Les thèses des plus importants philosophes rationalistes sont bien connues au sein de la littérature propre aux champs de la philosophie de l'éducation et de la pédagogie: les réputations de Socrate et Platon, comme premiers penseurs des finalités de l'éducation, ou encore de Descartes et Kant, comme précurseurs d'un innéisme aux fondements des sciences cognitives influentes en psychopédagogie, ne sont certes plus à faire au sein de ces disciplines. Pourtant, une question fondamentale échappe à l'ensemble de leurs théories respectives: en effet, la tradition philosophique rationaliste, à l'exception de quelques contemporains, ne reconnaît point à l'enfant le statut d'être rationnel, et ce, de Platon à Leibniz, d'Aristote à Habermas. Dès lors, comment évaluer cette tradition et son impact sur l'éducation occidentale, considérant sa négation partagée de l'enfance comme période rationnelle? Aux fondements de nos traditions éducatives, comment concilier le paradoxe d'une éducation à la Raison qui suppose, de façon contradictoire, que la rationalité est innée, mais que l'enfant et l'élève ne la possèdent pas? À la lumière de récentes recherches en psychologie de l'enfance, cette communication propose, en lien avec les conclusions de notre recherche doctorale, le renouvellement urgent d'une tradition qui, malgré son influence sur la pensée éducative, participe à la prolongation d'une asymétrie autoritaire entre le maître connaissant et l'élève inférieur, « troué », irrationnel.