Le meurtre irrésolu de la jeune Blanche Garneau, survenu à Québec en 1920, donne lieu à une affaire judiciaire et politique pleine de rebondissements, du genre dont raffolent tant les journaux de l’époque. L’un de ceux-ci va plus loin que les autres dans ses critiques de l’administration de la justice, valant à son éditeur d’être poursuivi deux fois plutôt qu’une : par la justice pénale et, exceptionnellement, par l’Assemblée législative pour « violation des privilèges de la Chambre ».
Cette affaire est alors le lieu d’un débat, bref, mais important, sur la liberté de la presse au Québec. Ce sujet étant peu exploré dans l’historiographie de la presse, notre travail propose de mieux comprendre les limites rencontrées par les journaux dans leur couverture médiatique, particulièrement en ce qui a trait aux critiques envers l’État. À cette fin, les sources d’archives judiciaires et les périodiques nous offrent une fenêtre sur les pratiques journalistiques, surtout celles, plus provocatrices, des journaux à sensation, ainsi que sur les réactions des autorités.
Nos recherches permettent de mieux cerner ces limites à travers l’étude de cas de l’affaire Blanche Garneau, par une analyse de ses dimensions médiatiques et politiques. Nous concluons que cet épisode fut l’occasion d’une renégociation des limites de la liberté de la presse au Québec, à laquelle prirent part les journaux, la justice, la législature et la société civile.