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Auteur et co-auteurs
Michel Paillé
Association des démographes du Québec
5a. Résumé

Partant du recensement de 1971 sur un faux prétexte, l’ingénieur Charles Gaudreault a effectué une projection de la population du Québec non conforme aux règles communément admises. Outre qu’elle a été établie d’après un seul scénario s’étendant sur huit décennies, l’immigration internationale est fixée en fonction de la taille de la population. L’auteur a séparé la population québécoise en trois sous-groupes qu’il a fait évoluer séparément, notamment les immigrants arrivés depuis 1971, ainsi que leurs descendants.

Puisque la période 1971-2014 appartient déjà à l’histoire, notre évaluation des résultats est basée sur des faits. Il s’avère que certaines hypothèses gonflent indûment l’évolution numérique des immigrants de la période : outre leur fécondité trop élevée (1,8 et non 2 enfants par femme), leur émigration subséquente a été deux fois plus importante qu’estimée.

La surestimation causée par le nombre trop élevé d’immigrants et par une fécondité des immigrantes trop forte est de l’ordre de 185 300 personnes en trop par rapport aux faits, soit 36,3%. Il s’agit là d’un minimum car nous n’avons pu tenir compte de la sous-estimation de l’émigration subséquente. Enfin, contrairement à ce que pense M. Gaudreault, nous démontrons à l’aide de projections de l’Institut de la statistique du Québec que le recul du poids démographique des « Canadiens français » n’est pas exclusivement expliqué par nos taux d’immigration élevés.


Commentaires

Michel Paillé
PLANCHE # 5 : une précision à propos des «groupes étanches» de l’ingénieur Gaudreault. - En démographie des groupes linguistiques, les personnes peuvent ‘migrer’ d’un groupe à un autre. Par exemple, des personnes de langue maternelle italienne ont adopté le français ou l’anglais au cours de leur vie. La démolinguistique en tient compte. Dans la répartition des données de Charles Gaudreault, aucune personne classée parmi les EFC, les NFC et les IAD ne peut ‘migrer’ dans l’un des deux autres groupes. Ces groupes sont donc étanches. Cette façon de faire est inadmissible en démographie.
Michel Paillé
PLANCHE # 11 : une précision à propos du sens « essentialiste » que Charles Gaudreault donne à l’origine ethnique. – Sachant qu’au Québec des personnes font usage du français sans être les descendants des premiers colons arrivés de France aux XVIIe et XVIIe siècles, l’ingénieur a recours à l’origine ethnique pour ‘purifier’ sa population de départ servant à sa projection. Il remonte aux données du recensement de 1971 parce qu’elles sont les seules à classer les personnes recensées dans un seul groupe ethnique. Or, comme le démontre Danielle Juteau dans L'ethnicité et ses frontières, on ne naît pas d’origine ethnique française par ‘essence’ ; on le devient par l’éducation au sein de la famille. Ainsi, des enfants nés de parents d'origines ethniques différentes devraient déclarer deux origines ethniques, ce à quoi Charles Gaudreault s'oppose.
Michel Paillé
PLANCHE # 15 : une précision à propos de l’indice de fécondité (ISF). – Charles Gaudreault a fait sa rétroprojection avec un ISF constant de 2 enfants par femme. Or, entre 1971 et 2014, l’ISF a fluctué : on note 3 sommets et 3 creux. Les sommets sont de 1,94 en 1971, de 1,67 en 1992 et de 1,73 en 2008. Les creux sont de 1,36 en 1987, 1,45 en 2000 et de 1,62 en 2014. La moyenne brute (non pondérée) pour cette période de 44 ans est de 1,6 enfant. En faisant mes calculs avec 1,8 enfant, j’ai pipé les dés en faveur de l’ingénieur. Malgré cet avantage, il s'en tire mal.
Michel Paillé
PLANCHE # 16 : à propos de la projection proprement dite pour la période 2014-2050. Comme il nous faudrait construire plusieurs scénarios ayant chacun différentes hypothèses de fécondité, d’immigration, d’émigration etc., la tâche colossale qui nous attendrait dépasse largement le cadre de notre examen critique, y compris cette «communication libre».
Michel Paillé
PLANCHE # 19 : Charles Gaudreault décrit son équation comme suit : «La loi de puissance s'exprime par l'équation y = a*x^−k, où ‘y’ est le nombre d'années nécessaires pour que le poids du groupe d’origine ethnique française diminue de 1 %, où ‘x’ est le taux d'immigration par an, ‘a’ et ‘l'exposant -k’ étant des constantes pour un même indice de fécondité» (traduction libre). Il est manifeste à sa face même que cette formule ne peut tenir compte de la structure par âge, ni de la population d'accueil, ni des immigrants.
Michel Paillé
PLANCHE # 21 : à propos des 4 scénarios réalistes. - Les deux niveaux d’immigration réalistes de 20 000 et de 40 000 personnes par année, encadrent la moyenne annuelle de 33 000 personnes. Mais un ISF de 1,35 enfant au lieu de 1,6, de pair avec celui supposant 1,85 enfant par femme, auraient mieux encadré la réalité observée ces années-là.
Michel Paillé
PLANCHE # 22 : à propos de la prétendue supériorité de l’immigration sur la fécondité selon Charles Gaudreault. – Le « scénario de référence » des projections les plus récentes (2019) de l’Institut de la statistique du Québec suppose un ISF égal à 1,6 enfant par femme (ce qui est moindre que dans les 15 scénarios hors-champs), et une immigration de 55 000 personnes par année à partir de 2026 (ce qui est beaucoup plus que dans les 15 scénarios hors-champs). Or, l’importance des naissances par rapport à l’immigration augmentera de 60% à 66% entre 2031 et 2046 (au lieu de diminuer comme le voudraient les résultats de Gaudreault) avant de se stabiliser pour au moins 20 ans.