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Jennifer Morin, Collège Montmorency

Très méconnu du grand public, ce sujet est peu traité par les scientifiques. Pourtant, un nombre important d’individus sont atteints par cette condition. C’est donc à ne pas négliger, puisqu’à un certain degré, cette situation peut être très handicapante dans leur vie sociétale. Qui sait, peut-être que dans quelques années, y verra-t-on un peu plus clair...

Foule
Source : pexels.com

2ème prix : Jennifer Morin

À propos de l'article
J’ai l’immense plaisir de vous présenter le texte gagnant du 2e prix du 5e Concours de vulgarisation scientifique chapeauté par le département de psychologie du Collège Montmorency. Ce concours a commencé à prendre forme, il y a quatre ans, dans mon cours d’initiation à la psychologie. Officiellement, je cherchais un moyen d’encourager mes étudiants de sciences humaines, fraîchement débarqués dans le monde collégial, à bien écrire. Mais officieusement, je souhaitais quelque chose de plus intangible. Je voulais que qu'ils aiment écrire! Le défi exigeait de sortir des sentiers battus pour renouveler le travail de fin de session traditionnel qui n’a pour lectorat que l’enseignante. Mais comment? Au lieu de me prendre la tête en lisant tout ce qui se fait d’innovateur en pédagogie, je me suis de tout bêtement poser la question suivante : dans le domaine de la psychologie, qu’est-ce que j’aime lire, qu’aie-je le goût d’écrire? Des articles de vulgarisation scientifique! Voilà! Depuis, chaque session, mes étudiants rédigent des textes qui ont pour objectif d’informer et d’intéresser autant l’enseignante que les parents et les amis. Même si au départ, l’idée de publier les meilleurs textes était embryonnaire, je voulais qu'ils aboutissent à un résultat de grande qualité. Je voulais qu’ils soient tellement fiers que plusieurs récidivent à écrire pour et sur la science.

Tania Tremblay, enseignante au département de psychologie du Collège Montmorency

Est-il possible de ne pas reconnaître le visage d’un membre de sa famille, d’un ami, ou pire, de soi-même ? Eh oui, si vous souffrez de prosopagnosie. Cette condition qui touche 1 personne sur 50 se définit comme un problème d’identification ou de reconnaissance du visage. Cela complique passablement la vie, et pour traverser leur quotidien ils doivent trouver d’autres moyens pour identifier les proches, les enfants, les amis1.

Ses origines bien distinctes 

La prosopagnosie peut être innée ou acquise. Si un être est touché dès la naissance, on parlera de prosopagnosie développementale. Selon le Dre Kirsten A. Dalrymple, elle affecterait de 2 à 2,9% de la population. Les causes peuvent être liées à des facteurs génétiques, neurologiques ou expérimentaux. Dans ces cas, la professionnelle mentionne qu’il est primordial d’exposer les enfants à différents visages dès un très jeune âge2.

Le trouble peut aussi se développer suite à un accident affectant certaines parties du cerveau. Il est connu que l’hémisphère droit « dispose des compétences adaptées à l’analyse visuelle et à la confrontation avec les visages mémorisés. Il attribue des sentiments de familiarité à sa source (je connais ce visage). À l’hémisphère gauche reviennent de façon préférentielle l’accès aux informations biographiques (je sais qui est cette personne) et la capacité de les verbaliser3. » Pour leur part, l’aire occipitale et l’aire fusiforme sont responsables des impressions visuelles4. Donc, si une de ces zones est touchée, les risques de souffrir de prosopagnosie augmentent considérablement. Justement, les accidents vasculaires cérébraux, les traumatismes crâniens, les tumeurs ou les séquelles encéphalites infectieuses s’attaquent généralement à ces régions. Ils peuvent alors entrainer un déficit de reconnaissance faciale.

Enfin, la prosopagnosie acquise s’exprime aussi comme effet secondaire de l’Alzheimer5. De prime abord, cette maladie se caractérise par une dégradation des facultés cognitives comme la mémoire, la concentration ou le langage. Dans le cas précis du trouble de l’identification des visages, c’est un dysfonctionnement de l’hippocampe qui entre en jeux. En effet, cette partie du cerveau : « traite la mémoire verbale et la mémoire visuelle (la mémoire verbale comprend les souvenirs associés à ce que nous avons lu, dit ou entendu; nous sollicitons la mémoire visuelle pour reconnaître les objets, les visages […]  6».

Trois formes fort intrigantes

Quelques petites variantes permettent de dissocier les différentes formes que la prosopagnosie peut prendre. La première, la forme aperceptive, se définit par une incapacité à reconnaitre le visage dans sa forme générale. Tous les éléments faciaux semblent déformés, et tout est flou. Chaque partie du visage est comme une pièce de casse-tête, et la personne essaiera, en vain, de remettre ce puzzle en place7.

Pour la deuxième forme, on parlera de prosopagnosie mnésique. Ces personnes sont en mesure de reconnaître un visage parmi d'autres et à le différencier, mais il n’en est pas moins étranger. Aucun souvenir n’est éveillé, et ils ne savent pas si la personne en face d’eux est un proche ou un parfait inconnu8.

Le type asémantique est une troisième forme. Cette fois-ci, l’individu reconnaît un visage, mais il rencontre certains problèmes d’identification. Il pourra nommer la personne, mais il ne sera pas en mesure de donner des informations sur celle-ci. L’individu n’est donc pas capable d’associer les visages aux informations qu’il possède sur eux. Par exemple, dans l’article de M. Patrick Verstichel, on mentionne que devant une photo du général de Gaulle, la personne ne serait pas en mesure de dire quoi que ce soit sur lui. Par contre, si on lui demandait Qui était le général de Gaulle, elle pourrait répondre sans problème9.

Des astuces bien utiles

Malgré les enjeux sociaux importants auxquels ces malades font face, certaines stratégies ont été développées pour les aider à minimiser les obstacles quotidiens. Il faut d’abord comprendre que le trait physique majeur permettant l’identification des personnes ce sont les yeux. C’est pourquoi, quand on ne veut pas divulguer l’identité de quelqu’un à la télévision, on met une barre noire sur ses yeux. Pour les prosopagnosiques, leur problème fondamental est que la région des yeux est extrêmement difficile à traiter10. C’est pourquoi ils s’appuient sur d’autres points de repère. Ils se fient alors à la voix, aux vêtements ou encore à la démarche11. « Par exemple, une femme dont le mari souffrirait de ce trouble devrait toujours porter les mêmes boucles d’oreilles et la même coiffure afin qu’il puisse la reconnaître12».

En conclusion

Très méconnu du grand public, ce sujet est peu traité par les scientifiques. Pourtant, un nombre important d’individus sont atteints par cette condition. C’est donc à ne pas négliger, puisqu’à un certain degré, cette situation peut être très handicapante dans leur vie sociétale. Qui sait, peut-être que dans quelques années, y verra-t-on un peu plus clair...

Médiagraphie :


  • Jennifer Morin
    Collège Montmorency

    Étudiante en 2e année du collégial, programme de sciences humaines avec profil administration.

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