Désert. Poussière de désert. C’est en ces termes que David Lapoujade, dans le commentaire qu’il propose de la philosophie deleuzienne, qualifie ce « paysage d’avant l’homme, en l’absence de l’homme » que Deleuze n’a eu de cesse de définir conceptuellement sous des formes diverses et variées. Champ préindividuel, corps sans organes, plan d’immanence, image-mouvement, matière-écoulement, espace lisse, chaosmos, autant de différenciations conceptuelles d’une seule et même intuition philosophique. L’homme-sujet n'est donc pas chez Deleuze la coordonnée originaire du monde. Non, il est second dans l’ordre du monde. C’est pourquoi il doit être défaitst, littéralement délitést, pour qu’émerge et apparaisse dans son en-soi la terre désertique originelle et sans fond sur laquelle il a pu se constituer à titre de de résultante, terre monadique tout autant que nomadique.
Or, comment Deleuze pense et conçoit ce « monde d’avant l’homme », cet univers désertique a-subjectif et a-centré ? Et quelle est la nature empirique de ce sol a-vitalisé sur lequel l'homme va surgir ? Autrement dit, par quel procédé de « dé-désertification » l’homme est-il possible ?
Notre communication, libre, se propose de repérer et de commenter les grandes étapes de cette [dé-]construction philosophique. Loin d'en définir généalogiquement toutes les variations conceptuelles, nous nous proposons seulement de nous arrêter sur quelques concepts centraux (Idée, CsO et image-mouvement) de cet itinéraire philosophique.