québec. Vingt ans après l’entrée en vigueur de l’Accord Canada-Québec, nous jetons un regard sur les conséquences de l’adoption de cette entente sur la politique d’immigration québécoise, notamment en matière de sélection des immigrants économiques (travailleurs qualifiés, autonomes, investisseurs et entrepreneurs). Malgré la « tutelle » fédérale, le système québécois d’immigration économique a-t-il acquis une certaine autonomie? Dans quelle mesure répond-il aux besoins spécifiques de la société québécoise? Quelles sont les possibles changements qu’il devrait subir? Notre analyse finira par une réflexion sur le système québécois d’immigration économique comme modèle pour le système fédéral de sélection des immigrants économiques et pour les autres provinces canadiennes.

Au Canada, tout comme dans l’ensemble des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, les organisations de santé font face à des défis au regard, notamment, du vieillissement de la population et de l’accès aux soins et services. Ces défis révèlent l’importance pour ces organisations d’adopter des approches innovantes pour permettre aux usagers de mieux répondre à leurs besoins de santé. Le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Capitale-Nationale (CIUSSS-CN), situé à Québec, a procédé à l’implantation d’un nouveau modèle de services s’appuyant sur une pratique clinique harmonisée basée sur l’analyse du besoin prioritaire plutôt que seulement sur le diagnostic et qui sollicite de nouveaux modes de collaboration interprofessionnelle, afin que l’usager soit orienté vers les bons soins et services. Un projet de recherche est en cours ayant pour objectif d’identifier les enjeux associés à l’implantation de cette innovation clinique auprès de différents groupes d'acteurs. Cette communication vise à présenter les résultats finaux, issus d’entretiens semi-dirigés auprès d’usagers, de professionnels, de gestionnaires et de médecins de quatre groupes de médecine de famille dans laquelle la pratique a déjà été implantée. Les résultats de cette étude permettront d’identifier les conditions d’implantation de cette nouvelle pratique clinique, afin d’évaluer son potentiel de transférabilité à d’autres établissements similaires.

D’emblée rattachée aux génies chimique et de l’environnement, l’Analyse du cycle de vie (ACV) est définie comme un processus d’évaluation environnementale par lequel les flux de matières et d’énergie associés à un produit sont comptabilisés, et leurs impacts potentiels sur l’environnement quantifiés. Dans le discours formel (articles scientifiques, normes, etc.) qui structure le champ de l’ACV, il ressort que sa communauté épistémique se situe avant tout dans un rapport positiviste à la connaissance. En revanche, c’est apparemment en dépit de cette épistémologie fortement institutionnalisée que la question de la qualité des résultats ressort comme étant problématique : entre autres exemples éloquents, la quantification de l’incertitude des résultats – au fondement de la rigueur en sciences de la nature – s’avère à ce jour pratiquement impossible en ACV. Partant, se pose la question de savoir comment la « qualité des résultats » est conçue en pratique. À l’issue préliminaire d’une recherche fondée sur l’analyse qualitative d’entretiens non directifs réalisés auprès de cinq experts en ACV, il apparaît que les conceptions positivistes de la qualité sont parfois inopérantes. Leur insuffisance contribue potentiellement à l’émergence au sein du champ d’un rapport implicite à la connaissance, construit et incarné en pratique. Rendu explicite, un tel pluralisme épistémologique contribuerait possiblement à une mise en œuvre plus effective de l’interdisciplinarité.

Comment les avocats québécois conçoivent-ils leur rôle dans la société contemporaine? Cette question est d’autant plus importante dans le contexte des récentes réformes judiciaires : Code de déontologie des avocats et Code de procédure civile du Québec. Ces réformes visent à changer la culture judiciaire : passer de la culture du procès à celle de l’entente. Ce changement implique avant tout un changement social, notamment dans les représentations, la formation et la pratique des avocats. Les avocats sont au cœur du problème de l’accès à la justice. La façon dont ces derniers conçoivent leur rôle influence la pratique en droit et l’accès à la justice. Or, la fonction symbolique et sociale de l’avocat s’est érodée dans la société contemporaine. Ceci contribue au problème de l’accès à justice.

Les études réalisées jusqu’ici traitent principalement de l’efficacité du système judiciaire et des attentes des citoyens. Il n’existe aucune étude empirique quant aux effets des réformes déontologiques et procédurales sur la fonction même de l’avocat. Mon projet de recherche vient combler ce vide. Il s’agit d’une première étude empirique québécoise sur l’impact des récentes réformes judiciaires et la transformation des idéaux-types de l’avocat. L’originalité de mon projet de recherche consiste à explorer empiriquement la conception du rôle de l’avocat contemporain et ce, dans une perspective interdisciplinaire (Cultural Legal Studies).