115 - Les enjeux contemporains en santé publique environnementale : défis et perspectives pour la recherche et l’intervention

Au cours des dernières années, les retardateurs de flamme organophosphorés (de OPFRs) ont émergé comme substituts aux retardateurs de flamme bromés. L'utilisation actuelle de OPFRs dans les produits de consommation suggère un large potentiel d'exposition en environnement intérieur, en particulier par l'ingestion de poussière. Ils ont été détectés dans des échantillons biologiques humains dans plusieurs pays. Notre objectif est de décrire OPFR l'exposition et de ses déterminants dans la population générale pour la première fois en France et d'étudier si une exposition prénatale ou postnatale, ou les deux, pourraient être associés à des troubles neurodéveloppementaux de l'enfant. Ce projet est basé sur 400 paires mère-enfant choisis au sein de la cohorte nationale mère enfant Elfe, avec le développement cognitif et psychomoteur des enfants évalués à 1, 2 et 3,5 ans. Les expositions à de multiples OPFRs seront mesurés dans des échantillons de cheveux prélevés à l'accouchement des mères et des enfants à 3,5 ans. La corrélation avec les niveaux de OPFR dans les poussières sera également étudiée, ainsi que la co-exposition à d'autres retardateurs de flamme.

Les travailleurs sont exposés aux sous-produits de désinfection dans les piscines intérieures. Les expositions à la trichloramine (TCA) sont associées à des effets d’irritation, mais aussi à des effets respiratoires tels que l’asthme. Des valeurs limites d’exposition (VLE) ont été proposées par plusieurs organisations. Ces VLE doivent être comparées à des mesures effectuées dans la zone respiratoire du travailleur pendant une période représentative du travail. La pratique actuelle vise toutefois à effectuer uniquement des mesures d’ambiance durant une période de deux heures, ce qui présente plusieurs incertitudes sur la représentativité de la mesure.

Dans cette étude, des mesures personnelles sur un quart de travail complet (60 travailleurs) et des mesures ambiantes (6 piscines) ont été effectuées en parallèle. Les prélèvements ont été réalisés à l’aide de pompes personnelles reliées à des cassettes avec filtres de quartz imprégnés spécifiquement développées pour ce projet. L’analyse a été réalisée à l’aide de chromatographie à échange d'ions.

Les résultats indiquent que les niveaux de TCA sont variables dans le temps et l’espace au sein d’une même piscine. Les mesures personnelles étaient inférieures aux mesures ambiantes prises dans l’enceinte de la piscine. Les déplacements des travailleurs à l’extérieur de l’enceinte du bassin sont un déterminant important de l’exposition globale. Le projet a permis de valider la méthode d’évaluation de l’exposition des travailleurs à la TCA.

Les changements climatiques (CC) augmentent la fréquence, la durée et la gravité des inondations. Les mesures d'adaptation aux inondations (MAI) visent à réduire les impacts des inondations sur les populations touchées (PT). L'objectif de cette revue est d'examiner l'effet des MAI sur la santé mentale (SM) des PT. Une recherche a été effectuée sur Medline et Web of Science le 8 mars 2021 et a été mise à jour le 26 septembre 2022. La stratégie de recherche a été construite selon 3 concepts : les MAI, les inondations et la SM. L'exclusion a été faite par type de papier et par type d’inondation. Un total de 857 articles a été obtenu, dont 18 répondaient aux critères d'inclusion (2 réviseurs). Neuf études ont été incluses après lecture du texte intégral. Ces études ont été classées en 2 catégories: études portant sur les 1) facteurs influençant la résilience chez les PT, notamment le capital social (6 études) et 2) impacts d’interventions sur d’autres indicateurs de SM chez les PT (3 études). Considérant le petit nombre d’études répertoriées, la généralisation des résultats obtenus demeure limitée. Il est nécessaire d'élaborer des politiques et des lignes directrices de santé publique pour le développement de mesures d'adaptation aux inondations qui prennent en compte de manière adéquate une composante sociale pouvant être utilisée pour soutenir la santé mentale des victimes d'inondations.

D'après Santé Canada, la pollution de l'air extérieur, aujourd’hui considérée comme enjeu de santé publique majeur, est responsable de 15300 décès prématurés par an au Canada dont 4000 au Québec en 2016. Sur l’Ile de Montréal, elle est encadrée par le Règlement sur les rejets à l’atmosphère 2001-10, ne portant que sur les émissions industrielles et ne prenant donc pas en compte le transport et le chauffage résidentiel, sources importantes de polluants atmosphériques à Montréal. Le projet vise à identifier des normes ainsi que des méthodes de mesures et d’analyse des polluants présents dans l’air extérieur tenant compte des risques à la santé et protégeant la population montréalaise.  

Pour cela, un recensement de normes provinciales, fédérales et internationales, pour identifier les meilleurs pratiques en matière de surveillance de la qualité de l’air et de protection de la santé, et une revue de la littérature des effets sur la santé des polluants atmosphériques ont été faits.  

Malgré que les concentrations des polluants atmosphériques soient en baisse depuis vingt ans, certaines restent supérieures aux dernières cibles de l'Organisation Mondiale de la Santé ou non réglementées sur l'Ile de Montréal et présentent donc des risques pour la santé. 

Ainsi les normes et interventions proposées visent à ce que la population montréalaise soit exposée à des niveaux de polluants les plus faibles possible afin de protéger sa santé.

Cette communication vise à discuter des liens entre environnement et santé publique dans un contexte caribéen. Elle s’appuiera sur des données qualitatives collectées dans le cadre d’une étude interdisciplinaire sur le changement climatique, les migrations et la santé. Cette étude se concentre sur la Dominique, un petit État insulaire en développement de l’Est de la Caraïbe, qui a récemment été durement touché par deux tempêtes tropicales qui ont provoqué le déplacement de plusieurs milliers de gens. L’objectif de la présentation visera plus précisément à discuter des relations entre déterminants climatiques, sociaux et politiques qui jouent sur la mobilité, la santé et la vulnérabilité sociale, à la lumière de considérations d’ordre spatial et temporel.  La communication s’appuiera sur des données qualitatives collectées lors d’entrevues semi-structurées (2020 – 2021) avec des personnes déplacées suite à deux événements climatiques extrêmes. La santé mentale a été une question centrale abordée par les participants. Les répondants ont discuté de leurs conditions de vie pendant et après leur déplacement. D'autres thèmes portant sur l’habitation; l'accès à l’alimentation et à l'eau, les services psychosociaux; les disparités de l’assistance sociale; et les liens sociaux – qui sont des déterminants sociaux bien connus de la santé mentale – seront discutés. Le rôle de la santé publique dans l’adaptation au changement climatique dans la Caraïbe sera également abordé.

Cette présentation souhaite contribuer au décloisonnement des champs de recherche et de pratique en santé environnementale en créant des passerelles entre un champ d’étude historiquement axé sur la pollution et l’étude des effets négatifs des contaminants et l’étude des bienfaits de la nature sur la santé. 

Je présente d’abord une revue des recherches et des pratiques entourant les bienfaits de la nature sur la santé physique et mentale. Sur le plan scientifique, ces derniers sont de plus en plus avérés par différentes recherches en Amérique du Nord, en Europe et au Japon. Les pratiques fleurissent aussi, allant de la sylvothérapie ou des « bains de forêt » (Shinrin yoku, Japon) au mouvement contemporain de prescriptions médicales de nature.

Ces recherches et pratiques constituent à mon sens l’autre face de la santé environnementale, celle qui mise sur les bienfaits d’une (re)connexion à la nature.  Les deux me semblent indissociablement liées car une sensibilité à la nature se traduit par des préoccupations environnementales et la réduction des contaminants. Et potentiellement réciproquement.

Je souhaite ensuite ouvrir des pistes de recherche transdisciplinaire sur les bénéfices d’environnements sains combinés à la nécessité de la relation avec eux. Cet intérêt émerge chez moi dans un double parcours, à la fois de recherche anthropologique à Bornéo sur les relations autochtones à la nature et de recherches sociales interdisciplinaires en santé, notamment en santé mentale.