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Sandrine Bourque, Stagiaire en journalisme scientifique
Journaux, livres, magazines… aucun imprimé n’y échappe. Depuis dix ans, la percée du numérique préoccupe les acteurs du monde médiatique et culturel au point où certains chercheurs s’interrogent même sur la survie de ces supports. Révolu, le temps du papier? Pas tout à fait, juge Stéphane Labbé, de l’Institut national de recherche scientifique (INRS).

8 mai 2012, 80e Congrès de l'Acfas – Invité dans le cadre du 80e Congrès de l'Acfas à présenter un panel sur le déplacement du lectorat papier vers des plateformes numériques, l’anthropologue de formation s’est toutefois gardé de sauter aux conclusions, préférant plutôt laisser les faits – et les chiffres – parler d’eux-mêmes.

Ces chiffres sont d’ailleurs éloquents. Aux États-Unis, où le marché du livre est colossal, les ventes de livres numériques ont bondi de 164,4 % en 2010, touchant près d’un lecteur américain sur cinq. En Chine, près de 25 % des lecteurs réguliers disent s’être convertis au numérique au cours des dernières années. En France, les plus optimistes prédisent un brillant avenir à cette technologie, qui devrait occuper 15 % des parts du marché du livre d’ici quelques années.

Faible engouement chez les Québécois

Au Québec, la vague numérique n’a pas encore déferlé : moins de 1 % des grands lecteurs se disent consommateurs de e-books, un décalage important par rapport aux autres pays occidentaux. Deux facteurs clés expliquent ce retard : le coût élevé du produit et la faible diversité de l’offre pour les produits locaux.

« Le marché du numérique, qu’on parle de livres, de films ou de musique, est beaucoup plus développé et diversifié dans la sphère anglo-saxonne », explique Stéphane Labbé. « Non seulement certains ouvrages francophones n’existent qu’en version papier, mais la plupart de ces contenus sont aussi plus coûteux en format numérique qu’en format de poche! Cette situation explique le faible enthousiasme des Québécois francophones à l’égard du numérique ».

Avenir incertain

Agonie, affaiblissement, partage équilibré… les experts, mitigés, envisagent de nombreux scénarios concernant la place qu’occuperont les impressions dans les prochaines décennies. Mais tous s’entendent sur un point : l’imprimé, peu importe son format, va décliner au profit du numérique, un secteur plus rentable et plus écologique. « Le débat porte surtout sur l’ampleur qu’aura le phénomène numérique et la façon dont les lecteurs arriveront à concilier les deux modes de lecture », soutient Stéphane Labbé.

Pour d’autres spécialistes, l’avenir du livre est à trouver dans le présent de la musique : « Les consommateurs fréquentent toujours les disquaires », souligne le panéliste. « Ils achètent toujours des disques ou des vinyles. C’est la fréquence et la nature de la consommation des produits culturels qui changera avec ses supports ».

Lecteur hybride

La disparition complète du papier est-elle envisageable à court terme? Pas selon Stéphane Labbé : « Ce qui se dégage de la littérature sur le sujet, et ce que moi je crois, c’est que les deux modèles de lecture semblent destinés à coexister. » Selon lui, la diversité des groupes d’âge et des groupes sociaux assurera la survie des ouvrages imprimés : « Chaque lecteur a des goûts et des besoins qui ne peuvent être satisfaits exclusivement par l’un ou l’autre des modèles. Le lecteur du futur, je crois, sera un lecteur hybride. »

Stéphane Labbé rappelle en terminant que le livre numérique n’a toujours pas créé de nouveaux lecteurs, mais les choses pourraient changer. À ce sujet, il évoque le livre enrichi, un projet – toujours à l’état embryonnaire – qui combine le multimédia au texte et qui entend prendre d’assaut les secteurs du marché du livre qui s’y prêteront bien – les livres pour enfants ou les guides de voyage, par exemple. « Avec le livre enrichi, on assiste à un bouleversement de l’expérience de lecture », soutient-il. « Les technologies du numérique, j’en suis sûr, auront un effet d’attraction tant sur les nouveaux publics que sur les lecteurs du traditionnel livre imprimé ».


  • Sandrine Bourque
    Stagiaire en journalisme scientifique

    Étudiante en communication, politique et société à l’UQAM, Sandrine Bourque a signé plusieurs articles dans des journaux étudiants au cours de ses études au Cégep du Vieux-Montréal. Elle a fait ses premiers pas dans le milieu du journalisme à Radio Centre-Ville, la radio multilingue de Montréal, où elle a animé durant l’été 2010 un magazine d’actualité hebdomadaire, Planète Montréal.

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