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Auteur et co-auteurs
Ugo Gilbert Tremblay
UdeM - Université de Montréal
5a. Résumé

Dans une décision très divisée de 5 juges contre 4, la Cour suprême du Canada a conclu en 2021 que l'humoriste Mike Ward n’avait pas porté atteinte aux droits du chanteur Jérémy Gabriel en faisant des blagues répétées au sujet de son handicap. Les raisonnements qui ont eu le plus de poids en faveur de M. Ward se fondent sur la notion de « personne raisonnable » : une telle personne, concluent les juges majoritaires, n'aurait pas considéré que les propos de l'humoriste incitaient à détester l'humanité de M. Gabriel pas plus qu'elle aurait estimé que de tels propos étaient susceptibles de conduire l'auditoire à le discriminer. Dans cette conférence, nous proposons d'analyser ces raisonnements en prenant soin de montrer comment la prise en compte du facteur de l'âge - aussi bien de la cible des propos que du jeune auditoire qui était susceptible de les entendre - affaiblit considérablement l'argumentaire de la Cour suprême. Dans d'autres domaines du droit, la Cour suprême a maintes fois rappelé que l'application purement abstraite de la notion de personne raisonnable (ou ordinaire) pouvait conduire à des injustices. En matière de violence conjugale (R. c. Lavallee 1990) ou de provocation (R. c. Thibert 1996), par exemple, il est nécessaire de prêter à cette personne des caractéristiques propres à lui donner une forme plus incarnée. Nous tenterons donc de comprendre pourquoi la Cour suprême a omis de procéder de la même façon dans un litige impliquant la liberté d'expression.