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Marc-André Sirard, Université Laval
Les universités innovantes, propriétaires des premiers droits attachés aux découvertes, perçoivent des redevances sur les inventions découlant des recherches de leurs membres, mais au-delà du retour monétaire facilement quantifiable, le développement d’activités économiques au niveau régional est, dans l’esprit de plusieurs, le principal bénéfice.

La société du savoir est à la fois une forme d’idéal et déjà une réalité bien concrète. Les chercheurs, au premier plan, contribuent activement à produire les connaissances scientifiques qui la fondent. Les citoyens, eux, y participent en incorporant ces savoirs, en les diffusant, en transformant leurs propres pratiques, et en produisant eux-mêmes des savoirs d’expériences. Les gouvernements font la promotion de cette société du savoir, ils en planifient le développement et en vantent les mérites. Pour leur part, les acteurs économiques font ressortir le potentiel de développement associé au savoir, et ce particulièrement dans un contexte de globalisation mondiale. Mais à qui appartient tout ce savoir, et comment se réalise son appropriation?

Le savoir scientifique est une ressource stratégique, très prisée, que l’on tente de s’approprier. A priori, il semble appartenir à tout le monde, particulièrement dans notre nouvelle société branchée où l’accès à l’information est presque universel. Mais concrètement, n’appartient-il pas à celui qui l’utilise – qu’il soit un acteur politique, économique, scientifique ou social – puisqu’il en tire un bénéfice? Dans ce contexte, le savoir scientifique est une ressource, aussi « concrète » que les richesses naturelles ou monétaires, puisqu’il permet d’innover, c’est-à-dire de « fonctionnaliser » de nouvelles idées.  

Pour toute société, dans l’actuelle civilisation mondiale, le développement des nouvelles idées représente un bénéfice collectif en termes d’emplois ou de retombées économiques. Mais le développement de concepts, d’outils ou de produits implique que quelqu’un investisse un supplément de temps et d’argent. C’est ici que l’entreprise s’approprie le savoir pour le développer et le commercialiser.  

Le savoir qu’utilisent les entreprises peut être produit localement, mais le plus souvent, il émerge du travail collectif des chercheurs, cumulé dans les millions de publications techniques et scientifiques. Et si l’utilisateur de nos savoirs provient d’un autre pays, il demeure que la donne est réciproque et que nos entreprises locales utilisent aussi des inventions venues d’ailleurs. Mais pour qu’une société puisse profiter de toutes ces connaissances, elle doit alors se les approprier, puis en faire le développement. Une expertise capable d’en faire une analyse critique doit alors intervenir. Mais on doit aussi retrouver toute une mécanique permettant d’intégrer ces savoirs dans la génération de produits/outils utiles, le tout avec la maîtrise du contexte légal-commercial qui permettra de se rendre à l’exploitation. 

La question de la propriété du savoir est aussi soulevée en termes d’investissement collectif et public, géré à travers les fonds de recherche gouvernementaux, et menant à des applications ayant des retombées socioéconomiques. La répartition des bénéfices découlant de cet investissement devient alors une question centrale. À qui appartient ce savoir payé par tous? Les universités innovantes, propriétaires des premiers droits attachés aux découvertes, perçoivent des redevances sur les inventions découlant des recherches de leurs membres, mais au-delà du retour monétaire facilement quantifiable, le développement d’activités économiques au niveau régional est dans l’esprit de plusieurs le principal bénéfice. Cependant, les entreprises, particulièrement les grandes transnationales, ont aussi des visées sur ces connaissances, et c’est là où les universités publiques devraient être aussi jalouses de leurs découvertes, comme ces grandes entreprises le sont de leurs brevets et secrets professionnels.  

Le savoir représente donc un des moteurs de la civilisation, malgré son usage abusif dans toutes les guerres connues. Il fournit une poussée sans nécessairement en contrôler la direction ou les retombées. Si les universités ne sont pas les propriétaires du savoir, elles ont tout de même un rôle fondamental en amont et en aval, dans sa génération, sa diffusion, sa démocratisation et dans la critique liée à son usage. Elles doivent alors faire appel à une approche transdisciplinaire et fournir les données probantes nécessaires à toute prise de décision. Libres et publiques, nos universités sont en fait les grandes plaques tournantes du savoir pouvant assurer sa libre circulation afin qu'il appartienne au plus grand nombre.


  • Marc-André Sirard
    Université Laval
    Présentation de l’auteurMarc-André Sirard est professeur titulaire à l’Université Laval. Il y a fondé le Centre de recherche en biologie de la reproduction en 1995, où travaillent présentement une centaine de personne. De plus, il détient, depuis 2000, une Chaire de recherche du Canada en génomique animale.

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