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La poétique peut se définit à la fois comme une théorie descriptive et interprétative. Elle est une discipline à part entière plurielle, spécifique : elle se préoccupe d’étudier la littérarité d’un texte. Son caractère pluriel trouve ses fondements dans plusieurs facteurs dont la langue et la culture.

Si nous partons du principe selon lequel « la poétique [est une] discipline analysant les usages et les formes du discours littéraire en général tout en s’intéressant à des poétiques particulières — celle d’une écrivaine ou d’une école » — nous apercevons que ceci répond en écho au deuxième versant de la poétique, selon Todorov et Ducrot (1972), qui est d’interpréter ou d’analyser l’œuvre littéraire créée. Ainsi, s’agit-il d’une méthode qui a pour essence, à partir de l’interprétation, de donner un sens à une œuvre donnée. L’entreprise du poéticien a pour finalité de dégager les marques de littérarité ou de poéticité ainsi que leur fonctionnement, eu égard au contexte de l’œuvre.

C’est un tel projet qui sera mis en application dans l’analyse que nous ferons du recueil de poèmes de Noël X. Ebony intitulé Déjà vu. Il a pour objectif d’étudier, à partir de la poétique, entendue comme manifestation des caractères littéraires d’une œuvre, ce qui fonde sa littérarité. En l’occurrence, nous mettrons en exergue l’analyse du thème du souvenir dans ses déclinaisons dans l’œuvre poétique de Noël X. Ebony. L’acception théorique de Todorov et Ducrot fondera et orientera notre analyse.

Comme le démontrent les travaux de Waugh, de Casey, et de Bould et Vint, certains textes de fantasy contemporains produisent un commentaire politique et une critique de normes sociales. Par les transgressions de la réalité consensuelle et la mise en scène de figures marginalisées, ou non humaines, ils posséderaient la capacité de subvertir le concept d’identité fixe. En retenant ce potentiel de la fantasy, nous avançons qu’elle peut devenir un espace pour les représentations féministes et queer, et contribuer à ébranler l’hétéronormativité, soit la norme hétérosexuelle selon laquelle il n’existe que 2 sexes distincts et complémentaires. Les figurations d’identité marginales deviennent alors les lieux d’un questionnement diégétique sur la construction sociale du genre, où les corps performés se (dé)forment au croisement de différents discours. Dans cette communication, nous nous attarderons à la figure de «the Fool», qui change d’identité à répétition et incarne des femmes et des hommes dans The Realm of the Elderlings de l’autrice Robin Hobb. Nous verrons qu’en tant que stratégies discursives, les performances subversives de ce personnage fabriquent son illisibilité identitaire en brouillant les codes associés au féminin et au masculin, et comment cette confusion produit une critique de la norme hétérosexuelle. Nous nous pencherons plus précisément sur la façon dont les habits et les gestes utilisés par «the Fool» dévoilent des mécanismes de la production sociale des genres.

Une des différences les plus notables entre l'ouvrage majeur de John Rawls, Théorie de la Justice, et son Libéralisme politique est la grande importance qu'accorde ce dernier au contexte historico-politique d'où il s'élabore. Vue sous cet angle, l'on peut dire qu'il tente alors de concilier l'approche de Théorie de la justice, dans lequel les principes de justice sont légitimés par une procédure rationnelle et neutre, à une justification des principes qui découlent de la congruence de ceux-ci avec une compréhension plus profonde de nous-mêmes. Se voulant politique plutôt que métaphysique, cette compréhension est à tirer de la culture publique, de l'histoire et de la tradition de nos démocraties occidentales. 

En se focalisant sur Libéralisme politique, l'on dénotera d'abord le lieu d'une absence. En effet, bien que la dimension interprétative y occupe une place centrale, les notions théoriques fondamentales étant définies à partir de cette compréhension politique de nous-mêmes, elle n'y est pourtant jamais thématisée comme telle. Une fois cela relevé, l'on constatera que la théorie rawlsienne ne peut plus se permettre d'éluder la question herméneutique, celle qui exige de rendre compte de ce moment interprétatif initial, surtout en vertu d'enjeux de justice actuels comme celui de l'environnement. Car, ce qui se joue en cette compréhension, c'est la pertinence même de la théorie en regard des aléas de l'histoire et des défis inédits qu'ils ne cessent de poser à la justice.

L’Internet est un média qui diffuse toutes sortes de formats se déclinant en plusieurs genres (des textes, des images, de l’audio, des images animés) ayant diverses origines. Parfois certains documents sont conçus pour d’autres médias, par exemple la télévision, et s’importent sur le web, et d’autres sont conçus pour être diffusés et consommés sur le web et rayonnent ensuite dans un autre média. Certaines œuvres tentent même d’être interactives, par exemple une forme hybride entre l’image en mouvement et le jeu vidéo. Cette multitude d’objets audiovisuels se trouvant sur Internet évoque le problème de leur définition et de leurs caractéristiques. Comment les différencier les uns des autres? De nombreux vidéos forment une série, mais sont-ils tous des webséries? Le terme websérie est présentement utilisé pour englober plusieurs types d’oeuvres qui sont un peu fictionnelles, un peu documentaires et un peu d’autres choses. Il est important de relever les caractéristiques de la websérie et de tenter une première définition d’un nouveau genre. En comparant différentes webséries québécoises avec des genres établis au cinéma (saga, feuilleton) et à la télévision (sitcom, série lourde), il est possible de faire ressortir certaines caractéristiques de la websérie. Cette analyse s’appuie sur les travaux de Barrette (2010), de Jost (2011) et d’Arsenault (2011).

Georges Remi, dit Hergé, est le père des Aventures de Tintin (1929-1976). Au fur et à mesure que sa carrière progresse, Hergé devient conscient de son pouvoir de façonneur d’«imaginaires sociaux» (Castoriadis). Tout en débordant de gags pour divertir le lecteur, certains albums contiennent des références au paranormal qui semblent avoir pour but plus que le simple divertissement.

Cette communication examinera la représentation du paranormal dans les Aventures de Tintin et les questionnements qui en découlent : sous quelles formes le paranormal se retrouve-il dans la bande dessinée? Sous quel ton l’invoque-t-il? Pour répondre à ces questions, nous concentrerons notre recherche sur Tintin au Tibet (1960), album dans lequel le paranormal est partie intégrante de l’intrigue. Il s’agira d’abord d’en relever les occurrences et d’examiner ensuite ce que ces phénomènes apportent au texte.

Notons que le paranormal n’est pas central dans les études consacrées à Tintin. Elles se sont concentrées sur la vie du créateur (Peeters), ainsi que les liens entretenus avec l’Histoire (Angenot et Frey). La lecture de Tintin au Tibet à la lumière de l’épistémocritique (Pierssens) nous permettra d’affirmer que l'album n’a pas été créé uniquement pour divertir. Il se révèlera que Hergé, par la représentation qu’il propose de la voyance, de la télépathie et de la cryptozoologie, cherche à définir la vision de ces phénomènes qu’auront les jeunes lecteurs, une fois devenus adultes.

La notion de non-public se définit principalement par contraste ou en opposition avec celle de public (Jacobi et Luckerhoff, 2010). Cette notion qui a servi à identifier les individus qu’on ne compte pas parmi les publics de la culture cultivée a contribué à confirmer l’existence d’une hiérarchie des pratiques, des institutions et des habitus en fonction de leur légitimité (Le Marec, Schiele, Luckerhoff, 2021). Cette perspective négligeait le fait qu’un même individu puisse appartenir au public de la culture légitimée tout en s’adonnant à des pratiques peu légitimées. Considérant qu’il n’existe pas de réelle frontière entre le public et le non-public, des chercheurs ont refusé de définir les non-publics dans une perspective essentialiste – qui reviendrait à essayer de cerner qui ils sont – pour embrasser le projet de caractériser, tant par l’observation que par la cueillette et l’analyse de témoignages, ce qu’ils font (Lapointe et Luckerhoff, 2021). Il est possible pour des acteurs d’être plus ou moins publics et plus ou moins non-publics. Nous avons analysé 210 publications scientifiques portant sur les non-publics afin de dégager les nombreuses raisons d’être non-publics. Nous nous sommes intéressés à mieux comprendre les raisons du désintérêt chez différentes catégories de non-publics de même qu’à saisir la manière dont l’acte de réception positionne l’individu sur le continuum se déployant entre les pôles public et non-public.

Bois, café, maïs, chou, pamplemousse, sucre. Les matières premières sont légion dans les œuvres latino-américaines depuis au moins les années 1970.  Généralement associées à la création d’une identité territoriale locale ou d’une identité panaméricaine, il est toutefois possible de renouveler l’interprétation de la présence de ces matières premières dans les œuvres d’art contemporaines de l’Amérique Latine.

             En effet, le contexte d’utilisation de la matière première varie d’un artiste à l’autre, comme chez Rodrigo Braga ou Vik Muniz, et dépasse le cadre strict du local ou du latino-américain. Quelle interprétation du fonctionnement de l’économie mondiale les œuvres qui emploient des ressources naturelles fournissent-elles ?

            Cette présentation montrera comment la performance Payer la dette externe de l’Argentine avec du maïs, l’or latino-américain (1985), de l’artiste argentine Marta Minjín, peut être considérée comme le point de départ dans l’art latino-américain d’une utilisation plus critique de la matière première dans les œuvres. Ainsi, l’utilisation des ressources naturelles dans les œuvres s’insère dans un commentaire plus large sur la place de ces ressources dans une économie financiarisée.

Au Québec, le nombre de livres électroniques (LN) vendus a oscillé entre 505 657 en 2014 et 583 693 en 2022 (OCCQ, 2023). Bon an mal an, ce marché demeure relativement restreint. Le nombre de LN empruntés dans les bibliothèques est cependant en hausse alors que les emprunts de livres papier (LP) sont en baisse (Lapointe, Luckerhoff et Niort, 2023). 

Nous avons voulu connaître les raisons qui expliquent le passage du LP au LN chez des lecteurs. Nous avons animé des entretiens individuels et de groupe avec plus de 70 personnes dans une démarche qualitative (Luckerhoff, Guillemette et Lalancette, 2023) inductive (Germain, Guillemette, Luckerhoff, 2023) et nous les avons analysés selon les principes des approches inductives (Guillemette et Luckerhoff, 2023a, Guillemette et Luckerhoff, 2023b). Nous avons créé un échantillon théorique diversifié, notamment sur les plans sociodémographiques et des profils en lien avec la lecture.

Des participants trouvent qu’il est plus aisé de lire au format numérique, notamment en raison de la possibilité de grossir les caractères et de la légèreté de la liseuse. D’autres évoquent la possibilité d’avoir plusieurs livres à lire dans un seul dispositif, les coûts moins élevés et la facilité à se procurer des livres en ligne. Nos résultats de recherche permettent aussi d’identifier des changements dans les habitudes d’emprunt et d’achat et de mieux comprendre comment les lecteurs de LN découvrent des titres et des auteurs dans ce contexte.

Alors que les principes de développement durable, d’écologie du bâtiment et d’efficacité énergétique prennent une place de plus en plus importante dans le design architectural, le CLT, par ses caractéristiques intrinsèques, est un matériau de construction idéal pour une architecture écoresponsable. Cependant, les bâtiments en CLT aspirants à offrir des performances énergétiques intéressantes sont généralement limités par les directives et règles de conception qui n’encouragent que peu les expérimentations formelles qui permettraient d’explorer des stratégies passives alternatives basées sur la forme du bâtiment.


Le projet consiste à démontrer qu’une approche de conception intégrée alliée à la précision et la diversité des éléments issus de la fabrication numérique permet maintenant aux concepteurs d’envisager des formes complexes en CLT sans augmentation significative du coût de production.


La méthode de recherche-création et les simulations rétroactives produites par le logiciel de conception et de modélisation paramétrique 3D permettront de développer un projet d’architecture où les aspects structuraux et les contraintes de fabrication contribuent au processus de conception. Plusieurs itérations du projet seront proposées ayant comme paramètres les composantes architecturales, structurelles et constructives afin de produire un projet singulier. Ses fichiers de découpe seront ensuite générés automatiquement pour un passage direct aux machines-outils à commande numérique.

Dans les études vidéoludiques, on avance que certains jeux vidéo faillissent à leur devoir en créant une relation amorale avec le joueur, notamment par l'exploitation d'une pensée strictement stratégique qui ne se réfère qu'aux règles du jeu (e.g. Sicart 2013; Ryan et al. 2016). On propose alors de sophistiquer les designs de jeu afin d'engager moralement le joueur, par exemple en y intégrant des dilemmes éthiques (Zagal 2009). Mais on modélise du même coup un joueur dont l'activité ne repose que sur sa froide raison et son jugement impartial, ce qui ne correspond pas à sa réalité expérientielle. Le joueur s'investit émotionnellement en jeu pour atteindre des résultats valorisés (Juul 2005; 2013). Il développe des préoccupations pour sa progression en jeu et pour des personnages qu'il côtoie (Perron 2016). Ces remarques indiquent qu'il faut contextualiser l'expérience morale du joueur en tenant compte de ses projets et émotions. La présentation aura pour but d'évaluer le rôle de l'émotion dans l'engagement moral et ses compatibilités avec la raison pratique. Elle mettra de l'avant les forces motivationnelles et heuristiques des émotions morales, telles que discutées en philosophie (De Sousa 2001; Greenspan 2010), en psychologie (Tangney et al. 2007) et en études cinématographiques (Carroll 2010). Elle défendra l'idée que le joueur vertueux, tel que compris par Sicart (2009), doit vivre les émotions proposées par le jeu pour entrer dans un dialogue éthique avec celui-ci.

Selon Véronique Donard, « [l]ittéralement, sacer facere signifie « rendre sacré ». Sacrificare consiste donc à rendre une chose ou un être sacrés, en les consacrant aux dieux par un sacrificium, d’où notre mot « sacrifice », qui désigne à la fois ce qui est offert et l’action d’offrir » (2009). Or, dans les sociétés profanes qui sont les nôtres, l’idée du divin a disparu, mais pas l’acte sacrificiel. Ainsi, pour Anne Dufourmantelle,« [d]ans un monde où la distinction entre profane et sacré n’a plus de sens, du moins dans la quotidienneté des liens qui régissent la société civile, le sacrifice nous rappelle cette place du divin déserté » (2007). Désormais, en place du divin, c’est le bien commun de la société qui se trouve mis à la place de la divinité du sacrifice des religions primitives.

Cela est particulièrement clair en littérature, que Derek Hughes considère comme le lieu privilégié de la présentation du meurtre rituel d’un protagoniste de fiction (2007). C’est dans le roman policier que cette tension est la plus visible. Dans mon article, j’étudierai les mécanismes qui entourent le meurtre dans l’œuvre de l’écrivaine contemporaine Fred Vargas, en mettant l’accent sur les personnages féminins dont la place en tant qu’objet sacrificiel est, d’une part, surreprésentée et inscrite dans une tradition patriarcale de la représentation d’un féminin, et, d’autre part, ambiguë et, nous le verrons, subversive.

Marguerite Duras est une auteure française dont l’œuvre bénéficie d’une large diffusion et jouit d’une grande reconnaissance. De très nombreuses études ont déjà été réalisées sur les textes, le théâtre et le cinéma de l’écrivaine. Pourtant, il est pour le moins surprenant de constater que les chercheurs n’ont que très rarement porté leur attention sur les écrits journalistiques de Duras, considérés extérieurs à son œuvre. Tout au plus ces derniers ont-ils servi à appuyer l’argumentaire de certaines études, par exemple en attestant de l’engagement, au sens sartrien du terme, de l’écrivaine. Cependant, au lieu de situer ces articles dans les marges de l’écriture littéraire durassienne, comme l’y invitent les titres des deux recueils qui les accueillent – Outside et Outside 2 –, il importe de les considérer comme partie intégrante d’un corpus littéraire. À ce titre, nous proposons de renverser la tendance en plaçant les écrits journalistiques au centre de nos préoccupations. Avec une approche centrée sur le texte, nous étudierons la manière dont les articles de Duras répondent aux exigences du genre journalistique tout en ayant recours à des procédés de narrativisation et à un style poétique qui les dotent d’un caractère indéniablement littéraire. Notre démarche permettra non seulement de mettre en valeur un corpus longtemps délaissé, mais aussi de jeter un nouvel éclairage sur une œuvre abondamment étudiée et dont il reste de toute évidence encore beaucoup à dire.

En Ontario français, l'école s'est donné le mandat de promouvoir la langue et la culture françaises et reconnaît que l'art peut y contribuer (Ministère de l'éducation de l'Ontario, 1999, 2000, 2004). Les recherches ont principalement porté sur l’expérience des élèves et des enseignants, (Théberge, 2006a, 2006b, 2006c, 2007a, 2007b), plus rarement sur celle des professionnels (Théberge, 2008 et 2009). La présente recherche examine comment des artistes du théâtre franco-ontarien créent pour le public adolescent et comment ils pensent contribuer à son éducation artistique et culturelle. Le cadre conceptuel s'inspire du modèle systémique de créativité (Csikzentmihalyi, 1999, 2006) qui permet d'identifier la relation entre artiste et public dans le processus de création. Les données présentées sont issues d'une recherche doctorale de nature ethnométhodologique incluant seize artistes en période de création.  La communication présente trois concepts émergents: l'artiste conteur, l'artiste formateur et l'artiste passeur (Thibault, 2010). Cette recherche fait connaître le travail des artistes, leurs initiatives et les besoins qu'ils identifient en matière de formation du public adolescent et des adultes qui l'accompagnent. Les résultats peuvent contribuer à approfondir l'intégration de la création professionnelle à l'éducation artistique et culturelle en Ontario français. 

Au 18e siècle, l’expérience de la traversée atlantique fait des colonies installées sur le continent américain des lieux lointains difficiles à conceptualiser pour les Européens. Si les récits discursifs prennent part à la construction du paysage américain qui se forme alors, un rôle est aussi dévolu aux représentations figuratives. C’est dans ce contexte qu’un artisan augsbourgeois n’ayant jamais mis les pieds en Amérique, Balthazar Frederic Leizelt. (1755-1812), conçoit Vuë de Québec. Cette représentation est remarquable à plus d’un titre. C’est une vue d’optique qui est un médium biparti, comprenant des gravures et des appareils, servant à effectuer des voyages visuels imaginaires. Il s’agit également d’un des rares exemples à ne pas utiliser directement une représentation de Québec imaginée à Londres ou à Paris. Au lieu de reprendre une gravure d’après Franquelin, Short ou Smyth, Leizelt adapte un segment d’une œuvre anglaise représentant un arsenal britannique. 

Quelle est la signification de cet emprunt ? Dans le cadre de la conférence, nous proposons de démontrer que Leizelt cherche à représenter la ville comme un territoire américain qui est contrôlé par l’empire britannique grâce à sa présence militaire et au réseau d’échanges transatlantiques. Cette construction de l’identité de la ville s’effectuant dans un contexte de production marquée par l’engagement des mercenaires allemands au côté des Britanniques contre les rebelles américains.

En 1998, Verena Stefan (1947-2017) s'est installée à Montréal. L'écrivaine suisse allemande, devenue mondialement célèbre avec son premier roman Häutungen (Mue), a passé près de 20 ans à Montréal et au Québec, mais son œuvre reste absente des librairies, des bibliothèques et des étagères des Montréalais. Comment expliquer cette absence, surtout sur son lieu d'immigration?

Pour analyser l'absence et la présence de son œuvre dans les bibliothèques nationales canadiennes et germanophones, j'ai recueilli des données bibliographiques sur les traductions et les originaux de Stefan auprès de la Bibliothèque nationale allemande, de la Bibliothèque nationale autrichienne, de la Bibliothèque nationale suisse, de Bibliothèque et Archives Canada, de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et de neuf autres bibliothèques nationales. Pour identifier les œuvres importantes qui sont accessibles aux différentes communautés littéraires et linguistiques par le biais des bibliothèques, une analyse statistique de leurs données bibliographiques sur les traductions est appliquée. 

L'hypothèse est émise que la mise en contexte et la visualisation des trajectoires de traduction de Stefan au Québec et au-delà, ainsi que l'accessibilité variable de ses écrits dans les communautés littéraires, soulignent son rôle dans la poussée de l'écriture féministe au-delà de ses frontières linguistiques, en insistant encore plus sur l'importance d'avoir ses œuvres disponibles dans différentes langues.

La présente contribution qui s’appuie sur deux concepts de la pragmatique, l’illocutoire et le perlocutoire, part du système anthroponymique des sociétés tchadiennes et montre les pouvoirs des noms propres comme énoncés performatifs. Au Tchad, les noms ne sont pas « simplement des marques [des] individus » (John S. Mill 1882 : 39), ils ont une visée perlocutoire, celle de « prendre effet » (Austin 1970 : 129) sur le porteur qui subit le destin consigné dans son nom. D’ailleurs l’adage latin Nomen omen, signifiant le nom est oracle et présage (Jacques Ferry 2014 :77) vient soutenir un autre proverbe tchadien qui veut que le nom est une chose qui fait la personne. C’est donc dire que l’assignation du nom crée le destin (illocutoire) qui est imposé au porteur par le fait de lui assigner ce nom (perlocutoire) qui va définir sa trajectoire personnelle. En envisageant le nom comme acte de langage, l’analyse va faire ressortir quelque typologie des noms tchadiens pour montrer leurs usages sociaux comme lieu de cristallisation identitaire et mémorielle. Cette contribution s’inscrit dans une recherche doctorale en cours portant sur la transmission de la mémoire des conflits tchadiens (guerre civile et dictature) à travers les témoignages des survivants. La présente analyse vise donc à rendre compte d’un aspect de notre travail qui aborde le système anthroponymique des sociétés tchadiennes. À terme, nous visons à montrer les fonctions sociales des noms dans les cultures orales en général.

Fabien Gris qualifie la littérature française contemporaine de « lieu de mémoire.s » (Gris, 2016). Par là, il entend que certain.e.s auteur.ice.s font dialoguer la mémoire intime avec la mémoire culturelle. De ces œuvres de mémoire.s, on trouve quelques textes autobiographiques qui se réfèrent à des œuvres cinématographiques pour mieux questionner la mémoire filiale. C’est ce type de récit mémoriel que je souhaite étudier dans le cadre de cette communication à l’aide de la notion d’« effet de projection » (Martin (2019) et Murzilli (2015), un procédé selon lequel la narratrice-personnage projette sa pensée, ses souvenirs et son vécu, ou ceux d’autres personnages, dans une œuvre filmique.

Plus particulièrement, je souhaite m’attarder à Supplément à la vie de Barbara Loden (2012) de Nathalie Léger et Thelma, Louise & moi (2018) de Martine Delvaux. Je veux en effet démontrer comment Léger et Delvaux inscrivent leur récit mémoriel dans une « filiation féministe » (Brassard, 2020) en mettant en parallèle une matière autobiographique avec le parcours des créatrices et héroïnes des films Wanda (Loden, 1970) et Thelma & Louise (Scott, 1991). Cette étude me permettra de démontrer que « l’effet de projection » permet à Léger et à Delvaux de remettre en question le récit de filiation tel que théorisé par Dominique Viart (2019) pour situer plutôt leur filiation dans une sororité symbolique féministe.

La cuisine créole offre une richesse, une variété, une hétérogénéité de saveurs et de goûts dont la fécondité contribue à enrichir l'expérience littéraire. Depuis longtemps les corrélations entre la littérature et la gastronomie sont fréquentes. Toutefois,  ces rapports sont peu explorés en ce qui a trait au champ littéraire haïtien.  Nombre d’écrivains mettent en scène la cuisine haïtienne. Pourquoi l’évoquent-ils ? Que mange-t-on dans le roman en provenance d’Haïti ? Quelles sont les répercussions esthétiques et métaphoriques des savoir-faire culinaires ? Répondre à ces questions implique de sonder le contexte d’émergence de ces œuvres. Immanquablement, notre réflexion s’accompagnera d’interrogations d’ordre historique, politique, social et économique. La cuisine, un des beaux-arts,  devient-elle une des formes du style de l'écrivain ? La présente étude a pour but d’analyser la pluralité des pratiques culinaires chez quelques auteurs haïtiens : Jacques Stephen Alexis, Jacques Roumain,  René Depestre, Yannick Lahens et Michel Soukar.



Notre communication se propose de définir la fonction du lieu (territoire et non-lieu) au sein de l'œuvre de Guy Régis Jr, dramaturge haïtien vivant à Paris. Nous tenterons d'observer, à travers l'oeuvre de Guy Régis Jr, comment la quête du pays et de la mémoire est propre aux auteurs de l'exil, à une altération du souvenir à travers l'émigration (culpabilisation), et comment elle s’articule comme un phénomène global issu d'une situation politico-sociale houleuse.

Ainsi, il existe une récurence au sein de l'œuvre de Guy Régis Jr, soit celle de décrire le pays morcelé à travers un verbe flou, analogie d’une incapacité de la parole à décrire/décrier. L'espace dramatique et l'espace réel auquel il renvoie, se dressent comme tentatives de réanimation via le geste théâtral de la mémoire zombifiée. De ce fait, « la résistance ne commence pas par la parole » (CHAMOISEAU, 2005: 16). Les personnages de l'œuvre, par leurs actions dépravées et stériles, symbolisent la perte de repères (géographiques et intérieurs) et le difficile passage à l'acte. Les protagonistes restent endigués aux confins d’une intériorité fragmentée par la honte, les regrets et la culpabilité. L’action s’articule comme un éloignement doublé d’une « déterritorialisation » de l’espace (DELEUZE et GUARATTI, 1980: 364). La tension dramatique tente donc de réanimer la parole par le geste, le corps vivant de l'acteur luttant contre les forces contradictoires du texte afin de faire revivre le pays.

 Présentation du Projet de Recherche

Scène Sociale – Le Cri Artistique

 

La recherche porte sur l’utilisation d’une méthode d’art communautaire/théâtre d’intervention (AC/TI) développée au Brésil. Il s’agit d’une recherche-action qui vise à valoriser le processus de construction de savoirs de type émancipatoire et qui met en évidence les valeurs d’humanité, de respect de la vie, de dignité et de responsabilité des racines communautaires par l’art. Cette approche«est indispensable pour la réflexion critique sur les conditions que le contexte culturel exerce sur nous, sur notre mode d’agir, sur nos valeurs» (Freire, 2005, p. 118).Elle traite des conditions nécessaires au développement de la pratique artistique provenant de la communauté en intégrant des pratiques pédagogiques de Paulo Freire (1967) et d’Augusto Boal (1988). Les résultats des expériences réalisées au Brésil avec le groupe de théâtre FACES(Faire del’Art avecl’Esthétique Sociale)sont significatifs et ont contribué au rayonnement et à l’impact dans le milieu de la communauté Nordeste deAmaralina, de la ville de Salvador-Bahia.Il vise à développer un enseignement fondé sur l’interrelation entre la réalité significative de la communauté et le mouvement pour changer l’environnement. D’une part, il y a une expérience positive de AC/TI qui a été réalisée au Brésil et d’autre part, il y a le projet de recherche qui sera réalisée dans le cadre de cette maîtrise avec un groupe semblable.

L’imaginaire occidental semble empreint d’un « sublime technoscientifique » qui à la fois modèle notre rapport au monde et en est le produit. Le développement accéléré des sciences et des techniques (et leur convergence, ce qu’on appelle désormais les « technosciences ») et les mutations industrielles entretiennent cette image du sublime. Bien plus, les acteurs majeurs de ce « sublime technoscientifique » (l'ingénieur notamment) sont devenues des héros, les figures tutélaires du contemporain .Par le sublime technoscientifique, l'homme moderne exprime ses fantasmes et ses aspirations. L’analyse de textes littéraires nous permettra d’identifier les ressorts de ce sublime technoscientifique qui nous apparaît comme l’un des aspects majeurs et moteurs de l’imaginaire contemporain. En effet, la production littéraire contemporaine y recourt fréquemment, en particulier dans la littérature française où l’ingénierie et l’industrie apparaissent de façon récurrente. Pour étayer notre propos, nous nous concentrerons sur l’étude de récits et de romans : Paysage fer de François Bon (Verdier, 2000), Les Forges de Syam de Pierre Bergounioux (Verdier, 2007), Atelier 62 de Martine Sonnet (Le Temps qu’il fait, 1968), La Centrale d’Elisabeth Filhol (POL, 2010) et La Naissance d’un pont de Maylis de Kerangal (Verticales, 2010).



La revue d’art est comme une organisation sociale qui participe au processus de légitimation des acteurs du domaine artistique, à l’établissement et à la circulation de sens ainsi qu’à la visibilité des œuvres d’art. Au Brésil, les revues, à cause de leur format et de leur périodicité rapide, se sont établies comme le support idéal pour une réflexion critique qui représente la volonté d’agir de leurs acteurs sur la culture (Cohn 2011). Cependant, avec l’avènement du Web, il est possible de remarquer un renouvellement de ce format quant aux réflexions sur l’art. Selon le critique d’art Felipe Scovino (2013), Internet établit un nouvel espace pour la critique brésilienne, ce qui permet d’élargir la place de cette dernière dans le domaine artistique. La publication facilitée par des gestionnaires de contenus et les faibles coûts de maintenance des revues numériques semblent contribuer à ce phénomène. Dans ce contexte, ces publications permettent l’émergence de nouvelles générations de critiques et d’artistes. De plus, le caractère du Web qui traverse facilement les frontières géographiques aide à créer un système d’échanges entre les acteurs de l’art issus de régions distinctes au sein du Brésil. Alors, cette communication se propose d’analyser les caractéristiques générales des publications numériques de ce pays qui ont été répertoriées dans le cadre de ma recherche doctorale. Il s’agit principalement de publications autogérées, participatives et consacrées à l’art actuel.

Qu'arrive-t-il lorsqu'une personne non-voyante ou malvoyante est confrontée à un tableau ? Sachant que les autres sens ne pourront jamais remplacer celui de la vue, quels procédés se mettent en oeuvre afin de pallier à ce manque d'information ? 

Depuis plusieurs années, on observe un changement majeur dans les musées alors que ceux-ci cherchent désormais à s'adresser à une clientèle plus vaste. En effet, l'ocularité, qui guidait traditionnellement l'approche de ces établissements culturels, n'est plus au coeur de leur démarche en termes de médiation. L'emphase est maintenant mis sur une approche dite multisensorielle dans le but de rejoindre les visiteurs qui étaient autrefois catégorisés comme un non-public.

Or, face à la grande variabilité des troubles visuels répertoriés, est-il seulement plausible d'envisager une solution universelle qui puisse garantir un accès multisensoriel aux oeuvres peintes ? De même, quel serait l'impact de l'ajout d'une composante sonore sachant que certaines personnes ont perdu la vue dès la naissance ? Le manque de repères formels et de référents communs ne seraient-ils pas problématiques dans une telle situation ? Avec cette recherche doctorale, je souhaite démontrer que la perception tactile combinée à une traduction multisensorielle des contenus peints pourraient constituer une piste de solution pour l'avenir.

Bien que l'art demeure subjectif en soi, est-ce que la compréhension que nous en avons ne serait ici qu'une question de perceptions ? 

Genre né de la rencontre (imposée par l’exil) au XIXe siècle entre les Garifunas et des populations hispaniques centraméricaines, la paranda connaît aujourd’hui un regain d’intérêt chez les acteurs de la production discographique locale. Depuis son apparition dans les studios d’enregistrement, elle a évolué vers une forme modernisée, faisant appel à des instruments électriques et des procédés de traitement du son caractéristiques des musiques « populaires ». Devenue en 2000 (avec la compilation Paranda; Africa in Central America, produite par Stonetree Records et distribuée par Warner/Elektra) une « musique du monde » sur le marché discographique international, cette nouvelle forme de paranda connaît un succès conséquent dans les palmarès de world music – popularité qui se déploie après coup chez les Garifunas centraméricains, qui redécouvrent un genre jusqu’alors quasiment disparu dans sa version villageoise. 

À partir de l’exemple de la « récupération », à des fins commerciales, d’un genre musical « traditionnel » par un label indépendant centraméricain, cette conférence montre comment un producteur de world music a su se servir du studio d’enregistrement comme d’un outil créatif susceptible de lui ouvrir les portes de l’internationalisation. 

Cette présentation se propose d’interroger une dimension bien précise du paratexte éditorial pouvant sembler périphérique à prime abord : la jaquette (qui se veut, à la base, simple outil de marketing, sa fonction étant « d’attirer l’attention par des moyens plus spectaculaires qu’une couverture ne peut ou ne souhaite s’en permettre » aux dires de G. Genette dans Seuils). Cela dit, plutôt que de considérer la jaquette de strict point de vue de la mise en marché du livre, je pose l’hypothèse qu’elle peut également être investie par l’ethos de l’écrivain et du coup participer à la construction de son identité auctoriale : elle pourrait donc aussi avoir une fonction énonciative.

À partir de l’outillage somme toute récent que mettent à notre disposition l’analyse du discours, la pragmatique littéraire et les théories de l’énonciation, je ferai l’analyse de la jaquette de couverture du livre intitulé Autoportrait (2005, P.O.L) de l’écrivain français Édouard Levé. Comme son titre l’indique, cet ouvrage entreprend de dresser un portrait de la personnalité de son auteur, s’inscrivant par le fait même dans le registre de l’autonarration. Dans cette optique, je postule que l’entreprise d’« individualisation » de Levé sort du cadre strictement scriptural pour en investir également l’espace péritextuel, qui participe, dès lors, à la mise en forme de cet autoportrait au même titre que les énoncés qui le composent.