Informations générales
Événement : 92e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Les entrepreneur·es migrant·es jouent un rôle majeur dans l’économie de leur pays d’accueil : un·e entrepreneur·e sur trois est issu·e de l’immigration (OCDE et OIT, 2018). Alors que de nombreuses recherches se concentrent sur les défis liés à leur accueil, à leur accès au financement et à leur inclusion (Sarihasan et al., 2023; Malki et al., 2020; Aman et al., 2024), ce colloque se focalise sur leur potentiel, en lien avec leurs origines culturelles.
En effet, les entrepreneur·es migrant·es possèdent des connaissances explicites et tacites liées à leur culture (Dheer, 2018), qui prennent notamment la forme de différents systèmes de valeur et de pensée (Brannen et Thomas, 2010). Ils développent ainsi une créativité unique, basée sur la culture (Leung et al., 2018; Hong et Minbaeva, 2022). En effet, Bajaba et al. (2022) montrent que les entrepreneur·es migrant·es possèdent une flexibilité et une complexité cognitive leur permettant de connecter des idées de manière unique, favorisant ainsi des décisions plus innovantes. Ayant grandi dans un pays culturellement différent du pays d’accueil, ces entrepreneurs développent des cadres culturels associés aux deux cultures et s’identifient à la fois au pays d’accueil et au pays d’origine.
Alors que de nombreuses recherches existent sur le potentiel des employé·es migrant·es en organisation, les caractéristiques et le potentiel culturel des entrepreneur·es migrant·es restent encore peu étudiés. Dheer (2018) souligne ainsi la nécessité de recherches supplémentaires sur le lien entre les connaissances liées à la culture, à la stratégie et à la performance des entreprises.
Ce colloque constitue un espace d’échange sur le potentiel des entrepreneur·es migrant·es lié à leur multiculturalisme. Les discussions portent sur la manière dont ces entrepreneurs exploitent leurs savoirs multiculturels pour innover, sur leur résilience et leur adaptabilité dans le pays d’accueil ainsi que sur les caractéristiques de leur accompagnement adapté à leurs spécificités.
Date :Format : Sur place et en ligne
Responsables :- Kerstin Kuyken (École des Sciences de la Gestion (ESG) - UQAM)
- Carène Tchuinou Tchouwo (École des Sciences de la Gestion (ESG) - UQAM)
- Christina Constantinidis (UQAM - Université du Québec à Montréal)
- Sina Grosskopf (International University of Monaco)
- Emile Pelletier (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Programme
Les entrepreneur·es immigrant·es : la place de la culture
Caractéristiques, besoins et défis des entrepreneur·es immigrant·es
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Communication orale
L’entrepreneuriat au sein des minorités ethniques : dynamiques et stratégiesFélix Zogning (UdeS - Université de Sherbrooke)
Bien que considérés comme moteur essentiel de la croissance économique et de l'innovation, les entrepreneurs des minorités ethniques sont confrontés à des défis majeurs tels que l’accès limité au capital ou la discrimination systémique. Par le biais d'une revue de littérature systématique selon les critères PRISMA, cette communication vise à analyser les pratiques entrepreneuriales spécifiques aux minorités ethniques, leurs motivations, les obstacles qu'elles rencontrent, ainsi que les stratégies d'accompagnement les plus efficaces pour leur succès.
Notre étude révèle que :
• Les motivations varient selon le contexte socio-économique et l'origine ethnique, mais la nécessité économique et la quête d’autonomie sont dominantes (Bell et al., 2023).
• Les obstacles incluent un accès limité aux financements traditionnels, une exclusion des réseaux d’affaires et la persistance de stéréotypes discriminants (Edmondson et al., 2024).
• Les stratégies d’accompagnement les plus efficaces reposent sur le développement du capital social, la mise en place de programmes de mentorat et l’accès à des financements alternatifs (Birdthistle, 2019).
Une approche intégrée combinant des réformes structurelles, des politiques d’inclusion économique et des programmes de soutien personnalisés est nécessaire pour favoriser un entrepreneuriat ethnique florissant et inclusif.
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Communication orale
Caractéristiques, connaissances et compétences des entrepreneurs immigrants dans différents milieuxHonorine KUETE FOMEKONG (Université de Mons)
Le mouvement vers l’auto-emploi des personnes migrantes résulte, entre autres, de leur exclusion du marché du travail primaire en raison de discriminations systémiques . C’est notamment le cas de discrimination à l’embauche ou de la non-reconnaissance des diplômes et des acquis de l’expérience des travailleurs issus de l’immigration, en particulier hors UE (Pécoud, 2012). Alors que les personnes originaires de pays extra-européens présentent un fort potentiel entrepreneurial (Vandor, 2021), leurs initiatives dans ce domaine sont proportionnellement moins stables, moins durables et davantage vouées à l’échec que celles de la population native, comme l’attestent également deux rapports (OCDE 2011, Eurostat, 2021). Plus localement, les opportunités d’accompagnement en Wallonie peinent à considérer les problématiques spécifiques de ces entrepreneurs (Kuete Fomekong et Manço, 2021).
La présente contribution vise à identifier les ressources et les difficultés des entrepreneurs issus de l’immigration hors UE. Elle ambitionne de mieux connaître les préoccupations, ainsi que les conseils et les recommandations de ces acteurs économiques, à partir d’un recueil de leurs propres analyses sur leurs ressources et difficultés. Elle a également pour objet de définir les obstacles spécifiques que rencontrent ces entrepreneurs et travailleurs indépendants en Wallonie. La finalité pratique est de décrypter les voies possibles d’entrepreneuriat des personnes migrantes pour faciliter leur accès à la création d’entreprise, une façon de contribuer à la dynamique économique régionale et de favoriser un marché de l’emploi plus inclusif et résilient.
Pour cela, après une définition des termes clés et une revue de la littérature en lien avec les différentes rubriques que suggère l’évaluation des ressources et des difficultés des créateurs d’entreprise issus de l’immigration, nous présentons la méthodologie, en l’occurrence les différentes approches retenues — socio-anthropologique et participative — avec une analyse qualitative d’un échantillon empirique. Les constats majeurs tirés de cette analyse sont présentés et permettent de déboucher sur une typologie des entrepreneurs et indépendants migrants. Une discussion de ces résultats, notamment sur les difficultés et ressources énumérées par l’échantillon comme étant perçues et vécues, est menée en faisant ressortir les recommandations et propositions pour atténuer les difficultés exprimées et en traduisant le type ou la forme de barrières que représentent ces difficultés.
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Communication orale
La redevabilité dans le multiculturalisme de l’entrepreneur immigrant face à ses abstentions de demande de crédit bancaire : contribution à la théorie du découragement de l’emploiEmile Muadimanga (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)
La théorie du découragement de l’emprunteur analyse les décisions de non-dépôt de demande de crédit bancaire par un entrepreneur solvable et en besoin de crédit à cause de l’anticipation du rejet de la banque (Kon et Storey, 2003). Se référant aux entrepreneurs immigrants de la République Démocratique du Congo vivant au Québec, cette communication vise à comprendre comment l’expérience prémigratoire du migrant, composante de son multiculturalisme, influence sa décision de solliciter un financement bancaire au pays hôte.
Nous avons recours à une approche qualitative par étude de cas pour collecter des données sur les expériences vécues de huit entrepreneurs immigrants qui ont décidé de se priver de financement bancaire alors qu’ils en avaient besoin.
Nos résultats signalent qu’outre les déterminants financiers, des facteurs cognitifs et culturels notamment la peur de non-remboursement et la redevabilité, influencent le non-dépôt. Cette peur trouve sa motivation chez le potentiel demandeur contrairement à celle du rejet reposant sur le bailleur et largement documentée dans la littérature.
La migration constituant un investissement (Alvarez et al. 2013) de la famille ou des tiers, la redevabilité de l’immigrant et la préservation de sa crédibilité recommandent de réduire des risques peut affecter le respect des engagements et le retour sur investissement. Cela se traduit dans ses abstentions à demander du crédit et enrichit la théorie en élargissant ses déterminants.
Dîner, discussion et réseautage
Le potentiel économique et social des femmes entrepreneures immigrantes
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Communication orale
Le potentiel économique et social des femmes entrepreneuresMariam Coulibaly (École des Sciences de la Gestion (ESG) - UQAM), Mondoukpè Lagnika (Écosystémiques Actions), Cindy Tinh (StartOp/UQAM)
Le panel « Le potentiel économique et social des femmes », animé par Startop, explore les contributions des femmes entrepreneures à l’économie sociale et aux dynamiques de développement inclusif. Il mettra en lumière les enjeux, défis et opportunités liés à leur parcours entrepreneurial, tout en soulignant le rôle des organismes d’accompagnement.
Intervenants
Le panel réunira :
- Une entrepreneure ayant surmonté des défis pour développer son projet d’économie sociale.
- Une représentante de Startop, un organisme d’accompagnement apportant son expertise sur les besoins des entrepreneures.
Un.e chercheur.e partageant des données et recommandations issues d’études récentes.
Thèmes abordés
Présentation du contexte et des besoins spécifiques des femmes entrepreneures.
Cas pratiques illustrant des réussites et les défis rencontrés.
Le rôle clé des accompagnateurs dans la croissance et la pérennisation des projets.
Enseignements tirés et recommandations pour renforcer l’impact social et économique des initiatives féminines.
La place de la culture dans l’accompagnement des entrepreneur·es immigrant·es
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Communication orale
Les dispositifs d’aide à la création d’entreprise en région wallonne : un bilan des structures d’accompagnement face aux publics migrants extra-européensHonorine KUETE FOMEKONG (Université de Mons)
Cet article s’intéresse à l’efficacité des structures d’aide et d’accompagnement des créateurs d’entreprises, à travers la fenêtre des candidats entrepreneurs issus de l’immigration en Wallonie. L’objectif est d’identifier les initiatives d’aide à la création d’entreprise qui leur sont dédiées et d’en apprécier la contribution pour l’intégration sociale et la participation économique de ce public, afin de mesurer l’écart qui existerait entre les réalités des entrepreneurs migrants telles que décrites dans notre étude précédente, et les dispositifs existants pour les couvrir. Une revue de la littérature locale et internationale campe le décor en Région wallonne, en comparaison avec des régions voisines. Les instruments et les structures généralistes d’aide pour créateurs d’entreprise sont également étudiés dans leurs rapports aux candidats entrepreneurs migrants. Enfin, les résultats des initiatives sont illustrés par l’interview de parties prenantes et des recommandations clôturent le travail.
L’entrepreneuriat des personnes migrantes fait l’objet d’un réel intérêt face aux défis socio-économiques qui se posent aux sociétés européennes, et particulièrement celui de l’insertion socioprofessionnelle des travailleurs issus de l’immigration. Ce défi, dont la complexité s’accentue au fil des années en dépit des mesures déjà en place, tire son origine de plusieurs facteurs que sont, entre autres, les flux migratoires et leur évolution durant ces dernières années, ainsi que les différentes crises et mutations économiques que subissent les économies des sociétés d’accueil, comme en témoignent les chiffres sur l’emploi, tous publics confondus, ainsi que les variables qui y sont relatives, pour lesquelles la comparaison d’un pays à l’autre est une source de meilleure compréhension. En effet, les réalités de l’accès à l’emploi des immigrés ne sont pas identiques d’une zone à l’autre dans la région considérée, laissant entendre une diversité de politiques d’emploi aux effets divergents (Manço et Scheurette, 2021).
La situation en Belgique est beaucoup moins prometteuse. En considérant les effets de la pandémie du Covid 19, tandis que le nombre de personnes occupées augmente de 0,6% depuis 2019 pour les étrangers ayant une nationalité de l’UE, ce nombre diminue de 10,3% pour les personnes de nationalité d’un pays hors EU (Statbel). Cette réalité avait déjà été observée en 2013 par l’OCDE qui notait que les travailleurs issus de l’immigration étaient non seulement affectés plus durement par la crise financière de 2008, mais aussi représentaient une importante main d’œuvre sous-exploitée. Le taux de chômage élevé au sein des populations immigrées est expliqué notamment par des facteurs tels qu’un faible taux d’emploi des personnes de 20-24 ans, en particulier en Région wallonne et à Bruxelles.
Ces constats sont de nature à expliquer pourquoi les travailleurs migrants se montrent plus intéressés par une carrière d’entrepreneur que les travailleurs natifs, sans que l’auto-emploi ne soit forcément leur premier choix. En effet selon une étude récente de l’OCDE (Lavison, C., et al., 2023), le travail indépendant augmente plus vite parmi les immigrés en Wallonie : En Belgique, la part des immigrés parmi les travailleurs indépendants est supérieure à la moyenne européenne : 10 % des travailleurs indépendants étaient originaires d’un autre état de l’UE en 2020 (moyenne UE : 3 %), et 8 % étaient originaires d’un pays hors de l’UE (moyenne UE : 7 %). La piste de l’entrepreneuriat se présente donc comme une issue viable, non seulement par nécessité et opportunité, mais aussi par conviction, dans la mesure où les migrants, étant donné leur parcours migratoire, acquièrent un fort potentiel entrepreneurial et une certaine aisance à prendre des risques (Kuete et Manço, 2021). Toutefois, la complexité de la question de l’auto-emploi est marquée par des différences administratives, législatives et de gouvernance, ainsi que par des diversités de cultures régionales et nationales.
Les femmes sont sous-représentées parmi les travailleurs indépendants en Belgique. C’est particulièrement le cas des indépendantes immigrées (qui représentent 31.2´% des indépendants immigrés en Belgique), mais cela s’applique également, dans une moindre mesure, aux indépendantes natives (35% des indépendants natifs), selon une étude du SPF Economie datant de 2019.
Il y a donc lieu de s’intéresser aux différents dispositifs d’accompagnement à l’auto-emploi qui existent, qui sont réservés aux besoins spécifiques des publics immigrés, et d’évaluer leur efficacité : Évaluer l’efficacité de ces dispositifs renvoie, d’une part, à leur inventaire et, d’autre part, à l’identification de leur valeur intrinsèque, leurs impacts et incidences systémiques sur la trajectoire socioprofessionnelle de l’entrepreneur ainsi que, globalement sur le marché de l’emploi. Autrement dit, il s’agit de la mesure de leur aptitude à produire des résultats utiles en fonction des effets attendus, par rapport à leurs coûts directs et indirects (Manço, 2018).
Cette contribution recensera donc non seulement les structures d’aide et d’accompagnement à l’entrepreneuriat afin d’évaluer leur efficacité pour les publics migrants, mais aussi l’impact des sociétés coopératives dans l’aide et le soutien des entrepreneurs migrants.
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Communication orale
L'accompagnement des étudiants internationaux entrepreneurs au CanadaFrançois Gonothi Toure (UQAM - Université du Québec à Montréal)
1. Contexte de l’étude :
Cette étude porte sur les étudiants internationaux entrepreneurs au Canada, en particulier sur les défis et opportunités liés à la création et à la gestion d’une entreprise en tant que travailleur autonome sous un permis d’études. Elle s’appuie sur les réglementations d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) qui limitent à 24 heures par semaine le travail hors campus, y compris l’entrepreneuriat, et impose aux étudiants de consigner leurs heures.
2. Description du cas pratique et des participants :
L’étude examine des étudiants internationaux ayant lancé leur propre entreprise tout en poursuivant leurs études à temps plein. Elle analyse les stratégies mises en place pour concilier exigences académiques et obligations légales, notamment le suivi des heures de travail et la structuration juridique de leur entreprise.
3. Importance de l’étude :
Avec l’essor des initiatives entrepreneuriales étudiantes et l’attractivité du Canada comme terre d’accueil, cette recherche met en lumière les défis administratifs, financiers et organisationnels auxquels font face ces jeunes entrepreneurs.
4. Principaux enseignements et recommandations :
L’étude souligne la nécessité d’un meilleur accompagnement des étudiants entrepreneurs par les institutions académiques et les incubateurs. Elle recommande la mise en place d’outils de suivi des heures et un accès facilité aux ressources entrepreneuriales pour assurer la conformité réglementaire et la pérennité des entreprises créées.
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Communication orale
Les professionnels de l'accompagnement en tant que facilitateurs culturels pour les entrepreneurs migrants - saisir le rôle des espaces de transitionChristina Constantinidis (Université du Québec à Montréal), Kerstin Kuyken (École des Sciences de la Gestion (ESG) - UQAM), Carène Tchuinou Tchouwo (UQAM)
Cette étude explore le rôle de la culture dans l'élaboration des pratiques d'accompagnement entrepreneurial pour les entrepreneurs immigrants. Alors que le débat entre les modèles d'accompagnement généralistes et spécialisés se poursuit, cet article souligne que la culture est un facteur essentiel dans l'analyse de ce type de soutien. Les résultats de cette étude qualitative mettent l'accent sur plusieurs éléments culturels - tels que la langue, la communication, les relations, les modèles de rôle et la dynamique du pouvoir - qui sont essentiels pour un accompagnement efficace. Cette étude contribue à la littérature limitée sur les considérations culturelles dans l'accompagnement des entrepreneurs immigrants et donne un aperçu des espaces de transition facilités par des professionnels de l'accompagnement sensibilisés à la culture. Nous soutenons en outre qu'un soutien à la fois spécialisé et généraliste est essentiel à différents stades du parcours entrepreneurial des immigrants. Cette étude propose des recommandations pratiques pour améliorer les services d'accompagnement et promouvoir l'établissement des entrepreneurs immigrants dans leur société d'accueil.