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Sedami Gnidehou, Université de l'Alberta, Srilata Ravi,

Saviez-vous qu’il y a près de 500 cas de paludisme « importé » recensés au Canada chaque année? Le paludisme importé ou paludisme associé aux voyages est un problème de santé qui doit être pris en considération au Canada. Aussi bien les immigrants originaires des zones endémiques, que les Canadiens qui voyagent dans les régions où sévit la maladie, sont à risque d’exposition palustre. 

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Sedami Gnidehou et Srilata Ravi, Université de l'Alberta. Source : auteures
 

La santé derrière les barrières linguistiques et culturelles

Notre équipe de recherche s’intéresse plus particulièrement au paludisme importé dans la communauté africaine francophone en Alberta. Interdisciplinaire, cette équipe est composée d’une biologiste (Dr. Sedami Gnidehou), d’une spécialiste en études culturelles (Dr. Srilata Ravi), de deux cliniciens (Dr. Michael Hawkes : Université de l’Alberta et Dr. Denis Vincent : praticien, Edmonton), et d’un organisme communautaire (Centre d’Accueil et d’Établissement du Nord de l’Alberta).  

Le but du projet est 1) d'évaluer les connaissances sur le paludisme (malaria) importé et les comportements de santé des immigrants francophones originaires de l’Afrique Sub-saharienne et 2) de déterminer l'impact de la barrière linguistique, des pratiques prémigratoires et des attitudes culturelles sur la gestion du paludisme importé par ces immigrants. Notre étude est une première dans l'Ouest canadien, et elle sera d’un grand intérêt pour l’ensemble de la francophonie. 

Notre projet de recherche est d’abord axé sur les immigrants africains francophones en milieu minoritaire en Alberta, car cette population est en croissance, et elle joue un rôle de plus en plus important dans la francophonie et dans l’économie canadienne. Les résultats permettront, d'une part, aux décideurs en politique de santé publique locale d'avoir accès à des données qui permettront de mettre à jour et/ou d’améliorer la prévention, le diagnostic et le traitement du paludisme dans l'Ouest canadien. Aussi, nous aurons une meilleure compréhension des effets de la barrière linguistique et des expériences prémigratoires dans la gestion de la maladie. Enfin, les résultats permettront d’évaluer l’offre active et la nécessité d’offrir les services de santé en français dans l’Ouest canadien, ce qui est très important pour les francophones qui font de plus en plus face à une marginalisation dans cette région.

Une augmentation significative en Alberta, plus précisément dans la ville d’Edmonton, des immigrants africains francophones provenant de régions où sévit le paludisme, a été rapportée ces cinq dernières années. Et ce nombre de ces immigrants est amené à augmenter dans les années à venir. Cependant, il existe très peu de connaissances sur la gestion du paludisme par ces immigrants africains en milieu francophone minoritaire en Alberta.

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Frottis sanguin révélant la présence du parasite. Source: Wikimedia Commons. 

Mortel mais non contagieux

Le paludisme est une maladie mortelle causée par des parasites transmis à l'humain par les piqûres de moustiques anophèles femelles infectés. Le paludisme est causé par différentes espèces de parasites du genre Plasmodium (P.). Toutefois, P. falciparum est l'espèce responsable de la forme la plus létale de la maladie. L'Organisation mondiale de la santé estime que plus de trois milliards de personnes sont exposées au risque d'infections palustres, et l'Afrique subsaharienne est la région la plus affectée. La maladie se caractérise par une variété de symptômes, dont une fièvre cyclique de plus de 38°C, de la fatigue et de l'anémie qui, à son tour, peut provoquer des dommages aux organes et même la mort. 

Plus de 500 cas de paludisme importé sont rapportés chaque année au Canada. Les immigrants (nouveaux arrivants et résidents établis) originaires d'Afrique subsaharienne sont les principales cibles de la maladie. Plus de 65 % des cas y ont été diagnostiqués. Le paludisme est curable. Cependant, malgré les progrès, il représente une menace pour la santé des immigrants en raison de perceptions erronées du risque, de la perte de la protection acquise antérieurement, d'une préparation inappropriée avant un voyage en zone endémique et des difficultés à avoir des rendez-vous dans les centres de voyages qui sont souvent débordés.

Une augmentation significative en Alberta, plus précisément dans la ville d’Edmonton, des immigrants africains francophones provenant de régions où sévit le paludisme, a été rapportée ces cinq dernières années. Et ce nombre de ces immigrants est amené à augmenter dans les années à venir. Cependant, il existe très peu de connaissances sur la gestion du paludisme par ces immigrants africains en milieu francophone minoritaire en Alberta. Notre hypothèse est qu’en plus de la perception erronée des risques de la maladie, celle de l’immunité, la mauvaise connaissance des symptômes de la maladie, la préparation inappropriée aux séjours en zones endémiques, la barrière linguistique et certaines considérations culturelles seraient des facteurs critiques qui influenceraient le type de prise en charge de la maladie par les immigrants africains francophones.

Un des aspects importants de cette étude est la collecte des données auprès de 384 individus dans la population cible. Cette dernière représente un défi majeur pour diverses raisons. Dans un premier temps, nous avons noté une crainte de la part de certains immigrants africains francophones. Elle s’expliquerait par la peur de se voir stigmatisé par la population d’accueil même si le paludisme n’est pas une maladie contagieuse. Certain(e)s immigrant(e)s francophones ont même suggéré que les données de cette étude pourraient être à l’origine de refus d’octroi de visa et de difficulté d’intégration. Dans un deuxième temps, les perceptions parfois erronées des immigrants eux-mêmes envers les maladies infectieuses, et le risque par rapport à soi sont des éléments à prendre en considération. D'où l’importance d’organiser des ateliers d’informations pour rassurer les participant(e)s volontaires, mais aussi de recueillir les informations sur les expériences prémigratoires des immigrants africains francophones.  

Les résultats de cette étude en cours sont vivement attendus. Ces données nous permettront de mieux caractériser les défis de santé d’une catégorie de population qui joue un rôle de plus en plus majeur dans la francophonie canadienne. 

Les résultats de cette étude en cours sont vivement attendus. Ces données nous permettront de mieux caractériser les défis de santé d’une catégorie de population qui joue un rôle de plus en plus majeur dans la francophonie canadienne. 

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  • Sedami Gnidehou
    Professeur·e d’université
    Université de l'Alberta

    Sedami Gnidehou est professeure adjointe en biologie au Campus Saint-Jean de l'Université de l'Alberta depuis 2015. Elle est détentrice d’un doctorat en biologie moléculaire et endocrinologie, « Identification et caractérisation biochimique d’un nouveau gène thyroïdien, l’iodotyrosine déhalogénase 1 (DEHAL1) » de l’Université Paris XI (Paris-Sud), 2002-2005. Les intérêts en recherche du Dr. Gnidehou relèvent de la santé publique et sont principalement axés sur les maladies infectieuses des femmes enceintes dans les pays en voie de développement, et leurs conséquences sur la grossesse, la mortalité maternelle et néo-natale. Dr Gnidehou a travaillé sur le paludisme pendant plus de sept ans, en Afrique et, plus récemment, en Amérique du Sud.

  • Srilata Ravi
    Professeur·e d’université

    Dr. Srilata Ravi est professeure titulaire à la Faculté Saint-Jean de l'Université de l'Alberta. Elle est Directrice de l'Institut Marcelle et Louis Desrochers pour le patrimoine et les recherches transdisciplinaires en francophonies (IMELDA). Son principal champ d’intérêt est la francophonie internationale comparée. Ses travaux sur le colonialisme, le post-colonialisme et la mondialisation dans la francophonie indien-océanique, africaine et canadienne sont publiés chez les maisons d'éditions prestigieuses et dans les revues scientifiques internationales importantes.  Elle a publié plusieurs livres, dont Autour de l’œuvre d’Yvan Lamonde. Colonialisme et modernité au Canada depuis 1867 (2019, avec Couture et Pageau); Sports, modernité et réseaux impériaux : Napoléon Lajoie, Kumar Shri Ranjitsinhji, baseball et cricket au tournant du XXe siècle (2017, avec Claude Couture);  Translating the Postcolonial in Multilingual Contexts (2017, avec Judith Misrahi-Barak); Imaginaires collectifs, interculturalisme et histoire-Autour de l’œuvre de Gérard Bouchard (2015, avec Claude Couture); Rethinking Global Mauritius-Critical Essays on Mauritian Literautres and Cultures (2013); Écritures mauriciennes au féminin : penser l'altérité (2011 avec Véronique Bragard); Rainbow Colors-Literary Ethno-topographies of Mauritius (2007).

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