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Mélissa Thériault, Université du Québec à Trois-Rivières

« Il faudrait que… », ce sont des mots que j’essaie d’éradiquer de ma vie : je préfère que les choses aboutissent, quitte à ce que ce soit imparfait.

Melissa Thériault
Mélissa Thériault, Entreprendre des études supérieures? Carnet de réflexions, 2021, 60 p. ISBN: 978-2-9819846-0-9.

« Il faudrait que je mette tous ces trucs ensemble, ça pourrait être utile! »; c’est là ce que je me dis depuis que j’enseigne Projet de rédaction de mémoire. Dans ce séminaire visant à aider les nouveaux-elles candidat-e-s à la maîtrise à formuler leur projet de deuxième cycle, je n’hésite pas à aborder des sujets névralgiques sur lesquels les étudiant-e-s n’ont pas toujours la possibilité d’échanger avec leur direction de recherche. Par exemple, nous abordons les aspects psychologiques ou financiers de la rédaction : pourquoi manque-t-on de motivation même pour un projet qui nous tient à cœur? Comment se fait-il qu’on procrastine alors qu’on porte le plus grand intérêt au sujet choisi? Quels sont les impacts sur la santé (mentale, financière) à long terme? Est-ce que le sentiment d’isolement est normal? 

Je possédais beaucoup de notes de cours, je cumulais des trucs et conseils, et j’avais à cœur d’aider. Je me disais: « un jour je mettrai tout ça en forme et je le ferai éditer », mais entre-temps, il y a eu la pandémie. La situation était sans précédent et du côté étudiant, on se posait souvent la question suivante : Est-ce que je dois entreprendre des études de deuxième cycle? Est-ce la bonne décision? Je recommande toujours de noter ses réflexions sur papier, même si ce n’est pas la tendance actuelle, parce que griffonner librement entraîne davantage de spontanéité, donc plus de franchise : c’est ainsi qu’on arrive à mieux saisir ce que l’on cherche vraiment.

Alors, j’ai eu envie de mener une expérience : et si au lieu d’attendre les réponses des éditeurs, je produisais moi-même cet ouvrage? J’ai donc laissé cours à mon côté bricoleur et opté pour la formule DIY (Do It Yourself) en publiant un carnet autoédité (c’est-à-dire payé de ma poche), ce qui me rend libre de l’offrir gratuitement à mes étudiant-e-s de l’UQTR qui en feront la demande, et de la vendre au public au prix modique de 7 $, frais d’impression et de poste inclus.

Ce 7 $, c’est le prix d’un smoothie ou d’un café spécialisé (avec le pourboire, disons!). Le carnet a pu être produit à coût faible parce qu’il y a eu une part de travail invisible, un enjeu auquel les chercheuses féministes nous ont sensibilisés. Sans les conseils précieux et les petits coups de pouce des proches pour certaines tâches – cueillir les copies chez l’imprimeur, par exemple, et ainsi réduire les coûts de production –, cela n’aurait pas été possible. 

Alors, j’ai eu envie de mener une expérience : et si au lieu d’attendre les réponses des éditeurs, je produisais moi-même cet ouvrage? J’ai donc laissé cours à mon côté bricoleur et opté pour la formule DIY (Do It Yourself) en publiant un carnet autoédité (c’est-à-dire payé de ma poche) [...]

Pourquoi l’autoédition?

J’ai le plus grand respect pour le travail d’édition : c’est ce qui fait souvent la différence entre une bonne idée à développer et un écrit rigoureux dans sa forme et son fond. On dit que deux têtes valent mieux qu’une, et c’est d’autant plus vrai pour le processus éditorial. Quand une équipe aide non seulement à faire aboutir votre projet, mais aussi à le porter plus loin que prévu initialement, c’est formidable. Toutefois, selon le domaine ou le type de publication, le processus peut être très lourd : il arrive parfois que de concession en concession, votre projet devienne celui de quelqu’un d’autre. 

Par ailleurs, trouver la bonne équipe éditoriale peut être ardu. Si vous n’êtes pas une figure connue, on hésitera à vous faire confiance : les coûts de production des livres font en sorte qu’il y a peu de prise de risques. Or, j’enseigne à de très petits groupes, dans un tout petit département; mes projets ne sont pas très lucratifs pour un éditeur… 

Dans le cadre de mon enseignement, je me suis intéressée aux circuits alternatifs de publication et aux mécanismes qui bloquent ou facilitent la diffusion des productions imprimées. L’édition est un secteur commercial très subventionné où la rentabilité reste un défi. Pour sa part, le milieu universitaire fonctionne beaucoup avec le prestige, la validation par les pairs et la reconnaissance symbolique. Par ailleurs, l’autoédition est souvent associée à l’amateurisme, et donc très mal perçue. C’est d’autant plus ironique que nous savons bien qu’être publié, ou pas, ne dépend pas forcément du potentiel du projet ou de la qualité de l’ouvrage. Certains groupes ont davantage accès aux circuits de publication que d’autres : là aussi, il y a un gender gap et d’autres formes de disparités.

Pour ma part, je vois dans l’autoédition le moyen de faire aboutir des projets relativement modestes autrement condamnés à couler lentement au fond des boîtes courriel des éditeurs. Pour ce type de production, qui n’est ni de la recherche scientifique, ni de la vulgarisation, mais bien un partage de trucs du métier, un circuit alternatif d’édition m’a paru adéquat. Procéder ainsi a fait en sorte que tout était prêt pour le partage… en quelques semaines.

Pour ma part, je vois dans l’autoédition le moyen de faire aboutir des projets relativement modestes autrement condamnés à couler lentement au fond des boîtes courriel des éditeurs. Pour ce type de production, qui n’est ni de la recherche scientifique, ni de la vulgarisation, mais bien un partage de trucs du métier, un circuit alternatif d’édition m’a paru adéquat.

Quelle urgence?

Pour ce projet-là, la conjoncture était bonne : en cette fin de pandémie où plusieurs étudiant-e-s se demandent s’il est judicieux de poursuivre leur parcours ou non, je ne pouvais pas et ne voulais pas attendre des mois, voire des années, pour une éventuelle publication de mes conseils sur le passage vers les études supérieures. Beaucoup de personnes craignent une rentrée partiellement à distance ou ont remis en question la poursuite de leurs études à la suite de l’année 2020-2021. Dans mon carnet, je les invite à réfléchir aux motivations profondes et aux éléments qui peuvent interférer dans leur décision. L’été est une saison idéale pour prendre du recul… et quelques notes sur papier.

Il s’agit d’un premier essai, en version très courte. Il reste des coquilles (oups) et, comme je ne suis pas graphiste, la mise en page n’est pas parfaite non plus (oups derechef)… Peut-être qu’une seconde mouture sera plus achevée. Mais pour l’instant, mon carnet peut être utile à ceux et celles qui hésitent quant au chemin à prendre, et c’est ce qui compte.

À qui le carnet est-il destiné?

Le but de ce carnet de 60 pages est d’aider les personnes qui terminent le 1er cycle universitaire à prendre la meilleure décision : poursuivre ou non les études, et surtout, à quoi s’attendre? 

Il s’adresse particulièrement aux indécis-e-s et aux étudiant-e-s de première génération, ceux et celles pour qui des études avancées comportent de plus gros enjeux (risques d’endettement, notamment). Quand j’étais étudiante, j’aurais voulu avoir un tel outil pour réfléchir à mon parcours. Maintenant que je suis professeure, je saisis l’occasion d’offrir cet outil, et de tirer parti du recul du temps et de l’âge pour aider les étudiant-e-s à identifier les bonnes questions et à prendre leur décision avec le plus de lucidité possible. Je me sens privilégiée de pouvoir ainsi les accompagner dans ce processus déterminant pour leur avenir.

Le but de ce carnet de 60 pages est d’aider les personnes qui terminent le 1er cycle universitaire à prendre la meilleure décision : poursuivre ou non les études, et surtout, à quoi s’attendre? 

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  • Mélissa Thériault
    Université du Québec à Trois-Rivières

    Mélissa Thériault est professeure au Département de philosophie et des arts de l’UQTR. Ses travaux actuels portent sur les représentations éthiques et politiques dans la création, sur l'autochtonisation de l'enseignement de la philosophie, sur les liens entre littérature et philosophie. Avec l'appui du CRSH, elle termine un projet de recherche intitulé "Un autre discours sur la méthode : l'autofiction comme réponse à l'exclusion générique des femmes en philosophie" 

    Elle est membre-chercheure du Réseau québécois de recherche en études féministes et membre associée de l’Institut de recherche en études féministes.

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