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Ma communication présentera les principaux axes de réflexion développés dans le cadre de ma maîtrise en études littéraires, qui porte sur le récit de voyage. Considérant celui-ci comme un carrefour discursif, un véritable montage des genres (Pasquali, 1994), j’ai orienté mon cadre méthodologique selon quelques-uns des principes au cœur de la géopoétique. Développée par Kenneth White, cette approche transdisciplinaire propose de décloisonner les savoirs scientifiques, philosophiques, littéraires et artistiques afin de les réunir en une poétique ancrée dans l’existence. Une lecture géopoétique du récit de voyage ressemblerait donc à une forme de compagnonnage (Bouvet, 2008), puisque les lignes de fuite esquissées par l’écrivain-voyageur sont récupérées par le lecteur, qui reconfigure les traces d’une expérience sensible de la terre et nourrit par le fait même son propre imaginaire du voyage (Onfray, 2007). Je concentrerai mon analyse sur Vagabond des mers du sud (1960), Cap Horn à la voile (1967) et La longue route (1971) de Bernard Moitessier, écrivain-navigateur français du XXe siècle. La critique radicale, l’appel du dehors et le mouvement influencent autant la pratique de l’espace que de l’écriture, et posent en quelque sorte les fondements d’un nouveau rapport au monde. Je terminerai en soulignant la perspective géocentrée qu’adopte l’écrivain-voyageur et en observant quelques repères de l’immensité océanique.

Cette présentation fera état de mes recherches qui portent de manière générale sur la constitution du champ de l’art marginal. Afin de mieux cerner cette notion rarement étudiée en histoire de l’art, je me pencherai sur les processus d’identification, de valorisation et de médiation qui lui sont associés. J’observerai d’abord les moments fondateurs de la valorisation de l’art marginal en Europe, notamment la constitution d’importantes collections, dont la Collection d’ Art Brut, développé en 1945 par l’artiste français Jean Dubuffet, qui permirent l’élargissement des frontières artistiques et la légitimation de cet « art ». En effet, ce dernier s’impose de plus en plus comme un champ d’études autonome, particulièrement en Europe et aux États-Unis. On y constate également une institutionnalisation accrue, dû notamment au phénomène d’« artification », que les sociologues Nathalie Heinich et Roberta Shapiro désignent globalement comme le « processus de transformation du non-art en art ». Tandis qu’en Europe et aux États-Unis la scission entre la culture savante et la culture populaire (ou les arts dits mineurs) semble s’estomper, le Québec et le Canada tardent à l’accueillir. Comment expliquer ce décalage entourant le développement des connaissances sur le sujet et son institutionnalisation? Nous verrons que plusieurs facteurs (valeurs nationales, marché de l’art, etc.) viennent entraver sa diffusion, mais qu’en contrepartie, quelques initiatives favorisent son développement. 

Alors que les principes de développement durable, d’écologie du bâtiment et d’efficacité énergétique prennent une place de plus en plus importante dans le design architectural, le CLT, par ses caractéristiques intrinsèques, est un matériau de construction idéal pour une architecture écoresponsable. Cependant, les bâtiments en CLT aspirants à offrir des performances énergétiques intéressantes sont généralement limités par les directives et règles de conception qui n’encouragent que peu les expérimentations formelles qui permettraient d’explorer des stratégies passives alternatives basées sur la forme du bâtiment.


Le projet consiste à démontrer qu’une approche de conception intégrée alliée à la précision et la diversité des éléments issus de la fabrication numérique permet maintenant aux concepteurs d’envisager des formes complexes en CLT sans augmentation significative du coût de production.


La méthode de recherche-création et les simulations rétroactives produites par le logiciel de conception et de modélisation paramétrique 3D permettront de développer un projet d’architecture où les aspects structuraux et les contraintes de fabrication contribuent au processus de conception. Plusieurs itérations du projet seront proposées ayant comme paramètres les composantes architecturales, structurelles et constructives afin de produire un projet singulier. Ses fichiers de découpe seront ensuite générés automatiquement pour un passage direct aux machines-outils à commande numérique.

Ma recherche porte sur l’articulation entre notre contexte naturel, anthropocénique, et le cinéma. Elle s’appuie sur des œuvres expérimentales, contemporaines et internationales dont l’altération de l’image et l’intérêt pour la nature constituent les points de croisement. Elle interroge la capacité de cet art à présenter et exprimer par les altérations des réalités écologiques et à nous y sensibiliser. Pour analyser ces œuvres, j’utilise une méthode alliant des lectures formelle et phénoménologique, distinguant les gestes d’altération et leurs dynamiques. Cette étape détermine l’articulation de ces pratiques avec la nature filmée : les altérations décrivent les espaces, composent un milieu et caractérisent la nature anthropocénique, suscitant une sensibilité écologique qui nous engage dans ces enjeux actuels. Pour prolonger ces résultats et nourrir la problématique, ma réflexion s’appuie sur la philosophie de l’altération mise en écho avec les capacités spatiales, mésographiques du cinéma. Je questionne aussi la nature dans le cinéma expérimental et l’ecocinema, et l’anthropocène au cinéma. Ma recherche ambitionne d’étendre les facultés expressives du cinéma vis-à-vis du vivant en le réfléchissant comme une pratique écologique (participant aux mouvements écologiques), environnementale (nourrissant notre compréhension de l’environnement) et sociétale (disant quelque chose de notre rapport à la nature), pleinement ancrée dans notre actualité.

Depuis quelques années, on assiste véritablement à une fashionisation et une peoplisation du féminisme, et, par la force des choses, à l’apparition d’un nouveau paradigme : le popular feminism, ou féminisme populaire, c’est-à-dire un féminisme qui flirtent étroitement avec les notions de vedettariat, mais aussi de capital et de mise en spectacle. Cette communication s’intéressera, dans un premier temps, à définir succinctement le mouvement du popular feminism. Ce panorama se fera en étroite liaison avec les multiples mouvements du féminisme ayant précédé le popular feminism, afin d’illustrer comment celui s’en détache ou s’y rattache. Dans un deuxième temps, je circonscrirai l’analyse à un champ précis du popular feminism formé d’écrits intimistes ayant remporté un certain succès de vente et étant produits par des femmes médiatiques contemporaines telles que Tina Fey, Amy Poehler, Lena Dunham, Mindy Kaling, Roxane Gay, s’affirmant toutes féministes. Au sein de ce corpus oscillant entre l’autobiographie, l’essai et le journal se retrouvera un élément fédérateur : le corps. Je poserai l’hypothèse que l’attendu de ces textes sera lentement démonté par la place – démesurée – et le traitement – décomplexé – laissés au corps des auteures. Je poserai l’hypothèse que la mise en marché du féminisme pourrait servir de renversement à même la structure qui tente de le domestiquer, et ce, par le biais de la réappropriation que font les auteures de leur corps dans l’écriture.

À l’occasion d’une rétrospective Robert Frank organisée à Paris en 2009, des journalistes ont parlé de «  road-movie photographique ». Cette expression d’apparence absurde, puisqu’elle pose une relation d’égalité entre cinéma et photographie, a le mérite de révéler l’existence d’une forme artistique qui serait en photographie l’équivalent du road movie. Ce genre spécifique et encore peu étudié, que Danièle Méaux nomme “Voyage de photographe”,  pose la question du rapport entre mobilité et fixité de l’image. Si Wenders s’est illustré dans la réalisation de road movies, il mène en parallèle une activité de photographe qui a donné lieu à la publication d'un recueil de photos de la route intitulé Bilder von der Oberfläche der Erde. Cet ouvrage retient notre attention en raison du rapport qu’il instaure entre photographie, errance et cinéma. C’est cette relation intermédiale que nous souhaitons examiner ici. Nous posons que les photos de Wenders sont marquées par un refus de l’illusion du mouvement et qu’elles se distancient de la majorité des œuvres représentatives du genre. Nous établirons ensuite que les photos de Wenders s’inscrivent dans le champ plus vaste de ses productions filmiques, et qu’elles constituent un parcours à la fois rétrospectif et contrapunctique de son œuvre. Enfin, nous verrons que la photographie devient la matière même de ses films, notamment dans Alice in den Städten qui se présente comme une œuvre double, à la fois road movie et Voyage de photographe.

«Le Rêve d’Urmila» explore l'impact de l'hybridation culturelle dans une pratique théâtrale qui marie théâtralité orientale, par le biais du kathakali et l’étude du Natyasastra, et théâtre occidental. Pour ma pièce, j'ai choisi comme personnage principal, la princesse Urmila, une héroïne oubliée du Ramayana. L’épopée de l’Inde classique raconte l'histoire de Rama et de sa femme Sita. Écrit par Valmiki entre le 5e et le 1e AJC, il existe des centaines de versions du mythe. Des versions anciennes et modernes proposent des relectures plus féminines du récit. Le point de départ de ma recherche a été la similitude entre le destin de Pénélope, qui attend le retour d’Ulysse, et celui d’Urmila dont le mari Lakshmana est en exil avec son frère Rama. Suite à l’étude de différentes versions du Ramayana, ma pièce a évolué autour d'Urmila. Mon récit commence là où se termine le récit épique. Devenue veuve, comment réagira Urmila ? À des fins de recherche, j'ai choisi de mettre en scène les huit émotions décrites dans le Natyasastra, traité de dramaturgie de l’Inde, par le biais de figures féminines qui les incarnent telles que Manthara (le dégoût), Surpanaka (la colère) et la Kaikeyi (la peur). La pièce utilise différentes techniques narratives telles que les dialogues, le racontage ainsi que l’utilisation du chœur et du chant pour les textes poétiques. Le spectacle a été présenté à l’Université Laval à l’automne 2018 avec huit artistes, acteurs-danseurs, chanteur, musicien, vidéaste.

Genre né de la rencontre (imposée par l’exil) au XIXe siècle entre les Garifunas et des populations hispaniques centraméricaines, la paranda connaît aujourd’hui un regain d’intérêt chez les acteurs de la production discographique locale. Depuis son apparition dans les studios d’enregistrement, elle a évolué vers une forme modernisée, faisant appel à des instruments électriques et des procédés de traitement du son caractéristiques des musiques « populaires ». Devenue en 2000 (avec la compilation Paranda; Africa in Central America, produite par Stonetree Records et distribuée par Warner/Elektra) une « musique du monde » sur le marché discographique international, cette nouvelle forme de paranda connaît un succès conséquent dans les palmarès de world music – popularité qui se déploie après coup chez les Garifunas centraméricains, qui redécouvrent un genre jusqu’alors quasiment disparu dans sa version villageoise. 

À partir de l’exemple de la « récupération », à des fins commerciales, d’un genre musical « traditionnel » par un label indépendant centraméricain, cette conférence montre comment un producteur de world music a su se servir du studio d’enregistrement comme d’un outil créatif susceptible de lui ouvrir les portes de l’internationalisation. 

En écrivant Dallaire (2008), un double concerto pour violon, percussion et orchestre, la compositrice canadienne Kelly-Marie Murphy s'est inspirée du traumatisme vécu par Roméo Dallaire à la suite du génocide au Rwanda. Dans une entrevue avec Colleen Renihan, elle explique qu'en se basant sur l'histoire du général, elle a exprimé musicalement le cheminement d'un individu aux prises avec une dépression. Les deux mouvements du concerto, Sorrow et Redemption, évoquent respectivement la chute dans la dépression puis l'éventuelle guérison.

L’œuvre peut toutefois être sujette à une interprétation extra-musicale plus détaillée. J'argue que l'emploi de motifs musicaux au violon lors du premier mouvement représente les pensées obsessives qui hantent le narrateur. Au second mouvement, j'examine la façon dont ces motifs se développent et s'assemblent pour créer des phrases musicales plus complexes. Une analyse formelle de Redemption révèle que ces phrases sont modifiées structurellement au cours du mouvement, de manière à illustrer le rétablissement du narrateur. J'analyse également l'interaction des instruments solistes dans l'oeuvre de Murphy. Le violon incarne le narrateur, tandis que les percussions marquent les transitions entre les grandes sections de l’œuvre. Somme toute, je vise à démontrer comment l'emploi de motifs, la structure des phrases ainsi que l'orchestration de Murphy contribuent à exprimer efficacement le programme de Dallaire.

 Tout texte se situe à la jonction de plusieurs textes dont il est à la fois la relecture, l’accentuation, la condensation, le déplacement et la profondeur.[1] Le renouvellement comme survie de l’art concourt à la conception d’œuvres insolites.  À cet effet, Michaux exploite toutes les possibilités qui s’offrent à lui dans ses révélations poétiques. Chez lui, le poème est en mutation continuelle. Suivant une fameuse proposition de Jacques Derrida (1986 : 264) d’après laquelle « tout texte littéraire participe d’un ou de plusieurs genres », nous sommes pour notre part conduit à reconnaître la plasticité générique constitutive de certains discours. En effet, Michaux fait partie des poètes qui considèrent que la poésie ne peut pas se réduire à une forme, à une manière d’écrire, ni à un style. Le vers n’a jamais suffi pour faire un poème[3]. La poésie est l’expression d’un parcours émotionnel qui n’existe que par ses propres normes.  Pour lui, « les genres doivent être épinglés, mimés, utilisés, traversé, transformés, relativisés »[4]. Au lyrisme propre à la poésie, s’ajoutent la description du romanesque, l’onirique du fantastique, la persuasion de l’argumentatif, l’humour du comique.

[1]Philippe Sollers, Théorie d'ensemble, textes réunis, Paris, Seuil, 1971, p. 75.

[3]ROUMETTE Julien : Les poèmes en prose, Ellipses, Paris, 2001, p.3

[4]BELLOUR Raymond : « Introduction », Henri Michaux, OC, I, Paris, Gallimard, 1998, p. XXV.

« La mère porte le fils de l’homme, la sainte lave les péchés. La putain baise la lie de l’humanité. » (Delorme 84). La protagoniste rappelle ici les multiples facettes de la femme : Aimée et aimante, serviable et asservie, elle est à la fois objet et sujet de la sexualité, comme si son genre ne pouvait dépasser son sexe. Cependant, l’auteure, Wendy Delorme (1979*), n’entend pas réaffirmer simplement ces trois visages. A travers son roman (2012), elle raconte la (pro-)création de son futur enfant à qui elle s’adresse directement. Jouant non seulement du « je », elle ajoute un « tu » qui, pas encore né.e, vit déjà à travers Berlin, Paris ou encore Helden. Il s’agit ainsi moins de décrire l’enfantement et la grossesse que de perturber la normativité des trois visages : La femme ne porte pas l’un ou l’autre. Elle se masque de tous pour démasquer une société binaire, laissant à son « presque-garçon » le choix du genre peu importe son sexe. C’est là tout l’intérêt de ce dialogue qui veut apporter un nouveau savoir à cette société : celui de la non-importance du genre. La protagoniste semble également renaître à travers cette intro-/extrospection, se libérant des catégories. Le roman de Delorme soulève donc la question de la perturbation des normes par la renaissance de son personnage principal. Je présenterai la déconstruction des trois visages donnés à la femme (genre et corps) dans le but d’en relever la signification en deux temps : celui du dialogue et celui de la renaissance.

La science-fiction, par sa capacité à transgresser les frontières entre sciences et fiction, ses temporalités multiples et son traitement du changement global, devient pour les chercheurs une voie privilégiée dont ils font usage. L’objectif de cette communication est d’analyser l’Anthropocène au prisme des dialogues entre sciences et fictions, rompant avec le « grand partage » entre chercheurs et auteurs.

Dans une perspective diachronique et critique d’un corpus francophone, nous nous concentrerons dans un premier temps, sur ce qui constitue les bases fertiles d’un dialogisme entre science et fiction : l’appel aux récits et l’attention nouvelle aux futurs. Nous analyserons ces processus à travers l’imaginaire spéculatif chez Debaise et Stengers. Nous soulignerons ensuite la critique de la notion de progrès à travers deux formes d’usages de la S.F. : la réinterprétation d’un texte Bradley chez Hache et la rupture science-fictionnelle chez Latour. Enfin, nous analyserons la façon dont les chercheurs font usage de la S.F. pour « conjurer » la fin des temps, au regard des textes de Engélibert, Rumpala, Citton et Rasmi.

Notre démarche interdisciplinaire mêle analyse historique et études littéraires. Nous proposons ainsi une mise en regard de l’Anthropocène au prisme de l’analyse des dialogues entre sciences et fiction. En quoi le changement global et le tournant cosmologique qui lui est associé constituent-t-ils un levier de la fin du grand partage entre science et fiction ?

La cuisine créole offre une richesse, une variété, une hétérogénéité de saveurs et de goûts dont la fécondité contribue à enrichir l'expérience littéraire. Depuis longtemps les corrélations entre la littérature et la gastronomie sont fréquentes. Toutefois,  ces rapports sont peu explorés en ce qui a trait au champ littéraire haïtien.  Nombre d’écrivains mettent en scène la cuisine haïtienne. Pourquoi l’évoquent-ils ? Que mange-t-on dans le roman en provenance d’Haïti ? Quelles sont les répercussions esthétiques et métaphoriques des savoir-faire culinaires ? Répondre à ces questions implique de sonder le contexte d’émergence de ces œuvres. Immanquablement, notre réflexion s’accompagnera d’interrogations d’ordre historique, politique, social et économique. La cuisine, un des beaux-arts,  devient-elle une des formes du style de l'écrivain ? La présente étude a pour but d’analyser la pluralité des pratiques culinaires chez quelques auteurs haïtiens : Jacques Stephen Alexis, Jacques Roumain,  René Depestre, Yannick Lahens et Michel Soukar.



À l’aube de la Révolution tranquille, Gabrielle Roy écrit De quoi t’ennuies-tu, Éveline?, dont la publication n’aura lieu qu’en 1982. Quelques années plus tôt, Gérard Bessette publie La Bagarre (1958), roman dont le protagoniste, comme Éveline dans le récit de Roy, est enlisé dans une existence terne. Pourtant, alors qu’Éveline parvient sans difficulté à sauter dans l’autobus pour partir à l’aventure, et enchante les autres passagers par ses anecdotes malgré la barrière de la langue, Lebœuf, lui, se retrouve Gros-Jean comme devant à la fin de La Bagarre, préposé à l’entretien de wagons stationnaires, ses ambitions littéraires déçues notamment à cause de son style maladroit. D’une part, la naissance d’un récit, d’autre part, un récit avorté. Pourquoi une vieille dame souffreteuse réussit-elle là où un jeune Rastignac échoue? L’approche narratologique offre des pistes d’analyse intéressantes pour cette comparaison inédite, qui jette un nouvel éclairage sur deux textes en apparence bien différents. En particulier, la description des rapports à la langue et au public révèle un ensemble de facteurs qui, dans un cas, permet à Éveline d’échapper à la grisaille de la vie quotidienne et de frapper l’imaginaire de ses compagnons de route, et dans l’autre cas, étouffe les aspirations créatrices de Lebœuf, le réduisant à un état de soumission placide auquel son nom à consonance bovine semblait le prédestiner.

La Revue canadienne est une revue savante et littéraire, publiée entre les années 1864 et 1922. Elle est financée par Eusèbe Senécal, un jeune imprimeur-éditeur de Montréal, fondateur et propriétaire de cette publication. Le premier comité de direction (ou rédaction), est composé de 10 membres qui assurent le programme éditorial. Dès le début de l’aventure, les objectifs du comité et du propriétaire de la revue sont très clairs: mettre en place un organe de diffusion qui servira autant la cause de la littérature et des connaissances dites morale que celle de l’édification d’une conscience nationale francophone en Amérique. Le programme est ambitieux.

 

Pour cette communication, je présenterai la première décennie de la Revue canadienne, de 1864 à 1874, qui correspond  aux années où Eusèbe Senécal en est le propriétaire. Dans un premier temps, j’exposerai les sources consultées pour la réalisation de cette recherche. J’expliquerai ensuite le contexte historique dans lequel prend forme et évolue ce périodique, l’approche éditoriale de son comité de direction ainsi que l’administration de la revue. Enfin je brosserai un tableau des nombreux auteurs qui ont collaboré à la Revue canadienne pendant cette période.

La motivation est un concept polysémique et difficile à définir car il ne s’agit pas d’une réalité directement observable. Dans le sens commun, une personne qui passe de longues heures à pratiquer une activité de loisir est considérée très motivée. Pourtant, cette constatation est incomplète: nous ne savons pas si elle est motivée intrinsèquement ou extrinsèquement face à l’activité. Autrement dit, il est nécessaire de déterminer si elle la pratique par plaisir ou pas. En plus d'influencer l'intensité d'un comportement, la motivation peut le déclencher (i.e. dynamiser le comportement), le diriger (i.e. orienter la personne vers un comportement précis) et en favoriser la persévérance (i.e. pousser une personne à poursuivre une activité; Vallerand et Thill, 1993).

L’étude de la motivation en loisir paraît toute indiquée pour mieux comprendre pourquoi une personne s’engage ou pas dans la pratique d’une activité et à quel degré d’intensité (pratiquant fervent ou occasionnel). Dans le cadre de cette présentation, nous résumons la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (1985, 1991) en l’appliquant au domaine du loisir à l’aide de quelques recherches pertinentes dans ce secteur. Plus précisément, nous exposons l’approche de Deci et Ryan (1985, 1991) et celles qui ont été inspirées par la théorie de l’autodétermination, soit le modèle hiérarchique de la motivation intrinsèque et extrinsèque de Vallerand (1997) et le modèle dualiste de la passion de Vallerand et al. (2003).

Albert Cossery (1913 – 2008), auteur égyptien qui fait « entendre la langue arabe dans le français », a dépeint une Égypte immuable en proie à la corruption et au mensonge. L’auteur s’exprime par la bouche de héros marginaux ou délinquants, des êtres flamboyants pour qui la seule réponse à la comédie du pouvoir est la dérision. Qualifié de visionnaire du Printemps égyptien de 2011, Cossery ne croit pas à la révolution ; il vante la sagesse populaire, mais sa peinture crue du « peuple » cairote lui vaut d’être taxé de cynisme par certains. Ses représentations de la femme, presque invariablement dépréciatives, ont suscité peu de critiques en France – statut d’auteur culte oblige –, mais choqué dans le monde anglo-saxon. En 2009 et 2010, trois œuvres de Cossery ont été traduites en anglais et publiées chez des éditeurs new-yorkais cotés. Les traductrices, enthousiastes devant le style, les intrigues et les personnages, ont pourtant systématiquement adouci, voire partiellement censuré des propos de la narration portant sur les femmes et sur le « peuple ». À la lumière de l’analyse de la réception critique des œuvres de Cossery en France – foyer de la génétique littéraire – et dans le monde anglo-saxon – où domine l’approche postcoloniale –, je montrerai que les traductrices, négociant leur loyauté entre l’auteur et l’institution littéraire à laquelle elles appartiennent, ont tenté de rendre Albert Cossery plus acceptable dans la culture réceptrice en infléchissant sa « voix ».

Publié en 2006 sous le thème «La résistance culturelle», le numéro 273 de la revue Liberté marque l'arrivée d'un nouveau groupe d'intellectuels au sein du comité de rédaction. Je me propose d'analyser la mise en place, par le manifeste «Assoiffés de sens», d'un discours de la résistance. Celui-ci se fonde sur une double stratégie discursive: le comité de rédaction construit d'abord un ethos de la lutte; il s'inscrit parallèlement dans la filiation des intellectuels engagés d'ici et d'ailleurs. En m'appuyant sur les travaux de Ruth Amossy, je retracerai les subjectivèmes et les désignations collectives afin de définir le «nous» de Liberté. La rhétorique du manifeste étant en lien étroit avec l'ethos de la lutte, je plongerai au cœur du discours afin d'en dégager la structure ainsi que les couples axiologiques (Marc Angenot, La parole pamphlétaire). Avec «Assoiffés de sens», les membres de Liberté dépassent le projet des fondateurs de la revue pour effectuer une prise de position politique et esthétique. À l'instar des écrivains existentialistes des Temps modernes, des signataires du Refus global et des intellectuels des années soixante, ils arriment l'art au politique. Je conclurai en démontrant que la valorisation de ces filiations participe d'un refus de l'ère du désenchantement; combinée à l'ethos de la lutte, elle permet l'écriture au présent d'un nouveau Grand Récit, celui d'une communauté d'«assoiffés de sens».

Niranjana décrit l’idéologie comme une « confusion  de la linguistique avec la réalité naturelle » (de Man in Niranjana 1992, 171). Slavoj Žižek la définit comme un « fantasme inconscient qui structure la réalité sociale » (García et Sánchez 2008). Le « projet scientifique occidental » actuel et sa modernité sont une grossière « simplification » et une « mutilation » de la réalité (Marais 2014, 19), un fantasme, une idéologie. L’État moderne, les prétendues démocraties libérales et la modernité occidentales sont idéologiques. Essentiellement, nous tenterons, dans notre communication, de remettre en question les visions du monde hégémoniques qui construisent notre discipline et le projet impérialiste sur lequel la traductologie repose.

Plus précisément, nous chercherons à définir ou à esquisser les contours de possibles définitions de la traductologie de la libération. Nous nous appuierons sur les concepts de radicalisation et de déterritorialisation (Deleuze et Guattari 1980) dans une démarche d’épistémologie politique (Latour 2005, 249) et d’internationalisation de la traductologie, discipline qui se fera, par al même occasion, cheval de Troie au sein du projet hégémonique occidental. Nous nous inspirons aussi du concept de « zone autonome temporaire » (Bey 1985) et de formes de savoir non-rationnel, non-occidental des traditions ésotériques et mystiques, qui constitueraient une « histoire intellectuelle cachée de l’Occident » (Wilson 2018). 

Conservation et développement soulèvent d’importantes questions sur l’équilibre socio-environnemental vital pour la société. Un constat de déséquilibre a été établi entre valeur d’usage et valeur d'échange.L’espace urbain, est confronté à un double défi, du fait qu’il doit tenir compte à la fois de ce qui existe et d’une projection réfléchie de son extension garante de sa durabilité, principe cardinal régissant toute société humaine. Dès lors, on ne peut que s’interroger sur la capacité du domaine de la conservation du patrimoine à intégrer les valeurs d’usage subordonnées aux valeurs d’échange. Projet et développement urbains censés conserver le patrimoine, gagneraient à être soutenus par une évaluation urbanistique basée sur l’approche par les valeurs, permettant d’établir la signification du lieu qu'attribue la société urbaine au lieu. Il y a cependant lieu de s’interroger : Que signifie l'espace, en liaison avec le temps historique et vécu ? et comment mobiliser sa signification pour la promotion de l’urbain ?

Nous aborderons ces questions dans une optique anthropologique et historique à travers une étude de cas : La place Fontaine de Fouara dans le centre historique de Sétif -Algérie-. Nous cernerons les limites de notre démarche qualitative et déterminerons des orientations possibles. Nous escomptons que ces recherches intéressent toute personne œuvrant dans le domaine de la gestion de la ville.

Mots clés : Espace- société urbaine- conservation- développement- durabilité

La « révolution numérique » a causé nombre de bouleversements dans l’industrie cinématographique, d’abord pour les manières de faire des techniciens, mais également pour l’ensemble de l’organisation du travail dont la nouvelle répartition des tâches a affecté toute la chaîne des métiers. Réciproquement, les technologies numériques se sont vues façonnées par les mutations dont elles ont été elles-mêmes, à l’origine, prises dans une histoire collective implicite et riches de circulations et d’hybridations.

Pour mettre les innovations technologiques au service de pratiques improvisées propres à son mode de réalisation, Abdellatif Kechiche bouscule les habitudes de production, établissant ses propres conditions et temporalités de travail, jusqu’à parfois jouer avec le cadre légal. L’organisation du travail spécialement aménagée par le cinéaste révèle comment les structures socioéconomiques de production jouent un rôle essentiel dans le développement de l’innovation technologique et leur pratique.

Les résultats finaux présentés au cours de la présente communication reposent sur une reconstitution de la méthode d’Abdellatif Kechiche à partir de 46 entretiens avec ses collaborateurs et plus de 200 archives. Par la manière dont il problématise la technique par l’entremise d’un regard historique, technico-professionnel et socioculturel, ce projet de recherche participe au vaste projet historiographique actuel autour des techniques et technologies du cinéma à l’ère du numérique.

Comme le démontre les travaux de Marina Warner, l'association entre femme et Justice est une paire symbolique fortement récurrente à travers l'imaginaire occidental. C’est pourquoi, en retenant cette compréhension de la symbolisation de la forme féminine, nous avançons que la figure guerrière de la culture populaire contemporaine représenterait un signe s’intégrant dans un discours plus vaste sur la légitimité de la violence. Parce que ces guerrières incarnent la courroie de transmission d’un questionnement diégétique sur les rapports de pouvoir et les inégalités sociales, nous proposons une compréhension des œuvres en tant que discours articulant une ontologie de la violence, une remise en question de ses fondements et de ses expressions. Dans le cadre de cette communication, nous observerons le cas de Brienne of Tarth, combattante issue de la franchise Game of Thrones. Notre méthodologie entend que le discours de l’œuvre consiste en une production conjointe d’un texte et d’un intertexte imagé. Dans ses versions littéraire et télévisuelle, nous verrons donc comment l’iconographie du personnage véhicule l’idée d’une guerre juste et vertueuse, principe même gouvernant la quête de Brienne à travers le récit. Nous examinerons précisément en quoi sa représentation du corps féminin armuré de pied en cap, un corps imperméabilisé et solidifié, convoque une allégorie visuelle classique de la Justice contribuant à soutenir le propos du texte.

Impression III (Concert) est un tableau de Vassily Kandinsky peint en 1911 et désormais conservé à la Lenbachhaus de Munich. Cette peinture, au bord de l’abstraction, représente la première confrontation de l’artiste avec la musique atonale d’Arnold Schönberg lors d’un concert à Munich le 2 janvier 1911. Alors que l’abstraction picturale et la musique atonale ont été largement étudiées dans le milieu universitaire, je propose ici un examen minutieux du tableau de Kandinsky et de deux esquisses préparatoires (Musée national d’Art moderne, Paris) que je rapproche des morceaux joués lors de cette soirée décisive pour l’amitié entre les deux artistes. À l’aide d’études portant sur la réception psychologique de l’atonalité (Fred Lerdahl et Ray Jackendoff, 1983 ; Michel Imberty, 1993), d’articles du début du XXe siècle témoignant de la perception de l’œuvre de Schönberg sur le public de l’époque, et des théories de la mémoire musicale (W. Jay Dowling, Barbara Tillamm et Dan F. Ayers, 2001), je postule que le concert de janvier 1902 n’est pas à proprement parler le sujet d’Impression III (Concert). Cette œuvre relève précisément de la perception sensorielle que Kandinsky en a eu et des souvenirs qu’il en a gardé. Ainsi, dans une perspective de synthèse des arts, la transcription picturale de l’atonalité de Schönberg s’ancre dans une dimension profondément intime et personnelle.

Cette communication présentera quelques éléments de réflexion concernant la relativité de l’identité à l’ère des réseaux sociaux. En nous appuyant sur l’exemple du blogue  A Gay Girl in Damascus, nous analyserons plus particulièrement le mode de production de connaissances par la publication d’une œuvre de fiction en ligne. Nous étudierons également  son mode de réception et ses implications, alors que celle-ci, quoique constituée de documents apocryphes et d’une fausse identité, a été perçue comme authentique.

Une analyse sémiotique permettra d’établir des relations entre le sujet du récit, la jeune Amina, une activiste lesbienne qui aurait été kidnappée en Syrie, et les composantes de l’environnement transmédiatique dans lequel les événements ont été relatés.

À partir de cet exemple, nous verrons que la notion d’identité 2.0 est fragmentaire et tributaire d’une herméneutique culturelle, son interprétation relevant tout autant de l’Histoire, de la mémoire collective que du récit.

Le père jésuite Joseph de Jouvency n'a jamais été en Nouvelle-France, ce qui ne l'a pas empêché d'écrire en 1710 De regione et moribus canadensium seu barbarorum Novae Franciae, texte basé en grande partie sur les Relations des jésuites qui décrit la faune, la flore et les mœurs des "Sauvages" de Nouvelle-France. Mais comment l'auteur décrit-il les Amérindiens qu'il n'a jamais vus? Pourquoi avoir publié un tel texte plus de trente ans après la fin de la publication des Relations?

Pour répondre à ces questions, je vais d'abord faire un bref survol du but des Relations et de la description des Amérindiens y étant faite. Ensuite, je traiterai de la vision des "Sauvages" dans le texte de Jouvency. Enfin, grâce au contexte historique et à l'analyse de la fin du De regione, je poserai quelques hypothèses pour expliquer pourquoi Jouvency a publié son texte.

Selon mes premiers résultats, il semble que Jouvency soit, à l'instar de plusieurs missionnaires, assez ouvert aux Amérindiens pour leur trouver non seulement des défauts, mais aussi plusieurs qualités. Le jésuite a probablement écrit De regione à la fois pour répondre à la demande d'un public intéressé aux mœurs étrangères, mais aussi pour faire de la propagande à la Compagnie de Jésus.

À la suite de travaux comme ceux d'H.J. Westra, mon projet va contribuer à faire avancer la recherche à propos de ce texte peu étudié jusqu'à récemment.