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Tina Gruosso, Université McGill, Morgane Urli, Université Laval

Postdoctorant, postdoc, chercheur postdoctoral, stagiaire postdoctoral, voire boursier postdoctoral… autant de noms pour un seul et même travail. Nous sommes entre "éternels étudiants" et de "stricts salariés". Confusion d’appellation, confusion de statut.

Postdoctorat - Gruosso - Urli

À propos du dossier Postdoctorat
Lors de nos premières discussions en préparation du présent dossier, nous nous sommes aperçues que nous avions de nombreuses impressions communes sur le postdoctorat, que nous avons d'abord attribué à la similarité de nos parcours. Aujourd’hui, à la lecture des différentes contributions au dossier, nous réalisons que ces impressions se retrouvent chez beaucoup de postdocs, et ce, quel que soit leur parcours ou leur domaine de recherche. En 2018 au Québec, qui sont donc les postdoctorants, quelle importance ont-ils dans le système de recherche québécois?, comment font-ils pour allier vie professionnelle et vie de famille?, comment vivent-ils le fait d’être considéré comme étudiant malgré l’obtention d'un doctorat?, comment leurs travaux s’inscrivent-ils dans les programmes de recherche de chercheurs universitaires ou gouvernementaux? Voilà des questions auxquelles, nous espérons que le dossier apportera quelques réponses, sinon une contribution à la réflexion.

 

Le capharnaum des statuts

Que sont-ils, qui sommes-nous? Le statut du postdoctorat évolue dans un épais brouillard. Nous ne parlons pas seulement de statut fiscal, mais aussi d’une énorme (oui énorme) disparité en matière de salaire, de conditions de travail, d’assurances et de bénéfices. À l’heure où l’égalité, la diversité et l’inclusion sont des sujets d’actualité, quand est-il, par exemple, de l’équité salariale pour les postdocs? Comment concevoir que dans un laboratoire il soit possible d’assister à des situations où un-e postdoc gagne, non seulement un salaire supérieur avec moins d’expérience que son ou sa collègue assis-e à côté de lui ou d'elle, mais possède également un statut différent, étudiant salarié vs salarié, alors que tous deux réalisent des projets de recherche dans le même domaine, dans la même université et sous la supervision du même directeur de recherche? À aucun moment, dans une entreprise il serait légal d’embaucher ces deux personnes avec des écarts de salaires de 10,000 dollars annuels, une différence de statut et des prestations différentes (congés, assurances, etc.). Il est temps de remettre de l’ordre dans tout cela et de niveler par le haut la façon dont les postdocs, les « leaders de demain » sont traités. Au nom de l’équité.

La complainte du stagiaire-étudiant

Revenons au vocabulaire : stagiaire ou étudiant postdoctoral. Il est surprenant d’appeler stagiaire une personne qui s’investit corps et âme dans un projet pour deux, trois, voire cinq ans, ou encore étudiant une personne qui a achevé ses études. C’est notre opinion, mais aussi celle de Claude Perreault et Nelson Thiffault, respectivement directeur de recherche et chercheur gouvernemental, que nous avons rencontrés pour discuter du rôle des postdocs dans leurs travaux.

Nous pourrions penser qu’un stagiaire postdoctoral n’est pas un « chercheur accompli » quand il se présente après son doctorat, qu’il a encore beaucoup à apprendre. Il y a une progression dans les autres milieux qui s’opère avec l’expérience sans pour autant que l’on appelle cela des études ou un stage. Dans ces autres corps de métier, on parle de de développement professionnel, de formation continue, d’expérience. Après tout, apprendre tout au long de son parcours, c’est ce que tout le monde fait. Alors, pourquoi cantonner les postdocs au rôle d’apprenti chercheur, de stagiaire en formation ou d’étudiant? Un postdoc EST déjà formé à la recherche quand il débute son projet. Il n’est ni plus ni moins qu’un chercheur, junior certes, mais chercheur malgré tout.

S’il est aisé de comprendre qu’une disparité fiscale et salariale est un grand chantier à mettre en place, la première pièce à l’édifice pourrait être linguistique : changer l’appellation pour chercheur ou chercheuse, postdoctoral-e certes, mais chercheur ou chercheuse avant tout. Que le système de recherche adoube enfin ses postdocs pour leur donner une place symbolique, mais cruciale comme parties prenantes du système de recherche, surtout lorsque l’on connait l’importance de l’impact scientifique de leurs travaux...  (voir à ce sujet l’article L’importance des postdoctorants pour le système de la recherche dans le présent dossier).

S’il est aisé de comprendre qu’une disparité fiscale et salariale est un grand chantier à mettre en place, la première pièce à l’édifice pourrait être linguistique : changer l’appellation pour chercheur ou chercheuse, postdoctoral-e certes, mais chercheur ou chercheuse avant tout.


  • Tina Gruosso
    Université McGill

    Après un doctorat en oncologie à l’institut Curie à Paris, Tina Gruosso rejoint l’Université McGill fin 2013 en tant que postdoctorante où elle étudie comment le micro-environnement des tumeurs du sein influence la réponse des patients au traitement. Tina est présidente de l'organisme Dialogue Sciences & Politiques, au sein duquel elle défend l'élaboration de politiques fondées sur des données probantes, l'innovation, la diplomatie scientifique, la communication scientifique et la diversité.

  • Morgane Urli
    Université Laval

    Chercheure en écologie fonctionnelle des plantes, Morgane Urli s'intéresse aux impacts des changements globaux et de l’aménagement forestier sur la dynamique des peuplements forestiers, et à une plus large échelle, sur l’aire de répartition des arbres. Après avoir soutenu son doctorat en France sur l’étude de la distribution et des mécanismes de résistance à la sécheresse des arbres en 2013 et effectué de 2013 à 2018 plusieurs post-doctorats au Québec lui permettant de découvrir de nouveaux écosystèmes forestiers ainsi que la sylviculture, elle est actuellement professionnelle de recherche à l’Université Laval à Québec. Son expérience lui permet aujourd’hui de développer le caractère multidisciplinaire et collaboratif de sa recherche sur les réponses à la sécheresse d’essences tempérées nordiques et boréales dans le contexte des changements climatiques. Elle attache également une grande importance à la vulgarisation scientifique et aux transferts de connaissance qu’elle considère comme faisant partie intégrante de son travail de chercheur.

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