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Maxime Bilodeau, Journaliste
Ayant décortiqué plus de deux mille interventions policières, un chercheur québécois met en lumière la manière dont varie le rapport entre la force utilisée par les policiers et la résistance manifestée par les personnes interpellées.

[Colloque 410 – L’usage de la force par la police québécoise]

Lorsqu’il est question d’usage de la force par la police québécoise, les frasques de Matricule 728 et les manifestations du Printemps érable viennent rapidement à l’esprit. Pourtant, explique Rémi Boivin, professeur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal et chercheur au Centre international de criminologie comparée, ce ne sont là que des cas anecdotiques. « Dans les faits, affirme-t-il, l’usage de force est une chose relativement rare. Et lorsqu’elle a lieu, il est encore plus rare d’observer de tels dérapages ».

Malgré son caractère épisodique, l’usage de la force fait tout de même partie des tâches policières. C’est pourquoi Rémi Boivin s’est intéressé, dans le cadre de l'un de ses projets de recherche, aux facteurs qui influencent le niveau de force employé par les gardiens de la paix.

Historiquement, la résistance du sujet a été un des seuls, sinon le seul critère, pour déterminer le niveau de force adéquat. Ce modèle appelé « en escalade » a toutefois été récemment remplacé par un autre dit « situationnel » qui prend en compte des éléments propres au contexte et aux individus impliqués dans une altercation. « Est-ce que ce changement de philosophie se base sur une réalité observable? C’est ce que nous voulions vérifier », lance Rémi Boivin.

Pour ce faire, le professeur-chercheur a exploité une banque de données constituée de plus de deux mille formulaires remplis entre 2007 et 2011. Chaque formulaire relate le déroulement complet d’une intervention policière où la force a été utilisée. L’âge des sujets, leur sexe ou l’endroit dans lequel s’est déroulée l’altercation sont autant de variables qu’il a été possible d’extraire de ces documents.

« Peu importe le lieu où les policiers interviennent, le niveau de force est sensiblement le même »

Ce n’est qu’après avoir comparé les interventions entre elles que Rémi Boivin a pu faire ressortir certains points d’intérêts. Première surprise : les facteurs contextuels comme le quartier d’intervention ont peu d’impact. « Cela signifie que peu importe le lieu où les policiers interviennent, le niveau de force est sensiblement le même », analyse-t-il.

L’heure de l’intervention, le niveau d’intoxication du sujet et le sexe des protagonistes ne pèsent pas, là aussi, bien lourd dans la balance. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, la météo et la température extérieure n’ont aucun effet sur le niveau de force mis en œuvre par les policiers québécois; plutôt cette année, un policier du Service de Police de la Ville de Montréal (SVPM) avait menacé un sans-abri de l’attacher à un poteau alors qu’il faisait -28 degrés Celsius.

Seules les années d’expérience d’un policier, la présence d’une arme et la dangerosité d’un sujet envers lui-même sont des facteurs qui influencent à la hausse ou à la baisse le niveau de force utilisé.

Selon Rémi Boivin, ces résultats appuient le changement de philosophie mis de l’avant par l’École nationale de police du Québec. En vigueur depuis octobre 2012, « il permet de tenir compte d’autres facteurs que de l’unique résistance des sujets ».

Reste à voir, poursuit le chercheur, si le changement aura des retombées concrètes. « Éventuellement, c’est la question à laquelle j’aimerais répondre ».


  • Maxime Bilodeau
    Journaliste
    Présentation du journalisteMaxime Bilodeau est un jeune journaliste basé dans la région de Québec. Diplômé en 2013 au Baccalauréat en kinésiologie à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), il a ensuite entamé des études en journalisme à l’Université Laval. En plus d’acquérir les rudiments du métier au sein du média-école l’Exemplaire, il a collaboré dans la dernière année aux médias étudiants lavallois en plus d’effectuer quelques contrats à la pige. Dès l’automne prochain, il dirigera le pupitre des sports d’Impact Campus, le journal étudiant de l’Université Laval. Il arrive au 82e Congrès de l’Acfas assoiffé comme jamais de science.

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