5a. Résumé
Dans le cadre du tournage de Mektoub my love : canto uno d'Abdellatif Kechiche (2018), les pratiques improvisées du cinéaste et des opérateurs dépendent largement, non seulement, de la spécificité numérique des machines, mais également de leur matérialité propre (dimensions, poids, design, matériau). Dans le cas de Mektoub, l'apparence physique des objets techniques joue un rôle prépondérant dans l’organisation générale du tournage : des techniciens néophytes sont recrutés comme opérateurs; le matériel à bas coût est acheté plutôt que loué; le plan de travail est très flexible, ajusté du jour au lendemain, car le matériel est facilement transportable et nécessite très peu de temps d’installation, etc. La matérialité des machines constitue donc un enjeu d'importance, tout particulièrement en ce qui a trait à la division du travail et à la logistique. Par cette communication consacrée à une pratique technique à l'ère du numérique, nous proposons de présenter un autre aspect des machines cinématographiques en nous intéressant spécifiquement à leur dimension matérielle, trop souvent éclipsée par les préoccupations informatiques, virtuelles, « dématérialisées », qui sont presque toujours au centre de l'attention dès qu'il est sujet des technologies numériques et du tournant numérique (digital turn). Les résultats finaux présentés reposent sur une enquête réalisée à partir de 46 entretiens avec les collaborateurs du cinéaste, ainsi que sur 200 documents d'archives inédits.